« Surtaxe d'habitation | Pauvre boursier nécessiteux » |
Je suis l'un des (quatre cent soixante) douze salopards qui contraignent le régime de sécurité sociale à ne plus être à l'équilbre. Ne me demandez pas quel est mon matricule d'heureux 472e, je n'en ai aucune idée.
Mais c'est intéressant, je ne savais pas que lorsque je cotisais, il était à l'équilibre. Je dois sans doute être bien plus riche que je ne l'imaginais. Il faut que je me méfie, le redressement fiscal ne doit pas être loin. Il est certainement plus près de moi que du RSI qui a encore vu ses comptes ne pas être approuvés par les commissaires aux comptes.
Ce matin, j'ai eu un coup de fil d'un type du RSI et j'ai eu le droit à tout le discours bien huilé, bien étudié pour :
Il m'a rappelé que la sécurité sociale était faite pour tous les français depuis 1945 et qu'elle était issue du CNR. Il ne pouvait pas mieux tomber, je n'attendais que cela, je venais justement de réviser les étapes de la création de notre belle sécurité sociale que le monde nous envie.
Il est vrai qu'il est plus politiquement correct de parler de l'après-guerre que du gouvernement de Vichy sous lequel fut élaborée la sécurité sociale en 1940. Vu de 2014, nous ne sommes plus à quelques années près. En revanche, parler du Conseil National de la Résistance et du grand élan de solidarité de la libération est assez cocasse. Il faut en effet mettre des hommes derrière ces faits. Et là, un nom s'impose, celui de René Belin, principal instigateur de la sécurité sociale à la française.
René Belin et né en 1898 dans une famille pauvre. Il a connu la misère et commence sa vie active à l'âge de quatorze ans comme facteur télégraphiste dans ce qui s'appelait encore les PTT. Rapidement, il s'engage dans le combat syndical et adhère au syndicat national des agents des PTT qui n'est autre que l'une des composantes de la fédération nationale des travailleurs des PTT affiliée à la CGT. En 1933, après avoir été élu à son bureau, il en devient l'un des principaux responsables.
Jusqu'ici, rien à dire. En revanche, il faut noter son engagement dans le gouvernement de Vichy et sa nomination comme ministre du travail le 14 juillet 1940 (secrétaire d’état à la Production industrielle et au Travail dans le premier gouvernement de Pierre Laval pour être parfaitement exact). Ce monsieur, à l'instar de Laval et de Darlan, est l'un des signataires de la loi sur le statut des juifs sous Pétain. Sous son mandat furent dissoutes les confédérations syndicales et patronales (décret du 9 novembre 1940, ce qui pour un ancien syndicaliste est parfaitement cocasse) et instituée la retraite par répartition toujours et malheureusement encore en place actuellement, supprimant ainsi la retraite par capitalisation qui était la norme en France avant Vichy. Oui, avant la retraite par répartition, il existait en France un système de retraite, il ne faudrait jamais l'oublier. Tout cela du fait d'un seul homme, syndicaliste de la CGT a priori de gauche.
Comme on l'aura constaté, dans le tableau de la création de la sécurité sociale, le CNR, on ne le reconnaît plus qu'à ses godasses.
Mais ce n'est pas tout. Le sacro-saint numéro INSEE improprement appelé numéro de sécurité sociale est une invention d'un contrôleur général de l'armée. Il s'appelait René Camille et avait fait les beaux jours si l'on peut dire de l'armée française. Appelé lors de sa création « numéro de Français », il était destiné tout simplement à ficher la population. Vous ne vous êtes sans doute jamais demandé pourquoi on y avait mis un code sexe sur un caractère. Vous n'êtes pas très curieux, les codes de 0 à 9 servaient à recenser les juifs, les musulmans d'Algérie, les étrangers ainsi que les Français normaux hommes et femmes. Autre héritage de Vichy toujours en place.
Vous allez encore me dire que je ne vois que le mauvais côté des choses, que Vichy, outre les bains et la pastille, c'est aussi la retraite à 60 ans, la fête des mères, le salaire minimum, la licence IV et le rugby à XV (sans qu'il n'y ait forcément de rapport entre les deux derniers), ce n'est pas que la sécurité sociale. Vous aurez raison, mais mon interlocuteur l'avait oublié et il était bon qu'il se prenne une piqûre de rappel.
Pour ceux qui m’ont posé en privé la question du code sexe qui ne se limite pas à 1 et 2, c’est une invention du général Marie pour classer la population algérienne. Le 3 pour les religieuses et le 4 pour les prostituées sont des légendes urbaines.
Donc nous avons :
1 : homme métropolitain ;
2 : femme métropolitaine ;
3 : indigène d’Algérie homme non juif (donc musulman pour Marie) ;
4 : indigène d’Algérie femme non juive (donc musulmane pour le même Marie) ;
5 : juif indigène d’Algérie (donc séfarade, comment donc classer les Ashkénazes, les Mizrahi et tous les autres juifs ?) ;
6 : juive indigène d’Algérie (même remarque) ;
7 : étranger homme ;
8 : étrangère femme ;
9 et 0 pour les statuts mal définis.
En 1944, le CNR a trouvé que cela faisait désordre et a décidé de ne plus utiliser que 1 et 2 pour homme et femme. Il existe aujourd’hui un numéro de sécurité sociale provisoire commençant par 7 pour les femmes et 8 pour les hommes, mais il est rarement attribué et toujours pour de bonnes raisons.