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La défense de Mélenchon

15.04.12 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les politiciens

Un esprit aussi grincheux que moi vient de m'indiquer une tribune sur le site de Marianne2. Un chroniqueur du Guardian y défend Jean-Luc Mélenchon. Pourtant, le Guardian a une ligne éditoriale de centre-gauche, ce qui devrait l'amener à soutenir plus ouvertement François Hollande, voire François Bayrou peut-être un peu plus réaliste.

Je vais citer l'article in extenso et critiquer point par point les arguments qui me semblent fallacieux.

Le président conservateur français Nicolas Sarkozy s’est présenté en 2007 avec pour objectif de faire ressembler l’économie française à celle des États-Unis d’Amérique. Le moment était mal choisi : les États-Unis étaient alors au bord de la pire récession de leur histoire depuis la Grande Dépression, et ils allaient plomber l’économie de l'Europe, ainsi que celles d'une grande partie du reste du monde, en même temps que la leur. Les États-Unis ayant connu quatre années de croissance quasiment nulle, Sarkozy refuserait probablement aujourd'hui de tenir ce discours. Toutefois, il a bel et bien réussi, d’une certaine manière, à rendre  l’économie française plus américaine.
 
Après avoir été l’un des rares pays à hauts revenus à n’avoir pas connu d’augmentation des inégalités entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 2000, la France est devenue plus inégalitaire depuis l’élection de Sarkozy. Le rapport entre les revenus du 99ème centile (ceux des 1% les plus riches, en haut de l'échelle) et ceux du premier centile (en bas de l'échelle) est passé de 11,8 à 16,2. D’autres indicateurs d’inégalité ont aussi augmenté sensiblement. Ainsi, le coefficient de Gini est passé de 26,6 à 29,9. Ce changement s'est produit entre 2007 et 2010 ; la situation est probablement pire aujourd’hui.

C'est dommage, l'auteur commence à triturer les statistiques pour leur faire dire ce qu'il veut. Effectivement, si l'on regarde les 99e centiles, les différences de niveaux de vie se sont accrues. En revanche, si on regarde les 90e centiles, ce qui est plus intéressant d'un point de vue strictement statistique, ce n'est pas vrai comme le prouve le graphique ci-dessous issu d'un article de l'INSEE.

Fig. 1 : Évolution des inégalités selon l'INSEE

Quant à l'indice de Gini, la France est en-dessous de la médiane des pays de l'OCDE. Il est donc malhonnête de regarder le seul cas de la progression de l'indice de Gini de la France qui reflète aussi des problèmes qui dépassent ses frontières.

En relevant l’âge de départ en retraite par une réforme inutile qui déclencha une forte opposition et de nombreuses vagues de protestation, Sarkozy a ouvert la voie à une France encore plus inégalitaire pour les années à venir.

Certes, il y a eu une forte opposition. Mais il ne faut pas oublier pourquoi Mitterrand avait décidé de fixer l'âge légal de départ à la retraite à soixante ans malgré les contestations de tous les démographes. Le système de retraite français classique est par répartition et non par point ou par fonds d'investissement. Il faut donc pouvoir le financer d'années en années grâce aux cotisations perçues sur l'année en cours. Lorsque la proportion de retraités grandit, la pression sur les actifs s'accroît. Cela renchérit d'autant le coût du travail qui n'a pas vraiment besoin de cela actuellement. L'inégalité, ce sera surtout dans les années à venir si on ne réforme pas une bonne fois pour toute ce système en installant un système à points. Plus d'âge de départ à la retraite à négocier, chacun responsable de sa situation et touchant une pension en fonction de ses points accumulés. Sans cela, il ne faut pas se voiler la face, il n'y aura plus aucune retraite car il n'y aura plus assez d'actifs pour les payer. Remarquez bien, plus de retraite, c'est déjà une égalité supprimée.

