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Je me suis libéré de la sécurité sociale française malgré les foudres qui me sont promises par le gouvernement. À ce jour, ma caisse de retraite (CIPAV) n'a pas bougé. Vue sa rapidité de traitement des dossiers et ses dysfonctionnements, rien de plus naturel. Le contraire eut même été étonnant. Elle m'a même envoyé un bulletin de vote pour ses élections internes. Naturellement, je vais y répondre pour qu'elle puisse après cela me dire qu'ayant voté, je ne peux prétendre l'avoir quittée.
En revanche, le RSI a retrouvé mes coordonnées téléphoniques pour m'appeler. L'URSSAF a fait de même ce matin. Et j'ai eu droit à un beau couplet sur la solidarité nationale. La solidarité. Quel mot magnifique… Et quel contresens ! La solidarité, cela n'a rien à voir avec l'assurance. Une assurance assure un risque, par exemple lorsque mon voisin se casse la jambe. La solidarité, c'est lorsque j'aide mon voisin qui s'est cassé la jambe en lui évitant de descendre trois étages et en allant lui acheter son pain.
Je n'ai pas fait l'historique de la sécurité sociale à mon interlocuteur puisque son discours tournait autour des cotisations en fonction de ses moyens et des prestations en fonction de ses besoins. Son discours était tellement beau que cela aurait pu me coûter quelques larmes. Mais je suis un sans cœur, vous devriez le savoir depuis le temps que vous lisez ma prose.
Depuis le début de l'année et jusqu'à ma libération, j'ai versé tous les mois 7000 € (sept mille euros) en cotisations sociales. S'ajoutent 1500 € (quinze cents euros) d'impôt sur le revenu (pour la solidarité nationale aussi). Or j'ai de la mémoire. Je me souviens qu'au milieu des années 2000, je me suis retrouvé une année à payer CSG/CDRS sur une ligne comptable de mon entreprise (pas sur de l'argent que j'avais effectivement touché, j'ai payé sur de l'argent virtuel que j'aurais pu un jour me verser), de l'ISF (sur une estimation aberrante d'une propriété et une autre ligne comptable). Je me souviens que j'ai aussi payé rubis sur l'ongle mes charges URSSAF et RSI malgré le fait, je m'en suis aperçu plus tard, que j'étais officiellement décédé pour le RSI et que, surtout, une fois payés toutes mes cotisations, impôts et prélèvements divers et variés, il ne me restait plus rien pour vivre.
J'ai fait de la plomberie, de l'électricité, donné des cours de soutien en plus de mon activité principale. J'ai fait tout ce qui pouvait améliorer l'ordinaire.
J'ai fait à cette époque et avec mon épouse le tour des services sociaux pour avoir de quoi nous nourrir. L'amour-propre en prend un sacré coup. Et nous avons entendu que personne ne pouvait rien pour nous. Ni les services de la mairie de Paris parce que j'était propriétaire d'un petit appartement à Paris, ni la CAF parce que j'étais imposable (14%) et que je payais l'ISF. Mais ni mon appartement, ni les impôts ne me permettaient de manger. Il fallait revenir l'année suivante et on verrait à ce moment ce qu'on pourrait faire pour nous, certainement rien puisque nous serions toujours imposables.
Nous avons passé quelques années à manger des pâtes et des œufs, à faire les fins de marchés tout en continuant à payer des sommes astronomiques en prélèvements sociaux pour la solidarité nationale.
J'ai donc été solidaire. Personne ne l'a été avec moi. Et c'est bien compréhensible, les partenaires sociaux n'ont pour seul but que de tirer la couverture à eux. Toujours plus de prestations ou d'avantages pour leurs représentés (salariés ou MEDEF) payés par ceux qui ne sont pas représentés ou très marginalement (professions libérales, TPE). Et accessoirement, les cotisations sociales permettent de payer une partie des syndicalistes. Au moins, à partir de janvier 2015 la situation sera-t-elle plus franche, il y aura directement une ligne sur les fiches de paie pour payer les syndicats.
Ma libération de ce système à l'agonie est ainsi motivée par plusieurs choses :
Il n'y a dans ce combat aucune place, aucune prise de position idéologique de gauche ou de droite comme je l'entends trop souvent. La libération n'est pas un long fleuve tranquile. C'est un parcours du combattant. Il faut lutter contre des décisions illégales, contre des huissiers courbés et agissant en dehors de tout cadre légal, contre des organismes qui, lorsqu'ils ne savent plus quoi dire demandent renvois sur renvois pour user la procédure et le justiciable jusqu'à la corde. Beaucoup de gens m'ont contacté à ce sujet et ma réponse sera toujours la même. On ne fait pas cela dans le simple but d'économiser de l'argent. C'est une décision qui doit être mûrement réfléchie.
Honnêtement j’admire ton courage, et je sais que je devrais (ou nous devrions tous) suivre ton exemple. Je te lis depuis longtemps (depuis le début de ce blog, en fait) et je sais que tu as ce côté méthodique systématique, couplé à une culture sans limite qui te permet de te jeter dans cette aventure… Le système ne ferait qu’une bouchée de moi !
Bon courage pour la suite…
Je ne sais pas s’il s’agit de courage, de détermination ou de simple survie. Il y a douze ans, j’étais un homme courageux au sens d’Ambrose Bierce, c’est-à-dire un type assez malchanceux pour être au mauvais moment au mauvais endroit et assez bête pour y rester.
J’ai failli me faire broyer par notre beau système. J’en avais peur, j’avais peur de ses tribunaux que j’évitais. Je n’avais pas encore compris que notre état ne comprenait au mieux que les arrêts de cour d’appel. Depuis, j’ai appris à connaître notre système judiciaire, j’ai fait d’énormes progrès en droit, je suis allé deux fois en cassation, une fois grâce à un faux en écriture d’un juge d’un tribunal de commerce qui a eu le culot de me juger en plus en dernier ressort et en première instance, plusieurs fois devant les prud’hommes (dont une audience magnifique à l’heure de la sieste où le président dormait bruyamment en me condamnant pour non paiement de salaire à une personne qui n’a jamais travaillé pour moi, et pour cause, ma société n’était pas créée à l’époque des faits et n’avait donc aucun salarié). J’ai appris en particulier grâce à cette affaire qu’on ne gagne jamais ou que l’on ne perd jamais en fonction de ses arguments de droit mais en fonction de sa capacité à aller jusqu’au bout de la procédure. En effet, la partie qui ne peut défendre sa position par l’application stricte du droit va enliser la procédure pour chercher le vice de forme, ce qui entre nous est totalement scandaleux.
J’ai commencé à me battre pour les salariés d’une entreprise dont le PDG était parti avec la caisse. J’étais juste responsable R&D, salarié. J’ai continué à me battre pour mes propres salariés jusqu’à ce que l’un d’entre eux me fasse des faux en écriture qui m’ont coûté 120k€. Aujourd’hui, je me bats égoïstement pour moi. Si jamais, cela peut servir d’autres égoïstes, pourquoi pas, mais ce n’est pas le but premier.
J’ai appris aussi qu’il faut utiliser la force du système contre lui. il faut être plus bête que lui dans certains cas. À ce petit jeu, officier de réserve de l’armée de terre, j’ai un petit peu d’endurance.
Le reste est une histoire de culot de faire quelque chose quand on en a assez de se faire marcher sur les pieds. Je conçois que le choix de la bataille est un choix difficile à faire, mais il grand temps que quelque chose bouge dans ce pays.