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D'après Jacques Servier, fondateur du laboratoire du même nom, le Médiator n'aurait fait que quelques morts durant sa carrière. D'après le ministre de la santé, le décompte correct serait de plusieurs milliers de victimes et de nombreuses victimes potentielles encore non diagnostiquées.
L'attitude de Jacques Servier est inadmissible, mais celle du ministre de la santé, Xavier Bertrand, l'est encore plus. En effet, Jacques Servier joue son rôle qui est de défendre corps et bien son entreprise. Celle du ministre de la santé est de prendre soin de la population française. La question n'est donc pas de savoir combien de victimes a pu faire ce médicament, mais pourquoi celui-ci était-il encore en vente et remboursé par la sécurité sociale alors même que son efficacité thérapeutique était quasi nulle contre le diabète — le Médiator était, rappelons-le, un anti-diabétique — et qu'il était toujours prescrit comme coupe-faim.
Depuis plus de dix ans alors que l'immense majorité des pays l'ont progressivement interdit, tous les ministres, de gauche comme de droite, ont refusé d'interdire ou juste de retirer le Médiator des listes des médicaments remboursés alors qu'il existait déjà de sérieux doutes sur l'innocuité de son principe actif. Un ministre est même allé contre l'avis de la Haute Autorité de la Santé qui préconisait dans une note du 12 avril 2006 le retrait de ce médicament. Dans une « note » remise aux quarante experts de cette commission, les dangers pour la santé du Mediator (mentionné sous son nom de molécule, le benfluorex) sont pourtant décrits noir sur blanc :
Le benfluorex est un dérivé de la fenfluramine (ex-Ponderal) et de la dexfenfluramine (ex-Isoméride), deux anorexigènes amphétaminiques retirés du marché du fait d’effets secondaires graves : hypertension artérielle pulmonaire et valvulopathies. En Espagne, la survenue sous benfluorex de troubles cardiaques graves est à l’origine du retrait du marché des spécialités pharmaceutiques contenant du benfluorex en mars 2003.
La question est donc de savoir si le cabinet du ministre, à l'époque déjà Xavier Bertrand, était au courant de cette note. Il n'y a aucune raison de douter qu'une telle note n'ait pas terminé sur le bureau d'un conseiller du ministre. Si ce n'était pas le cas, nous serions en mesure de nous demander légitimement à quoi pouvait bien servir cette Haute Autorité du Médicament.
Cette note ayant été enterrée puisque suivie d'aucun effet, il faut bien constater que le lobby du médicament est vraiment puissant.