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Prenez les transports en commun

18.04.11 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Haines ordinaires

Je ne sais pas pourquoi j'ai accepté de changer un robinet d'évier chez une de mes connaissances. J'aurais dû fuir courageusement lorsqu'on me l'a demandé. Fuir parce que je n'avais pas les outils sous la main et fuir d'autant plus que je devais passer derrière un plombier parisien. Je ne sais pas si vous voyez bien ce que je veux dire.

J'ai donc dû partir à la recherche d'un chalumeau. Un chalumeau bête pour braser des tuyaux de cuivre au cuivre-argent ou cuivre-phosphore. Si vous rentrez un jour dans un magasin en demandant un tel chalumeau, vous ressortirez à coup sûr avec un chalumeau oxhydrique ou un bazar à acétylène. C'est tellement plus cher et franchement pas beaucoup plus efficace qu'un bon vieux chalumeau fonctionnant au propane.

Figurez-vous que j'habite au centre de Paris, une bourgade tellement sous-développée qu'il est impossible de trouver un chalumeau au propane correct et encore plus difficile de trouver une bouteille de gaz propane. J'ai fini par trouver chez Primagaz, sur internet, un chalumeau acceptable. Mais ce chalumeau ne fonctionne qu'avec une bouteille de propane qu'on ne commande pas encore sur internet.

Je viens de passer deux semaines à chercher une petite bouteille de propane. Pas une de 13 kg, une demi-bouteille qui suffira largement et sera plus facile à ranger. Après avoir téléphoné à tous les revendeurs de gaz de mon quartier, certains ne vendant que des recharges, non des consignes, et encore seulement sur commande expresse, d'autres ne vendant que du butane parce que comprenez-vous il ne gèle pas dans Paris, je finis par tomber sur la capitainerie du port de Paris-Arsenal qui me signale aimablement que oui, ils ont bien des bouteilles de propane et qu'ils font naturellement les consignes. L'employé n'était pas plus étonné que ça, il a l'habitude de voir débarquer chez lui des non plaisanciers dans le seul but de lui acheter du propane.

Je me retrouve donc avec une bouteille de propane jaugeant 15 kg au bas mot à la capitainerie du port et il me fallait rentrer vers la place de la République. J'essaie de prendre le bus. Il est parfaitement impossible de prendre le bus avec une demi-bouteille de gaz, le machiniste refuse. Qu'il soit condamné — et avec lui ses sept générations suivantes ! — à marcher trois kilomètres avec une telle bouteille !

Et heureusement encore que je n'ai pas une tête de terroriste sinon il aurait directement appelé les forces de l'ordre et les démineurs. Je ne tente même pas le métro et essaie de trouver un taxi. Même motif, même punition. Je n'ai pas trouvé un seul taxi qui m'autorisait à monter avec ma bouteille de gaz. Comme je bataillais depuis quinze jours, il était hors de question de la laisser sur le trottoir !

Je décide donc de rentrer à pied. Une balade romantique avec une bouteille de gaz sur l'épaule. Il faut dans un premier temps éviter les grands boulevards. Les gens ne faisant absolument pas attention en général, pourquoi feraient-il attention à un individu assez bête pour se balader avec une bouteille de gaz sur l'épaule ? En route donc par la rue des Tournelles, place des Vosges, rue de Turenne… Enfin, en route, c'est un bien grand mot parce que j'avais oublié que rue des Tournelles se trouvait une synagogue, que celle-ci était gardée par un cordon de forces de l'ordre et que je remontais négligemment la rue quelques jours avant la pâque juive avec une bouteille de gaz verte du plus bel effet. J'ai échappé à la fouille au corps mais ai dû présenter mes papiers et justifier ma présence en un tel lieu avec une bouteille de gaz. Bientôt, il faudra faire des détours pour éviter les synagogues, ce qui ne fera en y réfléchissant bien qu'un embryon de ghetto. Pauvre France ! Arrivé square du Temple, une bande de jeunes était en train de se faire contrôler pour détention et usage de stupéfiants. Il faut dire que fumer au nez et à la barbe d'un cordon de CRS des cigarettes qui font rigoler n'est pas la chose la plus intelligente qui soit. Et dire qu'il s'en trouve encore pour dire que le canabis n'est pas nocif pour le système nerveux central… Je ne sais pas pourquoi, mais l'un de ces CRS se tourne vers moi pour me demander une seconde fois mes papiers. Deux fois en une heure pour la simple raison que je portais une bouteille de gaz dans Paris. La dernière fois qu'un agent de police m'a demandé mes papiers, c'était juste après les attentats de 1995 devant chez moi, à côté de Beaubourg !

La psychose doit être assez sérieuse pour que les gardiens de la paix aient pour consigne de contrôler tout porteur de bouteille de gaz. Mais restons dans le sujet. On nous bassine avec les transports en commun pour éviter la pollution et les embouteillages. Peut-être, mais encore faudrait-il pouvoir les utiliser pour transporter quelque chose d'aussi petit qu'une demi-bouteille de gaz ! Je n'ose me mettre à la place d'une personne âgée qui cherche une bouteille pour sa gazinière.

 

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