« Avoir la poisse, c'est un art ! | Évolution » |
Je ne voulais pas réagir sur le sujet, le bruit étant largement supérieur au signal sur ce sujet. Mais la communication lamentable du gouvernement ainsi que l'attitude des français — toute aussi lamentable — m'incite à rajouter mon grain de sable dans la gueule du débat.
Refaisons un bref historique de la situation. Lors de la seconde quinzaine de décembre 2019, un nouveau virus pathogène apparaît dans une sombre province chinoise. Ce virus provoque dans un nombre de cas non négligeable des pneumonies atypiques. Un médecin chinois tire la sonnette d'alarme. Rien n'y fait, tout continue presque comme avant. Au bout de quatre semaines, le gouvernement chinois comprend ce qu'il se passe et confine des régions entières. D'autres pays asiatiques touchés mettent les moyens pour éviter une propagation rapide (quitte à utiliser d'autres techniques que le confinement comme Taiwan ou la Corée du Sud).
Pendant ce temps, que faisons-nous ? Nous blablatons. Agnès Buzyn, ce monument inoxydable de la médecine, nous indique que le risque que l'épidémie arrive sur le sol français était infime. Tout cela juste avant de démissionner pour aller voir si la campagne des élections municipales de Paris pourrait lui être profitable. Nous envoyons des militaires récupérer les français travaillant dans les zones à risque alors qu'il aurait fallu les mettre en quarantaine sur leur lieu de travail avant de les rapatrier pour éviter une propagation du virus. Résultat, un premier foyer d'infection a brusquement surgit autour de la base aérienne qui a participé à l'opération.
Mais ce n'est pas tout. La France a aussi envoyé 17 tonnes de matériel (masques, gels et autres) à la Chine. Je vous rappelle que ces masques sont fabriqués en Chine et que la Chine peut tout à fait et contrairement à nous subvenir à ses propres besoins. La Chine a refusé le cadeau qu'elle aurait renvoyé en Italie. De toute façon, quel que soit l'endroit où ce matériel se trouve actuellement, il n'est plus en France et fait défaut.
Parallèlement à cela, le nouveau ministre de la santé nous a signalé que ce n'était qu'une petite grippe durant des semaines, que seules les personnes à risque, donc d'un âge certain, avaient des complications. Durant ces mêmes semaines, les épidémiologistes tiraient la sonnette d'alarme car il n'y avait aucune raison que la progression de l'épidémie soit différente en France que dans les autres pays touchés au préalable. Chez nous, c'était juste une petite grippe, chez les autres, il y avait des restrictions de circulation, des contrôles aux frontières et dans les aéroports. Chez nos voisins suisses, l'âge médian de mortalité était pourtant de 47 ans. On a commencé à avoir des doutes lorsque des trentenaires sans antécédents sont décédés dans le sud de la France en raison d'une interaction avec des corticoïdes.
Et nous sommes arrivés à la situation surréaliste où les italiens pouvaient librement rentrer en France en provenance de zones contaminées alors que les français ne pouvaient pas entrer en Italie (frontières terrestres ou aéroports). Il y a quelques jours, certains pays africains (Maroc, Madagascar) ont même annulé tous les vols à destination ou en provenance de la France, signifiant par là qu'ils jugeaient la situation sanitaire en France plus mauvaise que chez eux.
Mais ce n'était pas grave. Nous avons maintenu les élections municipales. Mais en fermant au préalable les bistrots.
Les scientifiques, les vrais, continuaient à alerter en criant dans le désert. Dans l'est de la France, depuis le 11 mars, les services d'urgence sont surchargés et les patients sont triés en fonction de leurs âges. L'armée n'a pas été sollicitée pour installer des hôpitaux de campagne et les patients sont ventilés entre Besançon et Nancy.
Pire, le français a montré qu'il était un imbécile. On ferme un stade, les supporters du Paris-Saint-Germain font la fête juste à l'extérieur du stade, sans doute en vertu d'un certain darwinisme. On annonce la fermeture des bistrots, le français s'est rué dans les bars et autres cafés samedi dernier parce qu'il savait qu'il en serait privé durant quelques semaines (je rappelle qu'en Italie ou en Espagne, les villes étaient déclarées villes mortes). On lui dit de rester chez lui, il va s'exposer dans les jardins publics et autres squares. Et c'est le même qui va gueuler lorsque l'un de ses proches sera sacrifié parce qu'il n'y aura plus de lit d'urgence dans les hôpitaux. J'ai coutume de dire que l'Italie ne sert qu'à faire croire que la France est organisée, là, pourtant, même l'Italie fait mieux que nous.
Et c'est sans compter non plus avec la soviétisation de la médecine. La gestion étatique de l'hôpital fait que nous avons aujourd'hui entre deux et trois fois moins de lits d'urgence pour mille habitant que tous les pays comparables. C'est sans compter avec les élucubrations du phare français de l'économie qu'est Bruno Le Maire qui impose un prix au gel hydro-alcoolique sans ce soucier que le prix imposé est inférieur au prix de revient (fabrication, stockage et distribution) du produit et que les industriels, capables de produire à marge nulle, ne vont pas produire pour perdre de l'argent. La pénurie de soignants, de matériel et de consommable se fait cruellement sentir.
Là encore, le gouvernement n'a pu anticiper alors que la progression de l'épidémie suit exactement avec quelques semaines de retard ce qu'il s'est passé dans tous les pays comparables. Pire, l'augmentation des cas est même supérieure en France.
La situation empirant logiquement, nous avons eu le droit hier soir, à un discours délirant de notre président de la république adoré. Je passe sous silence les contradictions comme le fait de se confiner chez soi en ayant des interactions sociales avec ses voisins, je ne vais m'attacher qu'au fond. De confinement de la population, il ne fut pas question. Même le mot n'a jamais été utilisé. Il n'y a par ailleurs aucune obligation parce que pour circuler, il suffira d'une déclaration sur l'honneur sur le Cerfa idoine. On croit rêver !
Une fois de plus, c'est trop peu et trop tard.
Une telle crise sanitaire qui aurait pu être jugulée avec un mois de traitement de choc va perdurer plusieurs semaines, vraisemblablement plusieurs mois, parce que la classe politique (majorité comme opposition) est en-dessous de tout. Elle va se chiffrer en centaines de milliards d'euros d'argent public, donc d'argent du contribuable. Et tout cela dans le pays le plus taxé au monde. Forcément, ça va bien finir.
À partir de midi, les déplacements seront enfin entravés. Légèrement. Enfin. Pour une quinzaine de jours. Prévoyez néanmoins au moins le double, plus raisonnablement six semaines.
Si j'en ai le temps, je vais tenir un journal.
27 avril 2020, confinement, jour 43.
Cher journal. Je t'appelle cher journal parce que je n'ai plus personne avec qui discuter. Le dernier coup de vent a fait définitivement tomber un poteau de la ligne téléphonique qui avait déjà été endommagé par un ivrogne il y a quelques mois et même le téléphone est aujourd'hui silencieux. L'isolement devient difficile à supporter. Je commence à délirer en parlant tout seul. J'ai même cru que le chat m'avait insulté alors que je l'ai mangé lundi.
Dehors, la nature a repris ses droits. Les hautes herbes et les corbeaux ont fait leur œuvre, on ne voit plus le corps du facteur dans l'allée mais l'odeur est insoutenable et ça attire des mouches.