Et cette réforme doit aussi passer pour les fonctionnaires, pour les multipensionnés et pour les régimes spéciaux qui sont de vrais scandales du système des retraites à la française. Sans doute n'y a-t-il aucune inégalité à chasser par là. Les fonctionnaires râlent souvent de leurs salaires bas. Mais il ne faut pas oublier que ce ne sont pas des salaires mais des traitements et que leur retraite est une pension qui est légalement un traitement reçu en absence d'activité (un traitement décalé dans le temps). Le salaire réel d'un fonctionnaire est ainsi non pas ce qu'il a sur sa fiche de paie mais cette fiche de paie plus grosso modo la moitié de sa pension mensuelle. Quant aux titulaires des régimes spéciaux, je préfère ne pas en parler. Comparer les salaires des six derniers mois pour calculer une retraites aux vingt-cinq meilleures années devrait prêter à sourire lorsqu'on se targue de donner des leçons d'égalité.

La comparaison entre la France et les États-Unis est pertinente car les deux pays ont à peu près le même niveau de productivité, de production par heure travaillée. En d’autres termes, les deux pays ont la capacité économique de bénéficier à peu de choses près du même niveau de vie. Les Français ont choisi d'utiliser leurs gains de productivité sous la forme d’une réduction du temps de travail, de vacances plus longues, d’une couverture maladie universelle, de l’accès gratuit à l’université et aux services de garde d’enfants, ainsi que d’une plus grande égalité dans la redistribution des revenus. A l’inverse, aux États-Unis, plus de 60 % de la progression des revenus de ces trente dernières années a profité aux 1% les plus riches. La pauvreté est à présent revenue au niveau  de la fin des années 1960 ; les droits d’inscription à l’université ont augmenté en flèche ; la loi ne prévoit pour nous aucun congé payé, et 52 millions d’Américains n'ont pas d' assurance de santé (ce chiffre pourrait diminuer dans les années à venir, mais cela dépendra en partie de la Cour Suprême).

J'aimerais assez que quelqu'un m'explique un jour ce qu'est la productivité du travail. Pour un ouvrier sur une chaîne de montage, j'arrive à imaginer. Pour un enseignant ou un chirurgien, voire un cadre, cette notion me semble beaucoup plus floue.

Par ailleurs, les français n'ont pas choisi d'utiliser leurs gains de productivité pour travailler moins, on leur a dit qu'il fallait moins travailler (en 1981 avec une semaine de congés en plus et une heure de moins par semaine, en 1997 avec trente-cinq heures hebdomadaires) et leur travail a été réorganisé en conséquence. J'apprends au passage que les services de garde d'enfants sont gratuits. Tiens, il faudrait que j'en parle autour de moi parce que personne ne semble réellement au courant de cette avancée sociale.

Par ailleurs, dire que le salarié américain n'a pas de congés payés, c'est y aller un peu fort. Il n'y a pas de congés payés obligatoires dans la loi, c'est un peu différent.

La plupart des citoyens français tiennent à cette sécurité économique et à cette façon de partager les fruits de la prospérité. On peut donc s’étonner qu’un homme proposant un programme tel que celui de Sarkozy ait tout simplement pu être élu, et puisse avoir des chances de l’être à nouveau. Cette situation s’explique par un malentendu de l’opinion sur les questions économiques les plus importantes, malentendu entretenu et encouragé par une couverture médiatique biaisée.

Une couverture médiatique biaisée… Comme vous y allez ! Les français, dans leur immense majorité, ne comprennent rien à l'économie, parce que si c'était le cas, le débat serait actuellement entre Nicolas Dupont-Aignan et François Bayrou. Ils réagissent comme des veaux — aux dires du Général, ce n'est pas récent —, adorent qu'on les caresse dans le sens du poil et qu'on flatte leurs plus bas instincts. Nicolas Sarkozy a été élu en 2007 sur un programme sécuritaire et sur une promesse d'amélioration du pouvoir d'achat, en d'autres termes sur des promesses qui concernent chaque électeur immédiatement et non l'ensemble du pays à un horizon plus lointain. C'est exactement ce que fait Mélenchon actuellement avec ses propositions.

Comme en 2007, l'opinion dominante est que la France vit au-dessus de ses moyens, et Sarkozy prévient à présent que, s'il n'était pas réélu, elle pourrait bien devenir la nouvelle Grèce et affronter une débâcle économique. Il s’engage donc à équilibrer les comptes publics d’ici à 2016.

