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Nouvelles idées et pause fiscale

02.10.13 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les politiciens

Ce qui se souviendront de la pause fiscale pour 2014 ne seront pas déçus. D'autant qu'Aurélie Filippetti, ministre de la culture, ne renonce pas malgré sa première bataille perdue contre Bercy. En effet, elle souhaite que les appareils connectés soient taxés comme le sont les supports d'enregistrement pour financer la sacro-sainte exception culturelle française qui fait, selon elle, que « l'on a un peu de bonheur [en France] ».

Oui, vous avez bien lu, c'est du Filippetti dans le texte.

Revenons à cette annonce. Invitée sur BFM TV pour répondre aux questions de Jean-Jacques Bourdin, Aurélie Filippetti est revenue sur la suspension de la taxe sur les appareils connectés. Cette taxe, rappelons-le à la décharge du ministre, était l'une des propositions du rapport Lescure commandé par le ministère.

Après le cafouillage sur la pause fiscale, la diminution de l'augmentation des impôts à horizon 2014, à moins qu'il ne s'agisse de 2015 voire de 2016, le gouvernement a déclaré que cette pose fiscale serait effective à partir de 2015. Cochon qui s'en dédit. Par conséquent, cette nouvelle taxe qui devait représenter 1% du montant des appareils dès 2014 pourrait ne jamais voir le jour si cette pause fiscale est bien respectée en 2015.

Mais c'est mal connaître le ministre. Ayant perdu son premier combat contre Bercy, elle ne baisse pas les bras et continue à défendre l'idée de faire évoluer la taxe pour copie privée en en élargissant l'assiette. Déjà, cette taxe m'énerve au plus au point. Il paraît qu'en tant que professionnel, je peux me la faire rembourser parce que j'utilise mes systèmes de stockage pour stocker mes productions de l'esprit et non celles des autres. Je vous défie de le faire. Même mon centre des impôts ne sait pas comment cela pourrait se faire. Passons et revenons au sujet. Cette taxe pour la copie privée, ce qui est contestable sachant que le droit français permet déjà un droit à la copie privée pour un usage personnel, est une taxe bizarre puisqu'elle revient à mélanger sans vergogne une certaine compensation inavouée du piratage et les dispositifs de soutien à la création.

Dans le même entretien, elle avoue « travailler sur l'évolution de la fiscalité pour l'adapter au numérique ». Là, vous devriez trembler. Un ministre qui travaille à l'évolution de la fiscalité n'augure, en France, rien de bon. En effet, elle signale que depuis les années 1980, les cassettes audio, les fax, les photocopieurs sont taxée en vertu du droit à la copie privée, que ces technologies sont aujourd'hui obsolètes et qu'il faut donc faire évoluer la base de la fiscalité pour continuer ce que l'on a toujours fait en France.

À ce moment, il faudrait tout de même rappeler que c'est justement la mal français. Aucune suite dans les idées fiscales, les règles du jeu qui changent subtilement tous les trois mois et un droit fiscal plus alambiqué encore qu'une homélie d'un père jésuite. Il faudrait rappeler au gouvernement que si de plus en plus de cadres supérieurs vont résider fiscalement en Belgique, ce n'est pas pour payer moins d'impôts (les impôts sur les salaires y sont objectivement plus élevés), c'est juste pour avoir un peu plus de stabilité fiscale.

Mais le ministre n'en a cure, taxer les objets connectés comme on le faisait autrefois pour les dispositifs de reproduction des œuvres « va dans le sens de l'histoire et n'alourdira pas le prix pour les citoyens ». Pourtant, il y a au moins un citoyen qui en a marre d'être pris continuellement pour un imbécile. J'ai un smartphone pour raisons professionnelles (acheté au Canada non pour des raisons fiscales mais pour avoir un vrai clavier sans écran gras) qui ne me sert que pour faire un ssh une fois de temps en temps sur mes serveurs. Je n'utilise pas ses autres fonctionnalités, un téléphone étant d'abord fait pour téléphoner. Je paie déjà des taxes sur mes DLT, SLR, CD-Rom, DVD-R, disques durs, accès internet pourtant sans télévision, je contribue donc déjà assez à l'exception culturelle française qui me semble pourtant mal en point lorsque je vois les émissions qui passent à la télévision actuellement et la médiocre production cinématographique française. Quant à la musique sponsorisée par le ministère, je préfère ne pas dire ce que j'en pense.

Et elle nous prévient. Même si une pause fiscale a été annoncée pour 2015, il n'est pas impossible que cette nouvelle taxe figure au budget 2015. Elle ajoute même : « moi, je pense qu'il faut faire évoluer les choses, parce qu'il s'agit de financer des industries créatives qui créent de l'emploi en France, qui nous permettent d'écouter de la musique française, de voir des films français… C'est l'exception culturelle, et ça tout le monde est d'accord en France, c'est droite-gauche, on est tous très fiers de ça. Ca fait partie de ce qui marche en France, et de ce qui fait qu'on a un petit peu de bonheur et de plaisir ».

Personnellement, je n'ai pas un peu plus de bonheur et de plaisir parce que je regarde un film français. Je peux à la rigueur discuter de la chose lorsque je regarde un bon film. Entre Bienvenue chez les ch'tis et Dans ses yeux, film argentin de Juan José Campanella, je n'ai pas honte de préférer le second même si cela doit me faire passer pour un mauvais français.

Quoi qu'il en soit, le ministre a plein d'idées pour lever de nouvelles taxes, nouvelles taxes qui ne sont pas incompatibles avec l'augmentation des taxes actuellements perçues pour légitimer le droit à la copie privée. Et n'oublions pas que le Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique qui a l'oreille du ministre a adopté mardi 23 octobre 2013 un avis sur les services en cloud qui permettent l'accès à des œuvres stockées à distance. Il estime qu'ils devaient être soumis au paiement de la rémunération pour copie privée. Le ministre ne devrait pas tarder à saisir l'idée au bon.

 

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