« Par monts et par Mesan | Si ce n'était pas bête, ce ne serait pas un règlement ! » |
Heureusement qu'il y a la Coface. Depuis quelques mois, je ne compte plus le nombre de clients qui mettent la clef sous la porte et cette opération passe toujours inaperçue pour le créancier.
Il existe pourtant un site infogreffe.fr qui est censé indiquer en temps réel l'état légal d'une entreprise. Lorsque je dis en temps réel, je ne prétends pas que cette mise à jour doit être immédiate, mais qu'elle doit être faite dans un délai de quarante-huit heures ouvrées. Ce n'est pas moi qui l'indique, ce sont les greffiers des différents tribunaux de commerce de France et de Navarre.
Sauf que…
Sauf qu'un autre de mes clients vient d'ouvrir une procédure collective pour liquidation judiciaire le 2 mai dernier et que le site infogreffe.fr ne l'indique toujours pas le 8 mai. Je n'ai été mis au courant de ce fait que parce que la Coface suivait l'affaire et a fait le nécessaire pour m'avertir et m'indiquer de faire inscrire ma créance directement dans les livres du liquidateur. La Coface est allé jusqu'à m'indiquer le nom et l'adresse du liquidateur, parce que l'entreprise n'étant toujours pas marquée comme en cours de liqudation, je n'avais aucun moyen d'avoir directement ces informations, le greffe du tribunal de commerce en question ayant refusé de me les donner sans acheter un dossier complet de l'état de l'entreprise qui pouvait parfaitement ne pas être à jour. Nous voyons donc que ces services fonctionnent parfaitement bien et ne se moquent pas de leurs usagés.
Ces tribunaux de commerce sont des aberrations qu'il faut absolument réformer ne serait-ce que pour avoir une justice rendue un peu moins mal. Je n'ai pas beaucoup d'illusions sur la justice non consulaire, mais je n'en ai plus aucune sur les prud'hommes ni sur les tribunaux de commerce. J'ai assez donné, ayant poussé l'expérience jusqu'à être condamné à verser des salaires à une personne qui n'a jamais travaillé pour moi.
En revanche, j'ai beaucoup d'admiration pour les villes qui ont refusé d'avoir des tribunaux de commerce et qui ont délégué aux tribunaux d'instance leurs chambres commerciales car si les chambres commerciales des tribunaux d'instance rendent la justice comme Saint-Louis sous un chêne, force est de constater que les tribunaux de commerce la rendent trop souvent comme des glands. Je ne compte plus les déboires que j'ai pu avoir lorsqu'il s'agit de récupérer des créances en passant devant une chambre d'un tribunal de commerce. Je crois que ces tribunaux de commerce m'ont fait tout ce qu'il était possible de faire. Perdre des pièces importantes remises lors d'une audience à l'huissier de la salle — entre autre un extrait Kbis pour corriger une adresse de siège social —, ne pas convoquer le demandeur par courrier recommandé en envoyant le courrier à une fausse adresse — adresse corrigée deux fois par courrier recommandé avec accusé de réception au greffe du tribunal de commerce en question et une fois par huissier de justice —, ne pas demander à un comparant de justifier de son identité alors même que sur le Kbis est indiqué que le gérant de la société est une femme et qu'un grand barbu se présente devant le juge, ne pas faire suivre les ordonnances de liquidation ou de redressement aux créanciers qui sont les principaux intéressés et j'en passe des vertes et des pas mûres. Ce n'est pas grave, c'est un manque de moyen chronique et il faut mettre plus d'argent dans le bastringue pour que les tribunaux fonctionnent mieux. C'est juste faire fi d'une évidence pour qui traîne dans les tribunaux depuis aussi longtemps que moi. Ces tribunaux passent 90% du temps a essayer de corriger ce qu'ils ont traité par dessus la jambe les premiers 10% de leur temps. Je ne compte pas encore toutes les affaires qui n'ont rien à faire dans un tribunal et qui devraient être réglées autrement, parce qu'aujourd'hui, le grand jeu pour un débiteur, c'est l'optimisation de sa trésorerie. Cela coûte moins cher de contester une facture devant un tribunal que d'emprunter à une banque pour la régler et on a toujours une petite chance que cette facture soit revue à la baisse par le tribunal surtout lorsque c'est de la prestation ou que le créancier se fatigue voire mette la clef sous la porte.
