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Cela fait bientôt quinze ans que j'habite à côté de la place de la République, à Paris. En quinze ans, ce quartier a considérablement changé. Pas en bien.
Il y a quinze ans, ce quartier n'était pas réellement un quartier populaire. Ce n'était ni Belleville, ni Ménilmontant, et, depuis lors, le prix du mètre-carré habitable étant devenu ce qu'il est, les classes moyennes et les jeunes ménages en ont été éjectés pour laisser la place à des bobos oisifs. Tout est maintenant fait pour eux. Outre le fait que ces nouveaux habitants n'ont pas besoin de beaucoup travailler pour vivre, ils se contrefichent ouvertement de ceux qui sont contraints à partir le matin pour gagner leur vie. Après tout, tout le monde n'avait qu'à faire comme eux, c'est-à-dire philosophe ou prétendu tel, poète, dealer, fils à papa ou pilier de bar à vin.
Je m'explique.
La place de la République, à Paris, était une place où la circulation était assez fluide avant que Bertrand Delanoë, contre l'avis de la majorité des habitants du quartier l'enquête d'utilité publique faisant foi, ne se préoccupe d'entraver la circulation. On y faisait le tour assez facilement même aux heures de pointe. Aujourd'hui, toute la circulation est contrainte d'un seul côté, les files se croisant allègrement et la fluidité étant réglée par le bal des feux rouges à un rythme d'environ trois véhicules toutes les deux minutes. C'est donc un immense progrès. C'est même tellement un immense progrès que la RATP et les taxis réunis ont obtenu un couloir de circulation du côté de la place qui devait être totalement piéton et qu'il a fallu modifier les sens de circulations de certaines rues pour éviter une congestion complète du quartier.
Et cette place qui contenait deux squares et des plans d'eaux avant que la mairie de Paris qui, je le rappelle, est tenue actuellement par des socialistes et leurs amis écologistes ne s'en occupe s'est vue transformée en un genre d'esplanade en pavés de pierre reconstituée, d'un gris indéfinissable et taché, tellement mal posés que les joints sont déjà cassés et bons à refaire. Après l'hiver prochain, pour peu qu'il gèle un peu, il y a fort à parier que tous les joints auront définitivement sauté.
Cette place est maintenant devenue un cagnard, du fait de la réverbération et de l'accumulation par ces pavés de la chaleur, et une source de nuisance pour les gens du quartier, puisque s'y retrouvent jusqu'à des heures indues des adeptes de musique sur la voie publique et de planches à roulettes qui sont visiblement à nouveau à la mode. C'est bruyant. Bien plus que ne l'était la circulation autour de la place. Mais ce n'est rien à côté de la scène qui a été installée pour des concerts. Hier, lundi donc, s'est tenu un concert avec force décibels puisqu'à plus de cinq cents mètres de la place, il était impossible de songer à dormir avec les fenêtres ouvertes. Que la mairie organise ce genre de sauterie, pourquoi pas. C'est assez cohérent avec Paris-Plage, Montmartre-Neige — ne rigolez surtout pas, un parisien a cru bon de se moquer de Paris-Plage et de ses nuisances par un courrier à la mairie de Paris et le projet est officiellement à l'étude ! — et d'autres événements festifs du même tonneau. Mais qu'elle organise cela le samedi soir, lorsque les parisiens qui ont encore la chance de travailler ne sont pas obligés de se lever tôt le lendemain matin. Paris est avant tout une ville pour ses habitants. Le touriste ou l'oisif n'a pas à y être roi sauf à vouloir à tout prix la vider de ses habitants.
Je n'ai donc pas peur de paraphraser Jacques A. Bertrand. Les maires de Paris et de ses arrondissements, ce n'est rien que des sales types !
Rebelote hier soir ! Avec beuverie collective à la bière et cars de gendarmes mobiles pour canaliser tout cela. Je ne voudrais pour rien au monde avoir une vue sur la place…