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La saga de l'été semble être cette année l'affaire Woerth-Bettencourt. Tout le monde y va de ses remarques, les journalistes comme les politiques qui ne ratent aucune occasion de se mettre sous les feux de la rampe. Les plus belles phrases tournent autour du concept de bouclier fiscal parce qu'un chèque de trente millions d'euros a été reversé à Liliane Bettencourt par l'administration fiscale. Personne n'a trouvé le moyen d'annoncer la somme payée par Liliane Bettencourt aux titres de ses impôts sur le revenu et sur la fortune. Peut-être cette somme est-elle indécente.
J'arrive à comprendre sans peine que le commun des mortels soit scandalisé par le fait que l'administration fiscale ristourne à un contribuable une telle somme, mais encore faut-il, pour rester honnête, la rapporter à ce que cette contribuable a versé durant le même exercice au trésor public.
Par ailleurs, il ne faut surtout pas oublier que le bouclier fiscal a été instauré car nous avons en France une exception que personne au monde ne nous envie, j'ai nommé l'impôt de solidarité sur la fortune — ou ISF —, créé en 1982 par le gouvernement Mauroy et jamais aboli pour des raisons idéologiques, voire électoralistes, que ce soit par la droite ou par la gauche. Sous les pressions conjuguées de Laurent Fabius et de Jack Lang, un certain nombre d'exonérations ont été introduites comme celles sur les œuvres d'art qui ne touchent que les personnes assez fortunées pour en détenir. L'assiette de cet impôt n'est pas le revenu de l'année fiscale mais le patrimoine estimé au premier janvier de l'année. En d'autres termes, il est tout à fait possible de payer plus d'impôt au titre de l'ISF que l'on a de revenus sur une année. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder avec attention les cas de personnes âgées qui ont la malchance de posséder un lopin de terre sur l'Île de Ré ou d'hériter d'un chalet délabré en Savoie tant la pression foncière y est forte (l'Express 12 août 2005).
Il fallait donc faire quelque chose pour éviter d'imposer sur la fortune des contribuables, dont certains ne sont même pas imposables sur le revenu, mais sans abroger l'ISF pour des raisons strictement politiques. La seule solution simple était la création du bouclier fiscal tant décrié. La question n'est pas de savoir quel doit être le taux d'imposition maximal car c'est un faux débat. La véritable question est d'admettre qu'il est inacceptable de recouvrer un quelconque impôt sur une estimation de patrimoine indépendamment de tout revenu. Payer un impôt sur le revenu signifie déjà qu'on a gagné quelque chose. Les taxes d'habitations ou taxes foncières sont acceptables. Mais payer l'ISF lorsqu'on est agriculteur à la retraite, qu'on touche une pension de misère, sous prétexte qu'un verger de l'Île de Ré est devenu constructible est parfaitement anormal.
Bizarrement, cela ne semble gêner personne. En tout cas, cela ne semble pas poser problème à la gauche qui s'égosille actuellement pour l'abrogation du bouclier fiscal. Personnellement, je ne suis pas contre cette abrogation, mais il faudrait aussi abroger l'ISF qui est un impôt pour le coup injuste fiscalement et contre-productif et je ne suis vraiment pas convaincu que le gouvernement actuel ou le prochain en ait le courage.
On n'a vraiment que les hommes politiques qu'on mérite.
Salut JKB,
Sans prendre part au débat sur le fond, je te signale simplement une inexactitude : l’ISF n’a pas été créé en 82, mais en 89. En 82, c’était l’impôt sur les grandes fortunes (IGF).
Les deux fonctionnent globalement selon les mêmes principes, mais le premier a bel et bien été aboli en 87 par le gouvernement de Jacques Chirac.
Ce qui lui a sans doute coûté assez cher politiquement lors de la présidentielle de 88, mais c’est une autre histoire.
C’est parfaitement exact. C’était un simple abus de langage de ma part pour ne pas délayer le propos.