Lorsqu'on a six points de PIB de déficit structurel du budget de l'état, je ne sais pas comment il est possible de déclarer sans rire que la France ne vit pas au-dessus de ses moyens. Remettre le budget de l'état à l'équilibre est une priorité absolue quel que soit le prochain gouvernement.

Malheureusement, son rival du Parti socialiste, François Hollande, promet l’équilibre budgétaire d’ici à 2017. Il y a bien entendu des différences importantes entre les deux candidats, mais si l’un ou l’autre devait appliquer un programme d’austérité budgétaire d’une telle ampleur, à un moment où les économies française et européenne sont si faibles, il est quasiment certain que le chômage et bien d’autres problèmes économiques ne pourraient que s’aggraver. La France perdrait alors certains de ses nombreux acquis sociaux et économiques.

Là, on touche à la schizophrénie à la française. Tout le monde veut conserver ses acquis sociaux lorsqu'il les reçoit, mais personne ne veut les conserver lorsqu'il faut les payer. Tous ces acquis sociaux auraient dû être remis en cause lorsqu'il en était encore temps. Pour les retraites, rien d'efficace n'a été fait et il faudra à très court terme repartir dans un cycle de négociation avec les syndicats dont certains n'ont pas une attitude réellement responsable. Idem pour l'assurance maladie, les indemnités chômage et tous les autres acquis sociaux.

Quant au sacro-saint service public, il y aurait beaucoup à dire. Il est parfaitement possible de réduire le nombre de fonctionnaires en France sans porter atteinte à la qualité du service public (voir pour cela le rapport Balladur). À titre de comparaison, les seuls traitements des fonctionnaires représentent en France 12% du PIB contre 7% en Allemagne. Pourtant, le service public en Allemagne fonctionne tout aussi bien que chez nous. Rien qu'en rendant efficace l'état, il serait donc possible de trouver la marge suffisante pour réduire à la portion congrue le déficit structurel du budget de l'état. Pourquoi personne n'en parle-t-il ?

Fort heureusement, la France dispose d’une alternative plus progressiste : elle s’incarne dans la candidature de Jean-Luc Mélenchon, portée par le Front de gauche. Dans la course à l’Elysée, il semble être le seul à comprendre les choix économiques réels qui s’offrent à la France et à la zone euro. La France n’a nullement besoin d’une cure d’austérité qui la condamnerait à finir comme la Grèce. Au lieu de cela, Mélenchon propose que la Banque centrale européenne fasse son travail, c’est-à-dire qu’elle prête au taux de 1% à la France et aux autres gouvernements européens, comme elle le fait aux banques privées. Le poids du service de la dette française, d’environ 2,4% du PIB est encore assez raisonnable. Si la France peut continuer à emprunter à faible taux, elle pourra se sortir de ses problèmes actuels, tout en créant de l’emploi et en augmentant les revenus. Cela relève du bon sens macroéconomique.

Oui, finançons l'état à l'aide d'emprunts à la BCE. Mélenchon parle sans cesse de la loi « scélérate » (sic) de 1973 qui interdit à l'état d'emprunter à sa banque nationale. Mais Jean-Luc devrait aller relire ce texte et devrait le remettre dans le contexte de l'époque. Giscard et Pompidou étaient parfaitement conscients que la crise pétrolière de 1973 signait la fin des trente glorieuses. Pour mémoire, les trente glorieuses étaient une période d'enrichissement considérable du pays et d'assez forte inflation. L'état pouvait alors emprunter à la Banque de France parce que l'accroissement de la richesse nationale compensait largement l'inflation provoquée par le fonctionnement de la planche à billets. Aujourd'hui, emprunter à la BCE serait suicidaire puisqu'il faudrait créer de la monnaie sans avoir le métal (ou la création de richesse) correspondante.

Et Mélenchon confond les causes et les conséquences. Ce n'est pas parce qu'une loi interdit à juste titre le financement de l'état grâce à des emprunts aux banques nationales que l'état doit avoir un budget en déficit chronique depuis quarante ans et emprunter à ces banques privées. Le fait que les différents pays européens se sont mis eux-mêmes dans les mains des spéculateurs n'est pas dû à cette loi de 1973, mais au fait que leurs dépenses sont sciemment mal budgétisées.

