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Je me suis tu durant cette longue période électorale. Non que je n'avais rien à dire. J'observais la déliquescence de notre classe politique, République En Marche comprise.
J'en étais à méditer sur notre mode de scrutin qui, bien plus que nos institutions, est le principal moteur de l'immobilisme dans lequel nous sommes plongés. En effet, si la constitution de la Ve République octroie de nombreux pouvoirs au président de la république — principalement en lui permettant la dissolution de l'assemblée nationale et en écrivant qu'il est le chef des armées —, il n'empêche que le pouvoir réel est dans les mains du premier ministre et de l'assemblée nationale qui, devant le sénat, a le dernier mot. Le fait d'avoir une chambre des députés aux ordres de l'exécutif n'est pas une conséquence de nos institutions, mais une conséquence de la loi électorale et de son scrutin majoritaire uninominal à deux tours et du fonctionnement des partis politiques qui fonctionnent comme des PME propspères. Ce scrutin permet des majorités tranchées, un clivage entre d'une part la majorité gouvernementale et d'autre part une ou des oppositions. La majorité peut donc gouverner en se moquant de l'opposition minoritaire (ou des oppositions) et ne pas faire son travail lorsque le gouvernement pond des lois aberrantes. Pour preuve, les motions de censure n'aboutissent jamais à une défiance du gouvernement donc à son renversement alors que ces motions de censure sont un contre-pouvoir absolu dans les mains de l'assemblée nationale. Pire, même lorsque les oppositions sont majoritaires en nombre de voix, jamais elles ne sont fichues de s'allier pour faire chuter un cabinet. Nous l'avons encore vu récemment où une opposition de gauche a refusé de sanctionner un gouvernement ayant utilisé l'article 49 alinéa 3 de la constitution parce que, justement, le gouvernement était à gauche et que l'autre opposition était de droite. Elle était contre, mais pas assez, en ce sens, cette opposition de gauche faisait partie de facto de la majorité même si elle prétendait le contraire. Là, j'avoue que les bras m'en sont tombés parce que le premier ministre étant le chef de la majorité, on se serait alors repris un gouvernement de gauche, ce qui aurait pu plaire à cette gauche d'opposition. Passons, les députés votent comme leur parti le leur impose et, pour en avoir fréquenté certains, j'en ai rarement vu qui raisonnaient plus loin que le bout de leur nez. J'ai des noms, ne me poussez pas trop.
Ces derniers jours, outre les affaires du Modem et la défense pathético-guignolesque de son président toujours en exercice, une petite controverse est née. Je veux parler du serpent de mer de l'augmentation des vaccins obligatoires, passant de trois à onze.
Dans une remarque liminaire, je dois dire que je ne suis ni pour ni contre la vaccination en général. Je suis à titre personnel vacciné contre à peu près tout ayant travaillé en Afrique Noire. Même contre la rage, c'est-à-dire que si je mords un socialiste dans un éclair de lucidité — je parle de ma lucidité, pas de celle du socialiste, s'il était lucide, il ne pourrait comme le disait si bien Léon Blum être socialiste —, on ne risque pas de m'abattre pour peu que j'aie mon carnet de vaccination sur moi. En revanche, j'ai eu plusieurs réactions terribles à la vaccination de la variole — j'ai un reste de pustule sur l'épaule au point de vaccination —, au BCG parce que ce connard de médecin militaire alors que c'est formellement interdit a cru bon de me faire un test BCG alors que j'ai eu droit à un rappel moins d'un an avant ce test — cela m'a permis d'avoir sur le bras une plaie purulente durant plus d'un an ! J'ai même failli resté sur le carreau après une injection combinée de deux vaccins compatibles entre eux par l'Institut Pasteur : grave tachycardie, 240 pulsations par minutes durant deux heures. Et j'étais alors en bonne santé.
Ceci étant dit, les vaccinations bizarres que j'ai pu avoir ont toutes été sous contrôle médical strict, avec obligation de rester sous observation durant au moins deux heures. Ce qui m'a permis de discuter avec les médecins du service de vaccination de l'Institut Pasteur ou de celui d'Air France. Bizarrement, ces spécialistes de la vaccination ne sont pas toujours des fervents défenseurs de la vaccination à outrance. Bizarrement, aussi, il semble émerger un certain consensus. Tous semblent s'accorder sur le fait que la vaccination est loin d'être anodine et doit s'appréhender en terme de bénéfices et de risques pour l'individu en particulier et pour la population en général.
