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3615 code ADIEU

29.06.12 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit, Je hais l'informatique

Une page se tourne. Comme un malade en fin de vie, le minitel, à trente ans, va être débranché ce week-end. Je ne suis pas un nostalgique de ce bout de plastique que j'ai reconditionné depuis quelques années en terminal série lorsque mon antique VT100 de feue Digital a rendu l'âme, mais force est de constater qu'il rendait encore de grands services.

Aujourd'hui, la fin du minitel est justifiée par le fait que le réseau internet remplirait tous ses offices. Tous ? Non, certainement pas. Le minitel fonctionnait sur une simple ligne téléphonique. Il faisait donc partie du service universel et tout le monde y avait accès quel que soit son lieu d'habitation, ce qui n'est pas le cas des accès à internet. Les esprits forts me signaleront qu'il est toujours possible d'utiliser un bon vieux modem RTC pour accéder à internet. Théoriquement, c'est vrai. Mais dans la pratique, si j'arrivais il y a quinze ans à accéder à internet avec mon IBM PS/2 P70 muni d'un 80386DX16/80387DX16, d'OS/2 Warp 4,  de 8 Mo de mémoire et un modem RTC à 28,8 kbps, je défis quiconque de faire la même chose aujourd'hui, même avec une machine dopée aux mégahertz et aux mégaoctets tant les pages sont devenues lourdes — animations Flash, video, JavaScript et plein de trucs qui compensent la vacuité de ces pages par des choses qui bougent, il paraît que c'est le web 2.0. Bizarrement, j'ai souvent l'impression que la lourdeur des pages varie inversement proportionnellement à la quantité d'information présente sur ces mêmes pages. Je ne vois pas bien si vous voyez ce que je veux dire…

Et je sais de quoi je parle, je me bats actuellement pour avoir un accès internet au fond de la campagne. Un vrai accès internet, pas uniquement pour utiliser un navigateur, mais un accès internet pour travailler, donc fiable. J'attends aussi que tous les ports soient ouverts, une IP fixe et si possible une plage d'adresses IPv6. Je ne suis pas difficile, j'ai tout envisagé, même le satellite. Il y a peu, le satellite était encore la seule option envisageable, mais le fait que le volume de données mensuel est limité à une valeur ridicule m'a toujours interdit de franchir le pas.

Or, depuis quelques moirs, j'étais confiant. Pour deux raisons. La fibre Limoges-Toulouse passe juste devant chez moi — j'ai vraiment de la chance — et l'entreprise juste de l'autre côté de la colline a fait des mains et des pieds, menaçant même de déménager pour avoir un accès internet juste fonctionnel — j'en ai vraiment de la chance. Le château d'eau au coin de chez moi a donc été muni d'une boîte avec un équipement permettant de relier cette entreprise à la fibre optique et je pensais, certainement naïvement, qu'il me serait possible de me brancher là-dessus moyennant quelques menus travaux de génie civil que j'étais prêt à payer.

J'ai eu la réponse hier, c'est non. Si l'entreprise fournissant le service s'est fait remonter les bretelles pour offrir la fibre à mon voisin, elle ne fera aucune autre exception puisqu'elle a équipé ce fameux château d'eau d'antennes Wifi. Même pas Wimax, Wifi ! Et le seul accès qu'on me propose est un accès de type Wifi, partagé avec tout le monde, et avec une adresse IP publique dynamique partagée en même temps par les autres personnes utilisant l'accès. Je n'ai aucune garantie d'avoir l'ensemble des ports ouverts et surtout aucune garantie de qualité de service. Mais, me dit-on, cet accès ne coûte pas plus cher qu'un accès ADSL urbain. C'est ça, prennez-moi pour une truffe, j'ai l'habitude et je ne dirai rien. Un accès ADSL correct coûte 30 € TTC par mois. Mes accès professionnels me coûtent un peu plus de quarante euros mensuels toutes taxes comprises. Pour un peu plus de quarante euros, parce qu'il faut ajouter au 31 € TTC de l'abonnement Wifi le prix de la location de la parabole et du modem (10 € TTC), je ne peux avoir qu'un accès médiocre ne me garantissant que l'ouverture des ports http, https, ftp et m'obligeant à utiliser un serveur de messagerie électronique géré n'importe comment.

