« Cuistrerie à l'état pur | Le Grincheux 1 - URSSAF 0 » |
Si l'actualité est riche en sources de grincherie depuis quelques semaines, il aurait fallu marquer d'une pierre blanche la journée d'hier. Nous avons été particulièrement gâtés.
En effet, entre deux pets de l'esprit, l'édile débile de la capitale plus connue sous le sobriquet de notre drame de Paris vient de déclarer qu'elle interdira la circulation des automobiles thermiques à partir de 2030. Très bien ma grande. Il y a juste quelques menus problèmes à régler d'ici-là dont le rechargement desdits véhicules entre 20h et 6h du matin, donc la construction de deux ou trois barrages hydroélectriques sur la Seine ou l'installation de deux tranches nucléaires aux Buttes-Chaumont que l'on pourrait judicieusement coupler avec le crématorium du Père Lachaise pour faire des économies de gaz voire l'installation d'éoliennes autour de l'hôtel de ville tellement ton équipe et toi êtes habitués à brasser du vent. Sans compter que les parisiens qui ne t'ont rien demandé vont être très content de passer à l'électrique lorsqu'ils auront de longues distances à faire. Je ne parle même pas de l'état des transports en commun qui sont inutilisables dans bon nombre de cas, sales, mal fréquentés et notoirement insuffisants. D'ici 2030, je prends le pari que rien ne changera réellement pour améliorer cet état de fait.
Une autre annonce a fait nettement moins de bruit. Pourtant, elle est né d'un ensemble de cerveaux rémunérés par nos impôts et dernier avatar du travers bien français qu'était l'ancien commissariat au plan. Je veux parler ici de France Stratégie dont le but est de souffler au cabinet du premier ministre les idées les plus bêtes qu'il soit. Rassurez-vous, le centenaire de la révolution d'octobre combiné au cinquantenaire de la mort du Che les ont inspirés. Rassurez-vous encore, vos impôts sont bien employés.
Ces cerveaux, fort préoccupés du niveau intenable à terme de notre dette publique, ont commis un petit rapport dans lequel ils préconisent que l'état puisse décréter unilatéralement qu'il devient copropriétaire de tous les terrains construits résidentiels. Ainsi, l'état deviendrait le bénéficiaire d'une rente pour occupation du domaine public, à savoir des sols, de la part des autres propriétaires privés qui ont pourtant acheté leur terrain en pleine propriété. Ingénieux. Toute ressemblance avec les plus intéressantes pratiques mafieuses serait bien entendu totalement fortuite.
Il est grand temps que le niveau de notre dette publique commence à inquiéter le milieu politique. Fin juin 2017, les derniers chiffres consolidés nous indiquent qu'elle a atteint 2232 millards d'euros, ce qui correspond à 99,2% du PIB selont l'INSEE. Il paraîtrait qu'à l'heure où j'écris ces quelques lignes elle ait dépassé les 100%. Il est plus que temps qu'il faille réfléchir à la manière de réduire ces déficits. Et cela tombe assez bien, les stratège de France Stratégie sont judicieusement payés grâce à nos impôts pour réfléchir pour le premier ministre avec pour mission d'anticiper les politiques publiques de demain. Si vous ne me croyez pas, allez lire leur lettre de mission.
Pour être tout à fait exact, le rapport de France Stratégie ne se préoccupe pas que du cas très spécifique de la France. Comme à son habitude, la France s'érige en donneuse de leçon et a la prétention de répondre à la question de savoir comment assurer la résorption des dettes publiques en zone euro. C'est prétentieux. Certains pays comme l'Allemagne sont en excédent budgétaire. D'autres comme l'Italie sont en excédent brut primaire. Et aucun de ces pays ne compte diluer son excédent dans la vertigineuse dépense publique française.
Mais penchons-nous sur ce rapport. Ses auteurs craignent à juste titre que les disparités des dettes des états membres de la zone euro ne réveillent des oppositions entre ces pays. Cette crainte est attisée par le fait que les efforts budgétaires classiques seront lents à porter leur fruit et que, le niveau d'endettement étant ce qu'il est, il n'est pas inenvisageable qu'un choc économique supplémentaire à court terme ne mette un coup fatal à la zone euro. Les hypothèses étant posées, ils proposent trois pistes pour y remédier.
