« Le tirage au sort confirmé comme imposture démocratique | L'indigence de l'électronicien professionnel » |
Cela devait arriver. Ce matin, j'ai appris qu'un cafetier parisien venait d'assigner la compagnie d'assurance AXA pour obtenir que sa fermeture résultant de la crise sanitaire actuelle soit indemnisée par son assurance perte d'exploitation.
Nul doute qu'il se trouvera un juge quelque part pour accéder à sa demande. Je connais assez bien cette engeance, ils ne sont pas là pour faire respecter le droit, ils s'érigent la plupart du temps en redresseurs de torts (supposés) et se fichent comment une guigne des effets de bord de leurs petites décisions.
Or regardons ce qu'est une prime d'assurance. Une prime se compose d'une partie de taxes, puis d'abondement à des fonds divers obligatoires — comprendre de sommes d'argent qui tombent dans le puits sans fond de notre état obèse — et, enfin, permet à la compagnie d'assurance de supporter le risque pour vous. Hors appétit de l'état, une prime est calculée en fonction des risques couverts et de la probabilité de réalisation de ces risques. Elle n'est pas calculée au doigt mouillé, il y a toute une caste de gens appelés actuaires qui s'y collent pour que la compagnie d'assurance puisse vivre, c'est-à-dire en générant assez de cash flow pour que les sinistres puissent être couverts avec une grande probabilité. Si un contrat perte d'exploitation n'a pas prévu explicitement le cas d'une crise sanitaire, le risque n'a pas été pris en compte dans le calcul de la prime. C'est aussi simple que cela.
Le fait qu'une décision probable contraignant une compagnie à couvrir un risque non prévu dans un contrat d'assurance aura plusieurs effets :
Loin de moi l'idée de prétendre que les compagnies d'assurance sont des philanthropes. Comme toutes entreprises, elles sont là pour gagner de l'argent, soit pour elles-mêmes (cas des assurances mutuelles), soit pour leurs actionnaires. Si elles existent toujours, c'est parce que leurs gestions sont à peu près saines et que le droit contractuel a encore une certaine valeur dans ce pays. Casser la confiance dans un contrat reviendra à bouleverser le rapport entre les souscripteurs d'un contrat, dans le cas des assurances, mécaniquement, à augmenter les prix puisqu'ils faudra qu'elles tiennent compte dans leurs calculs d'un risque supplémentaire, le risque juridique.
Well done, old chap !
En général les assurances notifient les exlusions à leur “garanties".
Si la crise sanitaire n’est pas expressément exclue, il n’y a pas de raison pour ne pas payer la perte d’exploitation.
Il y a en fait deux types de contrats. Ceux qui ne couvrent explicitement que certains risques et ceux qui couvrent tout à l’exclusion de certains risques.
Ici, le débat est tout autre. Lorsque le souscripteur du contrat et la compagnie d’assurance se mettaient d’accord pour couvrir un risque concernant une fermeture administrative, les deux s’entendaient sur une fermeture administrative consécutive à un manquement de l’assuré, limitée à celui-ci, et non d’une fermeture administrative sur l’ensemble d’un pays. Le fait que l’assuré plaide de toute mauvaise foi que le risque est couvert revient à changer les termes du contrat qu’il a lui même signé. Le souscripteur l’a lui-même reconnu. Il ne fait qu’entrer dans une faille (et encore) de la rédaction d’un contrat lui permettant d’en changer les termes.
C’est aussi en toute mauvaise foi que le magistrat fait la même lecture du contrat. Mais peut-on attendre plus d’un magistrat que des petits-fils de Charlemagne ?