Pour les maladies entraînant des risques importants ou des complications potentielles, il n'y a pas de débat. Pour les autres, en revanche…
Je ne parlerais pas du vaccin contre la grippe qui a déjà fait montre dans plusieurs études de sa parfaite inefficacité. Les souches mutent trop vite et les vaccins qui ne protègent déjà que moyennement, sont fabriqués en fonction de l'évolution statistique du virus d'une année sur l'autre. Le risque de passer à côté de la signature du virus de l'année est grand.
Parlons simplement du vaccin ROR, rougeole, oreillons, rubéole. Je conçois parfaitement que l'on puisse vacciner des adultes qui n'ont pas eu ces maladies étant enfants car il y a des risques pour leur santé. Mais vacciner a priori les nouveaux nés me semble largement plus discutable. D'après le calendrier vaccinal fourni par notre chère sécurité sociale, il suffirait de deux injections avant l'âge de dix-huit mois pour échapper aux affres de ces maladies. Ce n'est pas ce que pense l'Institut Pasteur qui indique dans son calendrier vaccinal qu'il serait de bon ton de refaire une ou des injections du ROR après l'âge de dix-huit ans. Sans être malheureusement plus précis. Lorsqu'on a eu une fois dans sa vie la rougeole, on est immunisé, totalement. Lorsqu'on a subi la vaccination ROR enfant, il faut se soucier de ne pas oublier le rappel qui, visiblement, n'est pas obligatoire. Pourtant, je pense que les médecins et les chercheurs de l'Institut Pasteur savent un peu plus que notre ministre de quoi il en retourne.
Mais parlons un peu de notre ministre de la santé, Agnès Buzin.
Un lecteur attentif m'a procuré les déclarations publiques d’intérêts de notre nouvelle ministre de la Santé Agnès Buzin lorsqu’elle était présidente du conseil d’administration de l’IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire) [ dpi_agn_s-buzyn.pdf] et de l’INCa (Institut national du cancer) [ agn_s-buzyn-2014-10-10.pdf]. Ces deux déclarations datent de 2012 pour la première et de 2014 pour la seconde. Je dois ici vous faire remarquer que seuls les conflits d'intérêts ayant moins de cinq ans doivent y figurer, ce qui fait que je ne sais rien sur la période précédent 2007, sauf sur ce qu'elle indique explicitement.
Ces documents sont accablants. En effet, elle déclare avoir été directement rémunérée pour un certain nombre d'activités par le laboratoire Genzyme, devenu filiale de Sanofi depuis lors, durant la période courant entre 1988 et 2011. Entre 2005 et 2011, elle était aussi rémunérée par les laboratoires Bristol-Meyers-Squibb et par Novartis. Ces deux derniers laboratoires, associés à Pierre Fabre et Schering-Plough filiale de Merck, ont aussi financé entre 2005 et 2011 l'association RObert Debré que dirigeait alors Agnès Buzyn.
Plusieurs questions me viennent alors à l'esprit. Est-il acceptable qu'un ministre de la santé présente de tels conflits d'intérêt avec autant de laboratoires pharmaceutiques ? Corollaire : comment peut-on imaginer une médecine indépendante des intérêts financiers de ces laboratoires ?
Et, dernière mise en perspective, sachant que le 8 février dernier, le conseil d'état enjoignait le ministère de la santé de rendre disponible les vaccins obligatoires seuls (comprendre sans y adjoindre des vaccins non obligatoires), ce qui fut une défaite importante pour l'industrie pharmaceutique, comment comprendre que, ce 16 juin 2017, le ministre de la santé annonce son intention de rendre obligatoire non plus trois mais onze vaccins pour « prévenir les maladies infantiles » (et permettre de les attraper à l'âge adulte comme l'Institut Pasteur semble s'en inquiéter) alors que de plus en plus de profesionnels de la santé dénoncent leurs effets secondaires neurologiques et musculaires mal mesurés ? Et parfois irréversibles ?