« Le Nao, c'est rigolo ! | Oracle m'a tuer » |
Il serait malhonnête de dire que je soutenais les idées politiques du quotidien Libération, mais je dois dire que ce journal ne récolte aujourd'hui que ce qu'il mérite.
En effet, depuis sa création, il ne suffit pas pour un tel journal, estampillé à gauche, de traiter d'actualité, il faut encore qu'il ne perde pas de vue sa ligne politique. Or ce journal a trahi son lectorat en ayant une vue à court terme et, pensant caresser ce même lectorat dans le sens du poil, a perdu l'essence de sa ligne politique et éditoriale.
Acheter Libération n'est pas aussi neutre que lire le Monde ou le Figaro. Les partis pris des lecteurs sont plus prononcés. Mais cela ne signifie pas qu'il ne faut pas informer ses lecteurs.
Je me souviens qu'au début de la fameuse crise dans laquelle nous sommes toujours et que nous ne sommes pas prêts de quitter, j'avais pris rendez-vous avec le journaliste économique en chef de Libération. Pourquoi Libération ? Pour plusieurs raisons. D'une part, ce n'était pas très loin de chez moi, mais aussi je pensais naïvement qu'un journal marqué à gauche aurait plus de liberté pour informer ses lecteurs de ce qui était en train de se passer et qui allait nous envoyer dans le mur. J'ai eu un entretien de deux heures et j'avais apporté avec moi un certain nombre de documents sur l'asphyxie des entreprises par le secteur bancaire français. Lehman Brothers n'avait pas encore fait faillite et le château de cartes tenait encore à peu près. Il y avait matière à monter un dossier complet sur l'explosion à venir de l'économie française. Au lieu de cela, rien. J'ai juste eu une fin de non recevoir parce que cela n'était pas dans l'air du temps et que cela risquait de ne pas aller dans le sens de la ligne éditoriale du journal en question. Parler des problèmes du financement des entreprises dans un journal ouvertement de gauche sectaire n'était pas souhaitable.
Pourtant, tout en étant de gauche, il n'est pas interdit d'informer. Le Monde offre des tribunes à des gens de droite comme le Figaro le fait pour des gens de gauche. Libération, non. Ce titre est bien trop sectaire pour parler de choses qui pourraient froisser son lectorat.
Libération est ainsi victime de ce que j'appellerais le syndrome de l'Humanité. En effet, les lecteurs attendent moins d'un journal aujourd'hui une ligne politique qu'une source d'information. Mettre sur le papier juste ce que son lectorat attend est le meilleur moyen de se tirer une balle dans le pied parce que ce lectorat s'aperçoit assez rapidement avec tous les nouveaux media que l'information distillé est lacunaire. Acheter ce journal devient donc un acte militant, plus un acte dicté par un désir d'information.
Le seul moyen de sauver Libération est d'en faire un journal d'information, pas une tribune politique qui fournit accessoirement un peu d'actualité. Mais, je ne sais pas pourquoi, ce n'est pas dans l'air du temps. Advienne donc que pourra.