La première et non la plus aberrante — attendez un peu de voir la suite, vous n'êtes pas venus ici pour rien aujourd'hui ! — est un geste de solidarité entre les états membres. Ce geste de solidarité prendrait la forme d'un swap de taux favorables aux pays très endettés. Il faudra donc expliquer aux pays les plus respectueux de l'argent des contribuables qu'ils doivent être solidaires avec ceux qui n'ont jamais pu ou voulu tenir la dépense publique et payer pour eux. En Allemagne, des dents vont grincer. Mais pas seulement en Allemagne.
La dernière, sans doute la plus loufoque mais n'oublions pas que nous critiqons le jus de crânes de France Stratégie, est un rachat des dettes par la banque centrale européenne qui aura pour mission de les transformer en obligations perpétuelles à taux zéro. Comme de bien entendu, les états s'arrangeront pour que certains organismes soient contraints par la loi de prendre ces titres qui s'éroderont naturellement en cas d'inflation.
Entre les deux, une fulgurance appelée pudiquement, j'ouvre les guillemets avec des pincettes : « l'instauration d'un impôt exceptionnel sur le capital immobilier résidentiel ». Personnellement, j'aurais plutôt tendance à taxer la création de taxes en France. Là, non, le machin propose l'instauration d'un impôt exceptionnel. En terme fiscal, une contribution temporaire ou un impôt exceptionnel devrait provoquer aussitôt l'allumage d'un signal rouge chez tous les contribuables puisqu'on ne compte plus les impôts, contributions et autres vexations fiscales exceptionnelles s'installant tranquillement dans la durée (voir CSG, CRDS et quelques autres).
Pourtant si les première et dernière mesures concernent la zone euro, la saillie intermédiaire ne concerne plus que la France. Le raisonnement des auteurs du rapport est le suivant. Notre dette publique a fortement augmenté et atteint aujourd'hui près de 100% du PIB. Le patrimoine net immobilier des ménages est passé entre le milieu de années 1990 à nos jours de 125% à 255% du PIB (en partie tout de même en raison de la spéculation, mais il ne faut pas évoquer trop fort ce point). Or qu'est-ce qui fait la valeur d'un bien immobilier pour les auteurs de ce rapport ? Je pose la question ? D'après les auteurs du rapport, la moitié de cette valeur est celle du terrain sur lequel il est construit. Allons un peu plus loin, d'où le terrain tire-t-il sa valeur ? De son emplacement plus ou moins proche d'infrastructures et de services publiques.
Je cite donc la page 8 du rapport détaillé :
Pour un propriétaire, la part de la valeur du terrain dans le prix de son bien immobilier dépend crucialement de l’endroit où il est situé (région, commune, quartier), et en particulier de la nature des services et infrastructures publics se trouvant à proximité.
C'est assez pervers. Sans doute ne vous en doutiez vous pas, mais si votre bien immobilier possède une certaine valeur, ce n'est pas en raison d'une quelconque valeur intrinsèque, c'est grâce à la merveilleuse qualité des services publics à proximité et que, je vous le rappelle, vous payez déjà par vos impôts. Il ne faudrait pas oublier ce léger détail de l'équation. Ainsi, il est naturel que l'état cherche à récupérer son bien en se proclamant soudain propriétaire d'une partie de ce bien permettant de récupérer au passage un loyer sous la forme d'une rente ou d'une taxe (qui préexiste déjà puisqu'il s'agit de la taxe foncière, ne l'oublions pas non plus) pour l'occupation par un particulier d'une quote-part de son terrain.
Pour les auteurs de ce rapport, il ne s'agirait que d'un simple rééquilibrage comptable du bilan patrimonial de l'état (page 9). Tu m'en diras tant.
