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Niches fiscales

12.10.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Haines ordinaires

Et l'on reparle de l'ISF, des niches fiscales et du bouclier fiscal. Ce matin encore, j'ai entendu des tas de bêtises de la part de spécialistes auto-proclamés. Dans le cas de l'ISF, la déduction fiscale pour investissement dans les entreprises ne s'applique que pour les assujettis à l'ISF qui prennent des participations, ce qui est tout de même légèrement différent d'un simple investissement qui pourrait se faire sous la forme de traites ou d'avances sur compte courant. Il ne s'agit pas ici d'aider les PME qui ne trouvent plus de financement dans le secteur bancaire, mais de soustraire son argent à l'ISF. Et si au passage cet investissement pouvait faire des petits, ce n'est pas plus mal.

En d'autres termes, l'état favorise aux personnes payant l'ISF la prise du capital, donc du contrôle, des PME française qui n'arrivent plus à se financer autrement. Cette prise de participation doit se faire pour au moins cinq ans et au nominal des parts. L'entrepreneur voit ainsi arriver chez lui des groupements de particuliers qui ont créé des sociétés d'investissement et qui lui prennent un gros bout de capital contre ce qui n'est pas loin d'une misère pour une durée de cinq ans. Que se passe-t-il au bout de cinq ans ? Le groupement d'investisseurs qui n'est là que pour défiscaliser une somme d'argent et non pour suivre une entreprise le récupère et comme il est à nouveau soumis à l'ISF va essayer de vendre ses parts au plus offrant pour régler les impôts de ses membres. L'entrepreneur a alors tout perdu. Bizarrement, ça me rappelle une histoire de plat de lentilles… Et on se demande encore pourquoi des entreprises innovantes sont vendues à des étrangers qui n'attendent que cela. Un tas de nouveaux riches des pays de l'est, d'indiens et de chinois sont actuellement sur les rangs pour s'offrir les futurs fleurons français. Et ces gens-là sont capables de mettre des fortunes sur la table !

Ce qui est amusant pour bien connaître le système, c'est que le groupement d'investissement annonce qu'il va faire un pacte d'actionnaires et qu'il vous vendra préférentiellement ses parts à la fin de celui-ci. Mais il les vendra aussi à leurs valeurs réelles, soit capital plus fonds propres. Que se passera-t-il si l'entrepreneur n'a pas les fonds propres pour les racheter ? Parce que les investisseurs peuvent très rapidement faire la culbute puisqu'ils achètent au nominal — capital plus fonds propres réduits voire nuls car sinon l'entrepreneur ne cherchera pas des sources de financement — et revendent selon le même principe, mais avec des fonds propres beaucoup plus importants. Si ce n'était pas le cas, cela voudrait dire que l'entreprise est moribonde donc le problème ne se poserait pas. L'entrepreneur sera alors le seul dindon de la farce !

C'est en partie en raison de cette fiscalité aberrante et de l'incompétence des banques qu'on se retrouve dans un état économique désespéré. Le but du jeu n'est plus aujourd'hui d'utiliser son argent à des fins utiles, mais de simplement le soustraire à un impôt complètement idiot puisqu'il n'est pas sur le revenu mais sur le patrimoine. Et pour cela, tout est bon, même vendre les bijoux de familles surtout lorsque les bijoux appartiennent à quelqu'un d'autre.

Lorsque d'un côté, on met les sources de financement des entreprises qui sont comme nous l'avons vu pas très saines et d'un autre les charges qui pèsent de plus en plus puisqu'aujourd'hui, il faut compter sur le fait qu'un salarié coûte mensuellement le double de son salaire brut (charges patronales et charges diverses), il est de plus en plus invraisemblable que des gens intelligents se demandent encore pourquoi l'économie française se porte si mal vis à vis de l'économie allemande. On ne va pas pouvoir continuer éternellement à ponctionner à tout va les entreprises en taxant le patrimoine des plus fortunés et en leur offrant des portes de sortie sous la forme de dégrèvements divers et variés qui à moyen terme vont nous exploser à la figure.

L'enjeu du bouclier fiscal n'est pas seulement la limitation de l'ISF, bouclier fiscal qui sert d'ailleurs plus aux petits revenus qu'aux grande fortunes est-il encore besoin de le rappeler, puisqu'il intègre aussi des taxes locales souvent importantes que payent des contribuables pas vraiment aisés. L'enjeu de ce bouclier fiscal est aussi de limiter les effets de ces niches permettant le dégrèvement de l'ISF. En supprimant à la fois ce bouclier fiscal et cet ISF, on pourra peut-être penser enfin au refinancement réel et pérenne de l'économie française. Et la conséquence de la suppression de cette taxation imbécile est aussi la limitation à terme des délocalisations des PME, qui ne se délocaliseraient jamais si elles avaient pu rester françaises, car elle se sont vues rachetées par des groupes étrangers en raison des niches fiscales.

 

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