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Indépendance de la presse

14.03.12 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les financiers

Vous souvenez-vous d'un ancien premier ministre reconverti en chasseur de bulots à l'Île de Ré ? Oui, je veux parler de Lionel Jospin, ancien premier ministre, et qui a permis à Jacques Chirac d'obtenir un résultat aux élections présidentielles de 2002 digne d'une république bananière.

Lors de son séjour à Matignon, non seulement ce dernier a soutenu qu'il fallait être transparent sur les fonds dits spéciaux, mais il l'a fait.

Pour mémoire, la technique des « fonds spéciaux » ou « fonds secrets » constitue une exception à la règle de la spécialité des crédits qui veut que les crédits ouverts par la loi de finances ne soient pas ouverts en bloc, mais soient affectés à une catégorie de dépenses déterminée. Cette règle de la spécialité des crédits est édictée à l'article 7 de lordonnance du 2 janvier 1959 :

Les crédits ouverts par les lois de finances sont mis à la disposition des ministres pour les dépenses ordinaires, les dépenses en capital et les prêts et avances. Ils sont affectés à un service ou à un ensemble de services. Ils sont spécialisés par chapitre groupant les dépenses selon leur nature ou selon leur destination. Toutefois, certains chapitres peuvent comporter des crédits globaux destinés à faire face à des dépenses éventuelles ou à des dépenses accidentelles. Des crédits globaux peuvent également être ouverts pour des dépenses dont la répartition par chapitre ne peut être déterminée au moment où ils sont votés. L’application de ces crédits au chapitre qu’ils concernent est ensuite réalisée par arrêté du ministre des finances.

Or la nouvelle loi organique relative aux lois de finances et datant du 1er août 2010 prévoit que l'autorisation budgétaire donnée par le parlement reposera désormais sur une nouvelle unité de spécialité appelée programme et regroupant les crédits par objectif. Ces programmes constituent la clef de voute de la réforme introduite par cette nouvelle loi organique et permettent de passer d'un budget de moyens, présentant les crédits par nature de dépenses, à un budget d'objectifs et de résultats. Je ne suis pas convaincu que ce soit réellement positif puisque dans un budget de moyens, les dépenses se tarissent d'elles mêmes lorsqu'il n'y a plus d'argent en caisse. Disons simplement que le principe d'objectif et de résultat est dans l'air du temps.

Là-dedans, les « fonds spéciaux » constituent une atteinte sévère à la règle de la spécialité des crédits qui relève plus de la tradition que du droit budgétaire. En effet, cette technique de globalisation fonctionnelle des crédits n’est pas évoquée par l’ordonnance de 1959.

Il se pose donc le problème de l'attribution de ces crédits au budget de la « présidence du gouvernement », c'est-à-dire au premier ministre. Cette attribution relève de la loi n° 46-854 du 27 avril 1946, donc antérieure à l'ordonnance de 1959. Cette loi indique que le premier ministre dispose librement de ces crédits et joue à la fois le rôle d'ordonnateur et de comptable au plus grand mépris des règles de la comptabilité publique. Les membres du gouvernement intéressés doivent alors justifier de l'utilisation des fonds devant le premier ministre qui leur donne quitus par décret. Nous passerons sur toutes les dérives d'un quitus donné par quelqu'un qui est à la fois juge et parti.

Le premier ministre doit cependant information au le président de la république de l'usage qui a été fait des « fonds spéciaux ». C'est la moindre des choses pour tenter de leur donner un semblant de respectabilité.

Ces « fonds spéciaux » se divisent en deux catégories :

  • les fonds spéciaux du gouvernement qui sont utilisés librement par le premier ministre et leur affectation ne fait pas l’objet de débats au parlement. Ils sont destinés aux besoins courants de l’action ministérielle : recrutement de personnel supplémentaire pour les cabinets ministériels, soutien à la presse favorable à la politique gouvernementale, financement de certaines associations ou encore frais vestimentaires des ministres…
  • les fonds spéciaux à destination particulière qui sont destinés à des actions qui par nature ne peuvent être précisées : financement de certaines dépenses des services secrets qu'il vaut mieux ne pas voir apparaître explicitement dans d'autres comptes.

Dans cette liste, plusieurs points me gênent aux entournures. Dans la liste des fonds spéciaux du gouvernement, je puis lire que ces fonds servent entre autres de soutien à la presse favorable à la politique gouvernementale. Nous sommes donc en train de sponsoriser au travers de nos impôts le Figaro, Europe 1, TF1 et certains autres media que j'oublie, la liste serait trop longue. Nous finançons aussi certaines associations. L'heureux contribuable que je suis pourrait-il avoir une liste ? Je veux bien financer certaines associations, mais je refuse à titre personnel de donner ne serait-ce qu'un bouton de culotte à certaines autres ! Quant aux frais vestimentaires des ministres, il me semble qu'ils étaient déjà habillés à peu près correctement avant d'être ministres. Je veux bien faire une exception pour David Douillet qui aurait eu l'air bête à son bureau en kimono. Enfin, d'un autre côté, est-il réellement à sa place à son bureau ? Si encore il parlait des sports…

Donc, les fonds spéciaux servent à financer un certain nombre de dépenses qui ne pourraient pas être financées officiellement et qui s'apparentent — hors les costumes de David Douillet parce que la ligue des tailleurs du Marais ne me semble pas assez puissante — soit à du lobbying gouvernemental., soit à ce qu'il faudra bien appeler par son nom, du bourrage d'urnes au travers d'actions associatives.

Dormez sur vos deux oreilles, heureux contribuables, vos impôts sont bien utilisés.

 

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