Cette expropriation — parce qu'il faut pout de même veiller à appeler un chat un chat — toucherait autant les grandes fortunes que les classes populaires qui ont économisé sou après sou pour avoir un toit pour la retraite. Ainsi, prévoyant que l'opposition sera forte, ceci se ferait dans la plus totale liberté. Un propriétaire pourrait refuser de payer sa cotisation annuelle pour occupation du domaine public, l'ensemble des cotisations serait prélevé dès la première transaction intervenant sur le bien, qu'il s'agisse d'une vente ou d'une transmission. Le rapport, en revanche, n'indique pas la proportion que l'état s'approprierait mais évoque pour l'Italie un taux de 25% de tous les terrains résidentiels. En d'autres termes, l'état se constiturait gratuitement sur le dos des heureux propriétaires un patrimoine foncier permettant d'apporter un genre de garantie hypothécaire à une bonne partie de sa dette tout en lui assurant des revenus supplémentaires.
À ce moment du raisonnement, il faut se demander ce qu'il se passera le jour où cette garantie hypothécaire devra fonctionner, point de détail oublié dans le rapport.
La dernière justification de la mesure, justification oiseuse s'il en est est que ce système ne constitue pas une réelle hausse fiscale puisque la valeur des biens des particuliers diminuant par amputation forcée, les impôts fonciers traditionnels baisseraient aussi. D'une part je ne vois pas ce qui empêcherait l'état d'augmenter les taux sur le foncier et, d'autre part, je suis en droit de demander alors pourquoi créer une telle usine à gaz. D'autant qu'en terme de fiscalité temporaire et festive (dixit Sapin), nous avons déjà le tristement célèbre exemple de la CSG. Mais au moins, les auteurs de ce rapport n'ont pas l'outrecuidance de nous assomer avec la fable de l'impôt citoyen que tout le monde adore payer car il y a très longtemps qu'en France nous avons dépassé le stade où l'impôt sert à payer les activité régaliennes de l'état, activités qu'il a d'ailleurs le plus grand mal à payer malgré des impôts toujours plus lourds et des dépenses plus grandes.
Bien au contraire, au travers de ce rapport, France Stratégie nous montre s'il était besoin que l'impôt est, en France, une véritable spoliation forcée qui aliène voire annihile le droit de propriété et dont le seul objectif est de boucher les dérives d'un état dépensier au-delà de toute raison.
Une saine gestion consisterait dans un premier temps à réduire les dépenses, véritablement, puis dans un second temps les impôts. Ce n'est envisagé ni dans ce rapport qui n'est qu'une idée parmi bien d'autres idées de taxes nouvelles, ni dans le budget 2018 du gouvernement qui est pour sa part une réalité et qui pénalise déjà l’immobilier à travers sa « rénovation » de l’ISF limité à la fortune immobilière.
Vous me direz qu'aujourd'hui, les opinions exprimées dans ce rapport n'engagent que leurs auteurs et n'ont pas vocation à refléter la position du gouvernement. Certes. Mais cela fait un rapport de plus à archiver, rapport contenant une idée fumeuse qui pourrait bien être appliqué un jour. Se posent alors deux questions. La première est de savoir, si ce rapport est archivé quelque part sans suite, à quoi sert le machin France Stratégie tout de même payé avec l'argent du contribuable. Plus généralement, il faudrait se poser la question de savoir à quoi servent les organes fumeux et autres comités Théodule attachés à nos (grands) frais au premier ministre. La seconde question, si ce rapport est un jour appliqué, est de savoir s'il ne faut pas redouter une gestion encore plus calamiteuse des deniers publics, ceux-ci étant garantis par la spoliation des propriétés privées.
Je pose donc la question : si l'on appelle esclavage un système dans lequel un état prélève 100% du travail de sa population, comment appelle-t-on un état qui prélève 57% plus la moitié des propriétés bâties de sa population ? En tout état de cause, il est grand temps de quitter, pour ceux qui le peuvent, ce pays crypto-communiste pourri jusqu'à la moelle. Dans quelques années, il n'y restera plus que les pauvres et quelques représentants de la classe moyenne qui, pour une raison ou pour une autre, n'ont pu s'expatrier.