« Ça m'angoisse...De la nécessité du strabisme »

Sans la liberté de blâmer

15.02.12 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Vieux con

Je ne lis plus le Figaro depuis que Serge Dassault a transformé le « premier quotidien national français » en organe officiel de l'UMP. Il ne faut pas se leurrer, le Figaro est aujourd'hui ce que la Pravda était au parti communiste de l'Union Soviétique. En pire, peut-être, parce que la Pravda comptait une pagination un peu plus étoffée.

Ce matin, j'ai trouvé un exemplaire du Figaro sur mon bureau. J'ai été désagréablement surpris. Le Figaro est aujourd'hui pathétique, réduit à sa portion congrue, un peu comme France Soir ou le Quotidien de Paris juste avant leurs naufrages respectifs. Je me souviens, il y a une quinzaine d'années, que ce journal comptait entre cinquante et cent pages de grand format. Les articles étaient des articles de fond et de bonne facture. Il y avait un carnet international et national, un carnet sport, un économique et en fonction du jour de la semaine, un carnet différent touchant à la culture. La pagination actuelle se réduit à une vingtaine de pages auxquelles s'adjoint le traditionnel carnet saumon traitant d'économie. Une autre chose m'a frappé. Il y a quinze ans, il y avait des tribunes de deux pages d'hommes politiques de tous bords. Aujourd'hui, les articles politiques se bornent à une chambre d'enregistrement de l'UMP sans aucune analyse. Je ne suis pas vraiment de gauche, mais je ne supporte plus les outrances de la droite française dite décomplexée.

Pourtant, la devise du quotidien est passée dans le même temps de l'ours à la manchette. Je vous rappelle que cette devise, empruntée à Beaumarchais, est la suivante : « sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur ». On aurait pu se dire qu'une telle mise en exergue aurait eu une conséquence sur la ligne éditoriale du journal. Même pas.

Il reste tout de même un espoir pour sauver le plus vieux quotidien national français. Les journalistes du Figaro s'élèvent de plus en plus contre la ligne éditoriale imposée par sa direction et réclament de pouvoir faire leur travail et uniquement leur travail de journalistes.

À une heure où les journalistes qui font autre chose que de retranscrire bêtement ce qu'on leur dit se comptent sur les doigts de la main de Django Reihnardt, le fait que ces journalistes s'opposent à leur direction apporte un réel bol d'air. Reste maintenant que cette révolte soit suivie d'effets.

 

1 commentaire

Commentaire de: Atg
Atg

Ca me fait penser à cette phrase de K. Popper qui disait en substance qu’un psychanalyste ou un marxiste, en refusant d’adopter le critère de réfutabilité, ne pouvaient en lisant leur journal que trouver confirmation de leur théorie.

A choisir, si on est à droite, il vaut mieux lire un journal de gauche et inversement. Le dessin de Faizant m’a toujours fait flipper. Et la mort d’un journal se signe toujours lorsqu’il commence à proposer un “supplément tv". Alors, quand en plus il propose un supplément “Madame"…

Je ne lis plus depuis longtemps le moindre journal. Je regarde de manière morose l’actualité sur le site d’accueil de Google et cliquant de manière désabusée sur un lien quelconque, je tombe aussi bien sur Libération, Midi Libre ou La Croix. Il y a encore un vague besoin de se tenir “au courant". Je ne sais pas pourquoi d’ailleurs.

Ca doit correspondre à ce que Deleuze exprimait au sujet de la télé : le besoin de regarder quelque chose de niais tant la détestation de soi peut quelquefois être envahissante et doit trouver un reflet.

Depuis que j’ai remplacé ma page d’ouverture de Google par Duckduckgo, j’ai le syndrome du manque. A ce moment là, de la même manière qu’il m’arrive de bouffer dans un fast food, je vais sur Yahoo Actualités.

16.02.12 @ 21:04


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