« Mais que fait la HALDE ? | La guerre des talents n'aura pas lieu » |
Hier soir se tenait une émission de télévision suivie d'un débat sur la finance qui nous a envoyé dans le mur, sur la crise jugulée de 2007 et l'étincelle de 2008, la faillite de Lehman qui a été orchestrée pour des raisons politiques. En dehors d'une conclusion un peu bâclée, les propos tenus dans l'emission étaient intéressants.
En revanche, le débat était pour le moins biaisé. Étaient invités par David Pujadas un syndicaliste de Continental, Érik Orsenna, l'économiste Daniel Cohen, la trésorière d'un syndicat lycéen dont on se demande ce qu'elle venait faire ici et Alain Madelin, ancien homme politique et nouveau financier. Ce dernier n'a pas résisté à nous asséner quelques petites phrases entre deux gribouillages sur son bloc-note montrant à quel point il s'ennuyait. Il a même réussi à nous dire que la nouvelle économie, c'était le plein emploi, mais pas pour tous (sic).
J'avoue avoir beaucoup de mal à comprendre le raisonnement. D'une part, cela fait des années que les financiers brassent du vent à tel point que Monsieur Madelin devrait réfléchir à une séquence du reportage où un patron de PME signalait que son entreprise avait été valorisée par des banques financières à un milliard de francs alors que son chiffre d'affaire mensuel était de trente mille francs, soit moins que celui d'une pizzeria. La finance étant totalement décorrélée de l'économie, cela ne pouvait qu'exploser tôt ou tard, car la finance ne créant que la finance et non non l'emploi, l'édifice ne pouvait que tomber dès que quelqu'un serait contraint à payer. Les subprimes ont créé cette condition, mais si cela n'avait pas été les subprimes, une autre combinaison aurait créé l'étincelle. D'autre part, je n'arrive pas à comprendre la notion du plein emploi mais pas pour tous. Remarquez, j'ai déjà du mal avec la définition du plein emploi qui signifie que le taux de chômage est inférieur à 5%.
Je me suis pourtant accroché. Si j'ai bien saisi le raisonnement de Madelin, il est normal que la finance crée des bulles spéculatives qui explosent régulièrement et qu'il faut corriger cela par la croissance. Là, je bloque parce que justement, c'est cette croissance qui pose problème. Lorsqu'on regarde les choses en face, cette croissance, même en Europe, est différente d'un pays à l'autre, ce qui provoque des inégalités et provoque un certain nombre de délocalisations. Un tel système ne peut tenir que si la sacro-sainte croissance est la même dans tous les coins du monde et que le niveau de vie initial est identique, ce qui est parfaitement utopique. Quant à comparer comme il l'a fait la situation des années 50 et 60 à l'état actuel de l'économie, ce n'est qu'une aberration. Effectivement, la croissance était à 10%, mais l'inflation était aussi importante. Et je n'ai pas souvenir qu'il y ait eu de crise financière lors de cette période. Il n'y a pas eu de crise financière parce qu'on avait appris de la crise de 1929 et appliqué un certain nombre de règles qui ont toutes été abolies depuis. La finance s'est donc suffi à elle-même, n'ayant plus à s'appuyer sur l'économie.
Le problème actuel est que la finance n'a rien appris de la faillite de Lehman. Pire, les gouvernements ayant été contraints à son sauvetage, elle se permet aujourd'hui des opérations qu'elle n'aurait même pas espéré dans ses rêves les plus fous d'avant la crise. Et que fait-on ? Rien. Les gouvernements attendent, espérant que le système se régulera tout seul. Le secteur de la finance recrute à nouveau et à tour de bras depuis deux ou trois mois des ingénieurs spécialisés en logiciels et mathématiques financières. Les profits financiers sont à nouveaux exorbitants et les entreprises, surtout les PME, sont prises à la gorge, incapables de se financer. Elles n'ont plus qu'une solution, se mettre en veille ou aller chercher des investisseurs qui n'attendent qu'un retour sur investissement conséquent à horizon de moins de cinq ans, créant une cavalerie qui risque fort de voir disparaître un bon nombre d'emplois dans les prochaines années et de créer une nouvelle crise financière. Le cycle que l'on appellera le cycle Madelin se reproduira quasiment à l'identique.
Nous n'avons pas besoin de cela et il est grand temps d'agir et de réguler ce secteur financier devenu fou. Si nous ne faisons rien aujourd'hui, la crise est encore devant nous.