Je pourrais en parler longtemps. La cerise sur le gâteau est aujourd'hui prescrite et je ne résiste pas à vous la faire partager. J'ai eu l'occasion d'être condamné en dernier ressort pour avoir eu le culot de demander à un client — qui connaissait bien le juge — le règlement d'une facture assez importante. J'étais comparant à l'audience, plus exactement j'étais absent à deux premières audiences renvoyées puis comparant à la troisième — c'est du moins ce qui était indiqué sur les minutes du procès — alors que je n'avais pas pu me rendre à ces audiences pour l'insigne raison que je n'y avais pas été convoqué. Impossibilité de faire appel et la cour de cassation a refusé d'ouvrir le dossier sous le prétexte qu'un juge ne peut pas faire de faux en écriture. Après un dépôt de plainte en bonne et due forme puis une enquête de police qui a prouvé sans ambiguïté que je ne pouvais être présent à cette audience, cette plainte a été classée sans suite. Circulez, il n'y a rien à voir ! Et n'attendez pas à ce qu'on lave notre linge sale en famille !
Vivement que cette belle institution soit responsable de ses faits et gestes. Vous allez me dire qu'elle est responsable devant la Cour de Cassation. C'est vrai. Sauf que le montage d'un dossier devant la Cour de Cassation est onéreux, je l'ai fait deux fois, et rien n'indique que la Cour va se saisir de votre dossier et ne pas botter en touche. En pratique, donc, ces tribunaux ne sont responsables de rien et il faudrait que ça change de toute urgence.
Si tout ce que tu dis est vrai (et je n’ai absolument aucune raison d’en douter), une réforme de ce capharnaüm me semble en effet des plus urgentes.
Je n’ai jamais compris pourquoi des pans entiers de la justice étaient confiés à des amateurs.
Mais je peux malheureusement prouver ce que j’avance. J’ai des archives avec toutes les pièces. Et c’est sans compter une autre histoire où j’avais dû traîner un agent immobilier en justice (il avait vendu le même bien à deux personnes le même jour) et où mon avocat a reçu un soir à 17h40 un fax lui apprenant une audience à l’autre bout de la France le lendemain à 9h00 alors que la loi précise que l’avocat doit être prévenu plus de 48 heures ouvrées avant l’audience.
J’ai donc demandé un renvoi qui a été refusé. L’adversaire qui n’avait rien à dire et pour cause, avait obtenu plus de dix renvois sans jamais se présenter à une audience. Bon, j’ai fini par gagner, mais c’est usant.
Les Greffes des TC sont une survivance de l’Ancien Régime, une charge officielle qui s’achète. Ils coûtent une fortune et sont notoirement incompétents. Quant aux collèges de juges, petits notables locaux qui se la jouent avec leur belle médaille, c’est du grand n’importe quoi au point que, dans mon coin, la justice commerciale ne se règle plus depuis longtemps devant les TC mais devant la Cour d’Appel.
Parlons aussi des mandataires judiciaires - autre charge héritée de l’Ancien Régime - c’est tout aussi ubuesque. Ici, il y en a même eu un qui a glissé sur des balles de 11.43 mm. Pas vraiment un calibre d’amateur…
Je viens de vérifier. Nous sommes le 9 mai, l’information devrait être publique et présente sur le site infogreffe.fr depuis le 4. Ce n’est toujours pas le cas.
Nous sommes aujourd’hui le 15 mai 2012. Les informations d’infogreffe.fr sur l’entreprise en question sont à jour à la date du 14 mai 2012 (dixit infogreffe.fr) et l’entreprise n’est toujours pas marquées comme en liquidation judiciaire !
Pour mémoire, l’audience date du 2 mai et un liquidateur judiciaire a été nommé.