Mélenchon veut aussi réduire le temps de travail, augmenter le salaire minimum, ainsi que les impôts pour les plus riches. Il rejette l’absurdité de l’équilibre budgétaire - comme d'ailleurs la plupart des économistes aux États-Unis - et fustige l'absence d'engagement de la Banque centrale européenne en faveur du plein emploi. Cette démarche est pertinente d’un point de vue économique puisque, notamment en période de récession, la BCE peut créer de la monnaie. C'est ce qu'a  fait la Réserve fédérale américaine en créant 2 300 milliards de dollars depuis 2008 sans craindre une inflation excessive.

L'équilibre budgétaire est absurde. Peut-on avoir le nom de ces brillants économistes américains ? Ce sont les mêmes qui n'ont pas réagi aux signaux d'alerte de Benoît Mandelbrot sans aucun doute.

Quant à la création de 2300 milliards de $US depuis 2008 sans inflation, c'est une contre-vérité qui relève d'une manipulation des chiffres parce que deux phénomènes ont travaillé en sens inverse. Commençons par regarder un graphique de l'inflation aux USA.

Fig. 2 : Évolution de l'inflation aux USA

Que voyons-nous ? Une déflation sur quasiment toute l'année 2009 précédée par une forte inflation vers le milieu de 2008. Cette déflation n'a pas été trop forte parce que justement, la banque centrale américaine a créé de la monnaie pour compenser la destruction de monnaie qui a eu lieu en bourse à la même époque. S'il n'y avait pas eu cette destruction en bourse, l'inflation américaine aurait été bien plus importante, de l'ordre de ce qu'on peut voir à la mi-2008.

Mélenchon veut aussi faire sortir la France de l’OTAN. Ce serait là une très bonne chose pour la France, mais aussi pour le monde. Initialement, l’OTAN a été créée pour contenir l’Union soviétique qui, au cas où certains ne l’auraient pas remarqué, n’existe plus. Les Américains n’ont plus besoin d’  « alliés » qui aident nos gouvernements à occuper d’autres pays comme l’Irak ou l’Afghanistan, ou à entamer une autre guerre dangereuse et déraisonnable, comme nous semblons nous préparer à le faire en Iran.

Je ne vois pas trop le rapport avec l'économie. Que l'OTAN ne serve plus à rien est une chose. Que cela fasse voter Mélenchon en est une autre.

Les deux finalistes se retrouveront lors d’un deuxième tour si aucun d’eux n’obtient de majorité au premier,  le 22 avril, ce qui paraît hautement probable. Mélenchon gravite autour de 15 % dans les sondages, mais il se situerait encore plus haut sans la crainte de le voir le candidat socialiste éliminé du second tour. C’est ce qui s’est produit en 2002, quand le candidat d’extrême-droite anti-immigration, Jean-Marie Le Pen, président du Front national à l'époque, est arrivé deuxième, derrière Jacques Chirac, devançant de justesse le socialiste Lionel Jospin. Le risque que ce scénario se répète cette année est très faible. La candidate du Front national, Marine Le Pen,  obtient entre 13 et 16 % dans les sondages. Il est clair que quiconque souhaite préserver le mode et le niveau de vie français devrait choisir Mélenchon.

Pourquoi ? Mélenchon ne pourra pas contraindre les autres pays à modifier les traités en vigueur pour que la France puisse emprunter à la BCE parce que c'est une position absurde en l'état actuel des choses sauf à avoir de l'inflation. Comparer la situation des USA en 2008 à la situation de la France en 2012 relève de la manipulation.

Pour le candidat d'un troisième parti, il est beaucoup plus facile en France qu'aux Etats-Unis  d’avoir une influence significative, même sans remporter l’élection. Hollande a déjà orienté son discours plus à gauche afin de capter les voix du Front de gauche, et Mélenchon aura des atouts en main avant de soutenir la candidature Hollande au second tour. Alors que les deux grands partis s'engagent à mettre en place des politiques économiques qui diminueront le niveau de vie des Français – alors que, en 2007, seul Sarkozy s’engageait dans cette voie – on peut difficilement trouver moment plus opportun pour voter « hors des sentiers battus ».

