« Mais que fait l'administration ? | Du métier pénible de manifestant (et des manifestations) » |
Au-dessus d'un certain prix, on paie une marque. En revanche, en-dessous d'un certain prix, il faut bien reconnaître qu'on n'en a que pour son argent. J'ai peine à croire qu'on puisse concevoir ou prétendre le contraire.
Je ne dis pas ça parce que je suis fâché, simplement parce que j'en ai assez qu'on me dise qu'un certain nombre de choses sont gratuites : voix sur IP, hébergement informatique, logiciel et j'en passe. Toutes ces choses ont un coût, payé par l'utilisateur final directement ou indirectement.
Lorsque j'utilise un logiciel libre développé par un tiers, j'ai payé d'une manière ou d'une autre ce logiciel. Je peux le payer directement en espèces sonnantes et trébuchantes ou indirectement, soit parce que j'ai acheté un produit développé grâce à ce logiciel, soit parce que le coût de ce logiciel est porté par toute une société aux travers d'impôts et de subventions diverses. De la même manière, lorsque je donne au monde entier un logiciel libre, je ne le fais pas par bonté d'âme, mais parce que ce n'est pas le but ultime de mon travail. Je développe un logiciel parce qu'il m'est utile et non comme une fin en soi (voir pour cela le RPL/2 ou FreeVMS). L'argent que je gagne est donc produit par ce que je fais de ces logiciels et non par les logiciel eux-mêmes. Je n'ai pas l'impression d'être le seul à me comporter de la sorte puisque derrière la plupart des grands projets de logiciels libres se trouvent presque toujours une ou plusieurs entreprises d'envergure internationale.
Le problème est que l'immense majorité des utilisateurs est convaincue que ces outils n'ayant souvent aucun coût sont gratuits et étendent ce raisonnement faux au reste des prestations informatiques. Combien de fois n'ai-je pas entendu :
et j'en passe… Mais bougres d'imbéciles, comment croyez-vous que votre fournisseur d'accès internet rémunère l'entretien du réseau de cuivre si ce n'est en payant un abonnement à France Telecom ? Comment croyez-vous que vous pouvez utiliser l'espèce de système d'exploitation que prétend être Windows sur votre ordinateur si vous n'aviez pas payé Microsoft pour obtenir une licence d'utilisation que la plupart du temps vous n'avez pas lue ? Parce que si vous l'aviez lue…
Ces mêmes personnes tiennent exactement le même résultat sur toutes les autres prestations, surtout lorsqu'elles ne peuvent pas les toucher. C'est particulièrement vrai lorsque l'on touche à l'hébergement de services (serveurs de courriers électroniques, serveurs web…). On voit actuellement fleurir des sites marchands proposant tout et n'importe quoi et surtout à n'importe quel prix. Je n'arrive pas à saisir que quelqu'un se fasse attraper par des hébergeurs qui facturent moins de 10 € TTC pour une connexion à 100 Mbps full duplex et un serveur mutualisé en Raid5, le tout avec une garantie de temps de rétablissement de quatre heures en jours ouvrés. Ce n'est même pas le prix du transit et on n'a encore payé ni l'amortissement du matériel, ni la redondance, ni l'ingénieur système pour sa maintenance, ni ses astreintes.
Pour un tel tarif, il ne faut pas s'attendre à des miracles, tout au plus à de la publicité mensongère. Après tout, ce n'est pas mon problème et les gens ont le droit de choisir leur poison. En revanche, lorsque je dois parler à ces prestataires, ça se corse singulièrement. Cette semaine, j'ai dû transférer une zone DNS d'un prestataire normal à ce genre de gougnafier « low cost » qui a piégé un client à l'aide de conditions qui ont été déclarées abusives par les tribunaux français. Sans doute la personne en question ne va-t-elle pas engager une procédure judiciaire pour quelques euros…
Je disais donc, avant d'être interrompu par moi-même, que je devais migrer une zone DNS. Chez n'importe quel prestataire sérieux, c'est l'affaire de quelques minutes. Cela fait une semaine que je bataille contre ce prestataire, un peu comme Don Quichotte contre ses moulins à vent. Le zonecheck de l'AFNIC échoue parce que l'adresse de messagerie du propriétaire de la zone n'est pas joignable. J'essaie à la main et au bout d'une quinzaine de minutes, le message de test passe. Il y a donc bien un serveur MX qui gère la zone. Deuxième essai, deuxième refus. J'effectue la transaction à la main avec un telnet bien senti sur le port 25 dudit MX. Le 'EHLO' se passe bien, les étapes 'MAIL FROM:' et 'RCPT TO:' aussi. Tiens donc, ce serveur semblait pourtant se comporter comme s'il entretenait une liste grise. J'aurais déjà dû recevoir une erreur temporaire 4xx. Je poursuis avec un 'DATA' et cet espèce de serveur administré avec un pied gauche me renvoie immédiatement une erreur temporaire 450. Ce sale truc effectue un greylisting concernant le couple expéditeur et récepteur lors du traitement du 'DATA' et non du 'RCPT TO:' et renvoie un code non conforme !
Trois coups de téléphone à une boîte vocale surtaxée, cinq mails au prestataire n'ont rien changé. Je n'ai même pas eu une réponse automatique, juste un numéro de ticket à ce jour non traité. Comment voulez-vous après que les mêmes individus prétendent garantir un temps de rétablissement ? Lorsque je vois que les mêmes personnes proposent de gérer pour des professionnels leurs serveurs de messagerie électronique, j'ai beaucoup de peine à empêcher une certaine tétanisation crispée de mes zygomatiques.
Ce n'est pas tout de proposer n'importe quel service informatique à n'importe quel prix. Encore faut-il être compétent, savoir lire les spécifications, les comprendre et ne pas mépriser ses clients liés par des conditions de vente abusives !