« URSSAF, mon amour (suite et malheureusement pas fin) | Techniques modernes » |
J'ai échappé jusqu'à cette semaine au film de Spielberg, « Il faut sauver le soldat Ryan ». J'avoue ne pas bien comprendre pourquoi on en a autant parlé lors de sa sortie. La moindre des choses qu'on puisse dire, c'est que son synopsis ne casse pas trois pattes à un canard pour un film aussi long. J'avoue tout de même que les décors sont impressionnants. Qu'est-ce que ça a dû coûter en constructions et explosifs divers !
Pourtant, quelle n'a pas été ma surprise lorsque j'ai vu, vers le milieu de ce film interminable, une voiture immatriculée « … BG 50 ». Pour un américain, 50, c'est le département de la Manche. C'est très bien puisque la scène est censée se dérouler dans le coin de Valognes. Pour ceux qui n'auraient pas appris à l'école élémentaire la liste des préfectures et des sous-préfectures françaises, Valognes est la dernière gare importante sur la ligne de Paris Saint-Lazare à Cherbourg, là-bas, presqu'au bout du monde.
Donc véhicule immatriculé dans le département de la Manche, plaque d'immatriculation terminée par 50. Logique. Il faudrait pourtant que ces américains qui croient tout savoir se renseignent un minimum puisque nous en sommes actuellement à notre quatrième système d'immatriculation des véhicules — je passe sur les immatriculations spéciales voire vraiment bizarres — dans notre beau pays de France, dont le dernier doit être le plus absurde car il comporte moins de numéros, environ cent fois moins faites le calcul, que le système précédent.
Le système avec numéro de département date en effet du 1er avril 1950 (système FNI remplacé par le SIV en 2009). Il aurait été de bon ton de voir un véhicule portant une immatriculation terminée par KF, KF2 ou KF3, immatriculation de la Manche à cette époque.
Mais ne nous arrêtons pas là, si ce n'était que le seul point douteux de ce film, il n'y aurait pas matière.
Les immatriculations font partie de la liste des nombreux bugs du film. Et il y a aussi des problèmes au niveau des chars, des ponts, des clochers etc.
En revanche, le film, amha, évite le bug majeur des films précédents traitant de ce sujet : l’héroïsme de la guerre propre.
Le film est sanglant, pire qu’un étal de boucher, la violence n’est pas stylisée. La politique y est montrée sous son jour le plus cynique et hypocrite. L’adversaire y est chosifié. La bataille finale ressemble en fait à l’assaut sur Stalingrad.
Tom Hanks joue comme souvent à son habitude de manière très austère, minimaliste, à l’économie de moyens. C’est à travers son regard distancié que le film est intéressant.
Le scénario effectivement ne casse pas des briques puisqu’il est voulu comme justement n’ayant aucun intérêt. Ce film fait partie de la lignée “politique” de Spielberg (comme “Munich” par exemple, ou “La guerre des mondes", “Minority Report” etc.). Ce n’est pas “Les dents de la mer” ou “Duel"). Cela lui a valu quelques animosité car on ne l’attendait pas sur ce terrain.
Dans le genre bien plus plaisant mais totalement grotesque, tu as “Le jour le plus long” du conglomérat Zannuck ou le pauvre R. Clément qui se colle à “Paris brûle-t-il?". On sort de ces deux films finalement assez enjoués et “distraits", même si en matière de conneries historiques, ils sont une anthologie à eux deux.
Dans le film de Spielberg, tu sors de la projection poisseux, énervé car le film n’est pas ennuyeux mais guère enthousiasmant non plus. C’est son but : on évite de distraire le spectateur avec une boucherie. En tout cas, Spielberg ne s’est jamais caché qu’il ne souhaitait faire plaisir à personne et surtout pas au spectateur, surtout américain.
Le ton est donné dès le début. Pour une fois, tu n’as pas la grande explication historique avec la carte d’état-major qui va avec et le rattrapage scolaire pour ceux qui dormaient à l’école. Une fois l’assaut initial donné, tu es dans le merdier total et Spielberg ne s’emmerde surtout pas à jouer au prof d’histoire.