Et il ne faut pas oublier que Mélenchon peut avoir n'importe quel avis, proposer n'importe quoi pour faire parler de lui. Il sait qu'il ne sera pas élu et qu'il n'aura pas à appliquer sn programme. Ses promesses n'engagent que ceux qui les croient.

Crédit : l'article initial a été écrit par Mark Weisbrot, co-directeur du Center for Economic and Policy Research à Washington. Il est également président de l’organisation Just Foreign Policy.

 

7 commentaires

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Commentaire de: tharibo  
tharibo
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Je pense que l’article du Guardian parle de la Modern Monetary Theory (MMT).
Celle-ci est expliquée en français sur ce blog : http://frappermonnaie.wordpress.com/

Si vous trouvez le temps d’y jeter un oeil et de séparer ce qui vous semble bien vu dans cette théorie de ce qui vous semble à jeter, ça m’intéresserait. Je n’ai pas les compétences pour avoir un regard vraiment critique par rapport à ces explications.

Pour résumer ce que j’en ai compris, la MMT repart des bases de ce qu’est la monnaie pour expliquer en quoi un budget d’état en équilibre est une ineptie. Et il y a un article qui explique en quoi la création de monnaie n’est pas forcément synonyme d’inflation comme on nous le rabache depuis trente ans.

J’aimerai bien voir ces affirmations à travers votre filtre.

PS: votre filtre sur le champ email semble incorrect : avant le @ on peut mettre ce qu’on veut comme caractère, c’est le serveur mail de réception qui se débrouille avec (et je souhaiterai pouvoir employer le caractère “+").

16.04.12 @ 10:30
Commentaire de: Le Grincheux

Je vais de ce pas regarder ce blog pour le critiquer. Quant au champ email, je ne suis pas sûr qu’il se configure mais je vais regarder… Je ne vous promets rien.

16.04.12 @ 10:34
Commentaire de: Bertrand
Bertrand

“les régimes spéciaux qui sont de vrais scandales du système des retraites à la française”

Je ne suis pas tout à fait d’accord. Le système de retraite fait partie du contrat passé entre l’employeur - par exemple la SNCF ou Air France - et l’employé. Qu’il y ait des régimes différents n’est pas scandaleux en soi, tant que ces régimes s’autofinancent. Tout le problème est là, puisque c’est les couillons de salariés du régime général qui cotisent pour ceux qui ont des avantages qu’eux-mêmes n’ont pas. Idem pour le chômage des intermittents.

16.04.12 @ 10:56
Commentaire de: Le Grincheux

Bon, critique du billet du 14 avril 2012.

Utiliser la croissance pour équilibrer un budget est dangereux et je rejoins l’auteur des billets de http://frappermonnaie.wordpress.com/. En revanche, il faut ne pas tout mélanger. Les richesses créées avant les années 1970 et après n’ont pas été financées de la même façon. L’auteur indique le TGV, le Minitel, le réseau Internet qui ont été financés par la force publique durant une période où l’énergie était abondante et peu onéreuse, et les téléphones portables qui ont été financés principalement par les entreprises privées. Mettre tout cela dans le même sac relève d’une imposture parce qu’il est assez facile pour un état de financer sur ses deniers des programmes de recherche lorsqu’il s’enrichit.

L’auteur distingue aussi une création monétaire par crédit (ce qui est fait lorsqu’on demande un emprunt à une banque), la monnaie étant effectivement créée lorsque cet emprunt est remboursé, d’une émission monnétaire pure et simple. Or une émission pure et simple ne peut aboutir qu’à un dilution de la valeur de la monnaie, car il y a plus de monnaie en circulation, sauf à imposer artificiellement une valeur à celle-ci, ce qui n’est pas tenable à long terme. L’inflation générée - ou plutôt dans ce cas la dévaluation - peut dans certain cas compenser une destruction de richesse (cas des USA en 2009). Cette destruction de richesse peut survenir lors des défauts de règlement des crédits qui ont créé monnaie lors de leur émission.

