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Droits d'auteur

26.11.13 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les politiciens

Il y a des hommes politiques qu'il faudrait changer en bites d'amarrage pour qu'on puisse s'asseoir une bonne fois pour toute dessus. Parmi les candidats à la transformation se trouve le député Hervé Gaymard, encarté à l'UMP.

Souvenez-vous. J'ai déjà eu l'occasion d'écrire ici que ce député avait interrogé Aurélie Filippetti sur les vides greniers numériques, ces sites tels Amazon, eBay, le Bon Coin où l'on trouve en quelques clics des rangées de livres d’occasion. Cela le scandalisait car à l'heure où l'état cherche toujours plus d'argent plutôt que de rogner sur ses dépenses, il serait de bon ton de taxer ces transactions de gré à gré.

Le ministre vient de répondre. Elle vient de répondre sans écarter un encadrement de ce secteur afin de permettre aux ayant-droits d'autoriser ou interdire ce commerce. Voire le soumettre à contribution.

Donc, si j'ai bien compris, je pourrais acheter neuf ou en occasion un livre et ses ayant-droits auraient la possibilité de m'interdire de le revendre. Par ailleurs, ils pourraient toucher des droits sur la revente d'un ouvrage d'occasion alors même qu'ils ont déjà touché quelque chose lors de la première vente. C'est intéressant.

Replaçons le combat de Monsieur Hervé Gaymard dans son contexte. Ce monsieur, qui siège au conseil d'administration des éditions Dargaud depuis 2007, voit d’un très mauvais œil le développement du marché du livre d’occasion. Il fait donc part de ses craintes pour la « répartition équitable des profits » entre les acteurs du secteur. 

Je cite :

Amazon, Priceminister, la FNAC ou Ebay touchent des commissions sur chaque vente et sont soumis pour partie à la TVA. Au contraire, ceux qui ont créé et édité les livres vendus ne perçoivent aucun bénéfice de cette exploitation et voient même leur chiffre d'affaires amputé de recettes non négligeables.

Il persiste en ajoutant que dans le même temps :

les créateurs, les auteurs et les éditeurs sont (…) fortement pénalisés. Les premiers sont en effet privés d'une part non négligeable de leurs droits d'auteur et les seconds voient baisser significativement leurs ventes moyennes, rendant leurs coûts de création de plus en plus difficiles à amortir.

Et là, tout est dans le viseur du député (livres d'occasion, téléchargement légal ou illégal, disques, logiciels, jeux video…) qui appelle à une réglementation de ces reventes. Il ose même le parallèle anxiogène en signalant :

si cette pratique n'est pas réglementée en faveur des propriétaires des œuvres, c'est tout le secteur de l'édition qui, à l'instar de l'industrie du disque face au téléchargement illégal, est menacée.

La solution qu'il imagine est une contribution sur les ventes et les achats de livres d’occasion à l'image de ce qui se fait déjà pour les prêts en bibliothèque ou pour les œuvres photocopiées. Dont acte. Dans sa réponse, le ministre de la culture n’a pas rejeté cette idée d’une taxe sur les livres physiques ou numériques. Le gouvernement est ainsi en train de nous préparer à nous refaire le coup de la taxe pour la copie privée qui fait que chaque fois que j'achète un CD-ROM ou un DVD-ROM, je paie une taxe pour avoir le droit de faire des copies illégales d'artistes dont je n'ai que faire. Au passage, cette taxe me semble être une justification voire une incitation au piratage de ces prétendues œuvres. Psychologiquement, elle me semble contreproductive.

Le ministre précise même :

au regard de la propriété littéraire et artistique, la question qui se pose est de savoir dans quelles conditions l'acquéreur d'une œuvre littéraire, musicale ou audiovisuelle sous une forme numérique, peut ou non être autorisé à revendre le fichier en question sur une plateforme de téléchargement, comme cela est possible dans l'univers physique, pour un ouvrage papier, un CD ou un DVD.

Heureusement qu'elle n'est que locataire rue de Valois ! Elle rappelle même que :

ce débat juridique sur la licéité du marché secondaire des biens culturels numériques est indissociable d'un débat sur les moyens de garantir, dans une économie entièrement dématérialisée, une juste rémunération des créateurs et un niveau adéquat de financement de la création, indispensable à son renouvellement.

Et là, nous tombons sur l'épuisante règle de l'épuisement des droits qui fait actuellement l'objet d'une étude du Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique pompeusement appelée « seconde vie des œuvres numériques ».

Cette règle de l'épuisement des droits stipule actuellement que le titulaire de droits perd le droit de contrôler la revente des copies. Cela reste valable en matière de logiciel.

Donc, pour faire simple, le marché de l'occasion grossit et les ayant-droits râlent. Il grossit pour plusieurs raisons dont :

  • l'impossibilité de trouver certains ouvrages neufs car ils sont épuisés ;
  • le coût prohibitif de certains ouvrages ;
  • le pouvoir d'achat toujours en baisse.

Si, à la limite, je veux bien discuter d'une taxe pour des ouvrages toujours disponibles en neuf à des prix corrects, je ne veux pas entendre parler pour des ouvrages vendus à prix d'or ou pour des ouvrages indisponibles, surtout lorsque leurs auteurs sont décédés et que le fruit de cette taxe ira à leurs descendants.

Les résultats de cette mission sont attendus pour juillet 2014. Gageons qu'un belle usine à gaz fiscale va en sortir.

 

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