« L'indigence de l'électronicien professionnel | Les pépins d'Orange » |
J'ai commandé un certain nombre de composants électroniques pour peupler des circuits d'assez grandes dimensions (740 mm * 500 mm) qui m'ont été livrés hier par DHL. Petit problème, cette livraison de composants devait être faite par UPS qui fonctionne encore en équipes réduites malgré les tournées bien plus nombreuses à faire. Comme il faut toujours être aimable avec les livreurs et que je n'ai pas grand'chose à reprocher à UPS, j'ai accepté de récupérer le colis au bureau de tabac à quelques kilomètres de chez moi pour soulager mon livreur habituel.
Je remplis donc une attestation de déplacement dérogatoire et j'en profite pour sortir faire quelques courses. Le but de ma sortie était simple : dans l'ordre aller récupérer ce colis, faire un tour au supermarché du coin puis chercher un peu plus loin un chronopost qui n'est plus livré à domicile. Les deux premières étapes se passent sans aucun problème. Je récupère aussi le chronopost dans le bourg voisin, mais au départ du parking, je tombe sur une patrouille volante de la gendarmerie. J'avais mon attestation de déplacement, je pensais avoir la paix. Erreur.
Devant moi, un petit jeune roulait dans une voiture immatriculée 85 (Vendée pour ceux qui ne connaîtraient pas la liste des départements français avec les préfectures et les sous-préfectures) dans l'ancien système. Pas une voiture récente, donc. Et cet automobiliste qui présente pourtant un document ressemblant à une attestation se fait traiter plus bas que terre et termine sur le côté avec un amende bien sentie. J'observe la scène en me disant que si les pandores réagissaient comme cela dans les cités sensibles de la préfecture du coin, les pavés doivent voler assez vite. Arrive mon tour.
À ce point du récit, il faut que je vous signale que la 2CV (immatriculée en Haute-Savoie pour des histoires de dimensions de plaques minéralogiques) est toujours chez le garagiste — si vous avez suivi mes aventures, une bougie a décidé de vivre sa vie en cassant le filetage de la culasse — et que je roule actuellement dans une XM immatriculée dans le département de la Seine. Une voiture 75 au fond de la campagne, encore un salopard de parisien qui est venu se mettre au vert ! Cette XM a un problème depuis son retour du contrôle technique, le chauffage est bloqué sur chaud. Je roule donc avec les fenêtres ouvertes. Cela a son importance pour la suite du récit.
Je me fais donc arrêter par un gendarme pas réellement aimable. Je prépare mon attestation et la présente par la fenêtre ouverte, ce qui me semblait le plus naturel. Il commence par me hurler dessus, parce que le règlement indique que je dois lui montrer l'attestation au travers du pare-brise et surtout pas par la fenêtre ouverte et que je dois être confiné dans mon département. Je lui réponds qu'il me doit d'abord le salut réglementaire et, qu'ensuite, éventuellement, nous discuterons. J'obtiens un salut tout juste réglementaire, mais j'en obtiens un.
Il regarde l'attestation et m'indique qu'il verbalisera. Je coupe le moteur et lui demande en quoi mon attestation est mal remplie, parce que si elle est mal remplie, il faudra qu'il m'indique sur son procès-verbal en quoi elle serait mal remplie. Selon lui, il paraîtrait que je n'ai pas le droit d'être confiné dans ce département parce que mon véhicule est immatriculé dans la Seine. Il n'y a pas à dire, le képi est un sale truc qui empêche le cerveau de fonctionner et la discussion promettait donc d'être fort passionnante.
Derrière moi, les véhicules s'agglutinaient déjà. Il faut dire que je bloquait la place principale du village. Je demande donc à ce pandore borné la référence de la loi, du décret ou de n'importe quelle circulaire indiquant qu'il était interdit d'être confiné ailleurs que dans le département d'immatriculation de son véhicule, accessoirement le texte qui contraignait un véhicule à avoir une immatriculation dans le département de garage habituel (dans l'ancien système d'immatriculation, il suffisait d'une résidence dans le département d'immatriculation, dans le nouveau, cette condition n'existe même plus). Pas de réponse sauf un rangez-vous sur le côté. Ah non, mon gars, on va régler le différend ici, je ne bougerai pas. Et comme ça ne te plaît pas, que tu as le grade de gendarme, que l'autre motard est un adjudant, va me chercher ton supérieur qui verbalise le pauvre type roulant dans une voiture vendéenne. Il s'exécute en maugréant et le chef arrive. À peine moins borné puisqu'il couvre son subalterne et qu'il m'indique que je dois être confiné dans mon lieu de résidence et que pour prouver que je réside ici, il me faut une attestation de résidence.