Donc, oui, la planche à billet ne provoque pas obligatoirement de l’inflation. Mais non, ce n’est pas au système monétaire de se mettre au service de l’économie puisque dans le cas général, l’état d’une monnaie est le reflet de l’économie sous-jacente (ou de l’idée que les gens s’en font, ce qui peut être dangereux).

En revanche, je ne suis pas du tout l’auteur lorsqu’il prétend que la réduction de la dette entraîne grandes dépressions voire petites récessions. Pourquoi ? Aujourd’hui, la spéculation fait que la charge de la dette souveraine des pays industrialisés devient si forte qu’ils en sont réduits à emprunter pour régler cette charge. Pire, les déficits ne sont pas conjoncturels comme à la fin des années 1970, mais structurels. En d’autres termes, nous empruntons sur les marchés financiers non pas pour créer une richesse, mais pour payer nos fins de mois. Une relance keynésienne pourrait avoir un sens (encore que réutiliser aujourd’hui les recettes des années 1930 me semble assez absurde puisque dans les années 30 les pays occidentaux avaient besoin d’infrastructures) si pour la faire un état empruntait spécifiquement pour elle et sur un temps limité. Aujourd’hui, une relance keynésienne, c’est un peu ajouter une dette à une autre en prétendant que demain sera un jour meilleur. La croissance étant un concept bizarre dont la bonne valeur moyenne à long terme est nulle, ce ne sera pas le cas.

L’auteur est aussi assez malhonnête lorsqu’il prétend que l’étalon-or sautait lorsque la crise était trop forte. C’est vrai, et c’est justement parce qu’il y avait émission massive de monnaie que cet étalon sautait. C’est juste le contraire de sa thèse prétendant que l’émission de monnaie non adossée à des crédit ne provoque pas d’inflation.

16.04.12 @ 11:08
Commentaire de: Le Grincheux

Mais si, les régimes spéciaux sont scandaleux parce que justement, ils font parti d’un contrat spécifique, ce que les bénéficiaires oublient toujours. Il est d’ailleurs assez amusant de constater que ces bénéficiaires sont pour une égalité dans un seul sens (augmentation de leurs salaires sans perte de leurs acquis sociaux).

La meilleure façon de faire est donc de mettre tous les gens au même régime. Ce qui signifie aussi augmenter les traitements des fonctionnaires en fonction des traitements décalés qui ne seraient plus perçus et les faire cotiser aux caisses de retraites classiques.

16.04.12 @ 11:12
Commentaire de: tharibo
tharibo

Je vous cite :

“création monétaire par crédit (ce qui est fait lorsqu’on demande un emprunt à une banque), la monnaie étant effectivement créée lorsque cet emprunt est remboursé”

J’avais compris que la monnaie par crédit était créée instantanément à la signature du crédit, et détruite au fur et à mesure des remboursements justement. On serait donc dans le même cas de dilution de la monnaie, sauf si j’ai mal compris…

La “relance keynésienne", c’est voter un budget contra-cyclique, à savoir augmenter les dépenses de l’état pour soutenir l’économie en période de crise ?
En ce cas, la MMT semble proposer de le faire non pas par crédit, mais par création monétaire directe et sans intérêt. Mais comme vous le dites, si on se sert de cet argent uniquement pour rembourser les crédits, on ne soutient pas du tout l’économie.

Sur le problème des retraites : j’avais vu la vidéo explicative de l’époque sur le système des retraites : il était clairement expliqué à l’époque qu’en cas de déséquilibre entre les travailleurs et les retraités, le système ne s’auto-alimentait plus.
Personnellement, je ne vois pas le problème : je considère les retraites comme un service public, s’il faut consacrer une part plus importante du budget au service des retraites et que la politique menée estime que c’est important, pourquoi pas ? Dans cette optique, les régimes spéciaux n’ont effectivement pas de raison d’être.

16.04.12 @ 19:57
Commentaire de: Le Grincheux

“J’avais compris que la monnaie par crédit était créée instantanément à la signature du crédit, et détruite au fur et à mesure des remboursements justement. On serait donc dans le même cas de dilution de la monnaie, sauf si j’ai mal compris…”

Oui, la monnaie est créée tout de suite, c’est sa valorisation qui attend le remboursement de l’emprunt.

16.04.12 @ 20:07


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