Le seul moyen de m'en sortir est donc d'installer un lien OpenVPN sur un port standard, mais en UDP, entre une machine derrière cette liaison vendue comme fabuleuse et suffisante aux bouseux — parce que c'est bien comme cela qu'il faut le prendre ! — et l'un de mes serveurs à Paris, puis de rebondir sur ce serveur pour accéder au réseau internet sans contrainte.

Le prix d'un accès à 1024 kbps full IP est donc :

  • 41 € TTC pour un accès Wifi ;
  • 41,86 € TTC pour un accès ADSL professionnel dédié au VPN ;
  • 41,86 € TTC pour un accès ADSL professionnel ouvert sur le réseau internet ;
  • un serveur, son onduleur et sa facture d'électricité.

Vous me direz que j'ai déjà les deux derniers accès, le serveur et la facture d'électricité. Certes, mais pour celui qui ne les auraient pas, il lui faut tout de même louer quelque part un serveur dédié pour monter son VPN et pouvoir travailler.

Et ils osent dire qu'internet est accessible à tous de la même manière ! Au moins, le minitel ne faisait pas de telles discriminations !

 

1 commentaire

Ag

Aucun regret pour cette machine avilissante, le minitel. Le minitel a apporté la preuve qu’avec finalement peu de choses, on pouvait mettre plus bas que terre n’importe quelle créature sur laquelle on fondait quelque espoir.

J’avais beaucoup d’espoir en moi. Le minitel m’a démontré que j’avais tort. Il était un prémisse du désastre final que serait l’internet.

Que faisait-on avec un minitel ?

A peine sorti du carton, on tapait 3615 suivi d’un prénom en général réservé aux femmes de mauvaise vie. On discutait en ligne avec un ordinateur ou pire, avec un barbu ou une vieille morue, et on se retrouvait avec des factures qu’aucun grec ne pourrait, actuellement, honorer.

On commandait des milliers de logiciels sur DP Tools, tombés au champ d’honneur et remisés dans un ossuaire tant leur nom semblait bizarre. Wampum, Forth, plein de sharewares à base de Clipper et dBase (que sont-ils devenus ?), des cliparts, des trucs pour faire des reformatages suspects, des outils pour pourrir la vie d’honnêtes gens. On était dans une confiserie sans vitrine : on chapardait tout ce qui présentait.

On découvrait trop tôt l’horrible vérité sur ses collèges de travail. Je me souviens encore des gémissements de ces chers collègues qui me demandaient des cliparts montrant des travailleurs travaillant. Une tête de blonde répondant au téléphone etc. Je commandais alors via le minitel une lourde collection des tant convoités cliparts.

La gueule de lendemain d’élection qu’ils m’ont fait quand, les cliparts fraichement installés, ils se sont rendus compte qu’il s’agissait uniquement de gens de couleur, comme aurait dit notre regretté T. Roland, coiffés façon afro dans le plus pur style de bd underground américaines des 70’s.

Le 3614, plus abordable, était réservé aux choses sans intérêt, du genre chiant, pue-la-sueur avec une vague odeur de dent cariée communiste.

Déjà, les prémisses des futures crises conjugales : le “biiiip” du minitel alertant dans un rayon de 500 m, notre chère moitié qu’on allait faire passer l’argent du ménage de vie à trépas, en utilisant le fameux 3615 Sodomie, de sinistre mémoire.

Son voisin le tueur, le PC pour les pauvres, une marque avec un crocodile si je me souviens bien, ce qui était déjà un signe vaudou qui aurait dû alerter, était en embuscade. Avec Framework, Quattro, dBaseIII+, Spring.

Le plus terrifiant dans tout cela est l’amer constat qu’en définitive, pour de la bureautique de base, du moment qu’on renonce à la vidéo du lolcat ou de la couleur tout aussi chatoyante qui fait prétendûment plaisir aux destinataires de la chose imprimée, eh bien grosso modo, ces vieilles merdes suffiraient encore largement à 99% des entreprises et des particuliers.

Aucun regret donc pour le minitel. Il a certainement plus mis de gens sur la paille et causé de suicides que la crise de 29.

01.07.12 @ 00:10


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