Tu ne me prendrais pas par hasard pour un imbécile ? Donne-moi la référence d'un texte quelconque indiquant qu'il faut adosser à ta fichue attestation de déplacement une attestation de domicile. Par ailleurs, tu ne m'as pas demandé de pièce d'identité, tu ne sais même pas où j'habite. Tout ce que tu as vu, c'est un véhicule immatriculé à Paris, c'est un peu court. Et je dois te dire, tout adjudant de la gendarmerie que tu es que j'ai appris un seul truc à l'armée, le jeu du plus con et que j'y excelle parce que j'ai beaucoup d'endurance. Tu veux me coller une amende alors que mon attestation est bien remplie et que j'ai un colis dans le coffre qui indique clairement que je réside dans un village à quelques kilomètres et que j'y ai une activité professionnelle ? Parfait, mais je n'en resterai pas là. Maintenant, mon cher, tu prends tes responsabilités, je prendrai les miennes.
La conversation a pris une demi-heure. Durant une demi-heure, j'étais au milieu de la chaussée et j'entravais la circulation.
https://saintyrieixlaperche.wordpress.com/2020/05/02/nous-sommes-des-faussaires-de-lattestation-de-deplacement-derogat
Bonjour Grincheux,
Rien de neuf dans le domaine de la connerie…
Mais juste pour ma culture, pouvez-vous m’expliquer pourquoi des histoires de dimensions de plaques minéralogiques imposent à la 2CV d’être immatriculée en Haute-Savoie ?
Je n’ai jamais eu de problème de plaque avec mes 2CV…
Merci, et bonne journée
Jusqu’au début des années 1980 (la 205 Peugeot a exactement le même problème et c’est loin d’être la seule voiture), les plaques d’immatriculation n’avaient pas les mêmes dimensions à l’avant et à l’arrière. Pas une grande différence, quelques millimètres. Or le nouveau système d’immatriculation impose des dimensions identiques à l’avant et à l’arrière. Les plaques avant aux anciennes dimensions sont interdites même à l’avant pour des véhicules qui ne peuvent en mettre des plus grandes.
Il faut donc soit utiliser des plaques de dimensions standard, qui dépassent du capot à gauche et à droite (ou de la cavité du pare-choc dans le cas de la 205), soit trouver un garagiste acceptant de frapper une plaque acier (il faut la plier) aux anciennes dimensions, mais à fond blanc si le véhicule n’est pas en collection. Sur la DS, personne ne m’a jamais verbalisé pour avoir des plaques noires alors qu’elle est en carte grise normale, mais pour une 2CV toute bête, j’ai hésité. Bref, il faut à l’avant une plaque plus petite. Comme les tailles des caractères ainsi que la police sont aussi imposées, il n’y a plus la place pour le numéro du département (le F est conservé parce obligatoire comme plaque de l’Union Européenne). À l’arrière les dimensions sont les dimensions standard.
Le seul garagiste que j’ai trouvé pour faire cela était en Haute-Savoie, j’ai donc une plaque 74.
Pour information :
- il est interdit de coller un sticker sur la plaque en changeant de département (c’est toléré pour un logo officiel de département). Le masquer ou le remplacer par un logo non officiel est interdit et verbalisable. Il faut que le sticker soit de coefficient réflecteur identique à la plaque (quasiment impossible) ;
- il est interdit d’utiliser des plaques noires sauf à avoir un véhicule de collection (catégorie floue, j’ai bien écrit véhicule de collection, pas véhicule en carte grise collection) ;
- les plaques doivent avoir les mêmes couleurs à l’avant et à l’arrière. Exit donc les plaques anciennes blanche devant et jaune derrière. Elles sont de dimensions normalisées identiques et portent un numéro d’homologation qu’il est interdit de masquer ;
- les phares blancs ne sont que tolérés, la couleur officielle en France est le jaune (et est bien plus efficace la nuit surtout par temps humide) ;
- il est normalement interdit depuis le 1er janvier de cette année de rouler avec un véhicule immatriculé dans l’ancien système d’immatriculation. Sauf qu’il est dans les faits impossible de passer dans le nouveau un véhicule immatriculé dans l’ancien système, il n’existe pas aux dernières nouvelles de Cerfa pour cela (dixit la préfecture la dernière fois que je le suis renseigné, c’est-à-dire à l’automne dernier) !
Ouahhhh ! Merci pour cette explication. Bon, on est bien en idiocratie française… J’avais bien remarqué que les anciennes plaques étaient plus petites à l’avant, mais je ne savais pas que la loi imposait maintenant toutes ces contraintes. La plus absurde étant sans nul doute l’obligation d’avoir un indicatif départemental sur un système national !
Si ce n’était pas con, ce ne serait pas un règlement (proverbe militaire).
Tenez, je viens de tomber sur cela :
https://www.lefigaro.fr/automobile/immatriculation-les-anciennes-plaques-ne-seront-pas-supprimees-20200102
L’administration n’ayant pas réussi à pondre un Cerfa ou une procédure quelconque permettant de passer dans le nouveau système d’immatriculation, il est donc possible de rester avec les anciennes plaques minéralogiques. Ma DS23ie et mon Type 2350 remercient l’inaction sclérosante de l’administration française.
Aucun des deux pandores ne m’a demandé mes papiers, ni les papiers du véhicule. Donc de prune il n’y aura pas.
De toute façon, la seule chose qu’ils auraient pu me reprocher, c’est une entrave à la circulation puisque j’étais au milieu de la chaussée.