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Comptes de la CNAMTS

14.12.14 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les politiciens, Déclaration de guerre

Un ami qui vous veut du mal m'a sournoisement envoyé les comptes de la CNAMTS pour l'exercice 2013. Je parle bien d'un ami qui vous veut du mal parce qu'à la lecture des lignes qui suivent, vous allez perdre vos dernières illusions sur la sécurité sociale française, la meilleur du monde mais qu'aucun autre pays ne veut bizarrement chez lui. La CNAMTS, vous ne le savez sans doute pas, est la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés. Il s'agit d'un établissement public national à caractère administratif, jouissant de la personnalité juridique et de l'autonomie financière qui est soumis à une double tutelle : celle du ministère chargé de la sécurité sociale et celle du ministère de l'économie et des finances. Il ne s'agit donc pas d'une petite caisse marginale, mais sans nul doute de l'une des caisses les plus importantes de France.

Ceci étant dit, ouvrons ce document tout à fait intéressant.

Les choses appréciables commence à la page 10. Les numéros de page utilisés dans cet article correspondent aux numéros depuis le début du document et non aux numéros indiqués au bas des pages.

Donc, page 10 commence la présentation simplifiée du bilan. J'y apprends :

  • des constructions pour 205 millions d'euros dont 115 millions d'amortissement et de dépréciation sur ces constructions. Il est assez étrange d'amortir ou de déprécier aussi rapidement des constructions. Ces immobilisations corporelles étant des bâtiments, ils doivent être entretenus et il devrait y avoir une ligne correspondant à cette dépréciation en dotation ;
  • 215 millions d'euros pour des immobilisations diverses, elles aussi amorties à la hussarde, et correspondant tout de même à la moitié des immobilisations corporelles ;
  • des capitaux propres à hauteur de -12,1 millards d'euros. Comment les capitaux propres de ce machin peuvent-ils être négatifs ? À la fin de l'exercice 2012, ils n'étaient que de -6 milliards d'euros ;
  • les provisions pour risques techniques sont de 2,7 milliards d'euros, soit tout de même un tiers de la perte des capitaux propres constatés sur l'exercice 2013 ;
  • les autres dettes s'élèvent à 32,8 milliards d'euros dont l'immense majorité provient des organismes et autres régimes de sécurité sociale ;
  • 72,5 millions d'euros ont été acquittés en impôts sur les bénéfices et assimilés, ce qui est assez intéressant en soi pour un tel organisme.

Si j'osais présenter un tel bilan, je pense que cela se passerait très mal pour mon expert-comptable et pour moi. Et encore, vous n'avez rien vu puisque nous n'avons fait qu'évoquer les grandes lignes de ce bilan. Le diable étant de les détails, allons saluer ce diable.

Page 16, les charges de personnel sont de 726 millions d'euros. Juste une fois et demi plus importantes que les charges externes. Cela semblerait raisonnable si les charges d'exploitation n'était pas de 6,7 milliards d'euros. À peine plus que le résultat déficitaire de l'exercice (6,1 milliards d'euros).

Mais arrêtons de disserter sur les chiffres. Un lecteur attentif pourra lire ce document et s'en faire une idée bien plus précise. Concentrons-nous sur les annexes.

J'apprends page 28 que les comptes annuels sont établis conformément aux règles comptables applicables en France aux organismes de sécurité sociale. Je comprends donc pourquoi le bilan comptable me fait légèrement tiquer. Il s'agit donc d'un bilan concocté par un plan comptable spécifique pour cacher des choses sous le tapis. Page 42, je comprends la subtilité des provisions pour charges techniques. En comptabilité générale, j'aurais tendance à appeler cela des provisions pour créances douteuses. Visiblement, pour la sécurité sociale, c'est un peu différent car les créances douteuses sont définies page 46. Rappelez-moi d'aller lire attentivement la note n° 17.

Page 48 se trouve un tableau des taux d'amortissement. Pas une seule durée d'amortissement n'est inférieure à trois ans. Dans ce cas, comment justifier les taux d'amortissement présentés au début du document ? Page 50, je constate un paragraphe sur les médailles du travail des salariés de la CNAMTS et leurs indemnités de départ en retraite. Sans commentaire. Cela irait encore si ce machin était excédentaire.

Page 50, enfin, sont évoquées les règles propres à l'organisme:

Les opérations comptables sont structurées par la mise en œuvre d'une comptabilité de gestion. L'objectif est de suivre certains domaines couverts par la branche, afin de mieux éclairer les résultats. Cette comptabilité par gestion correspond dans une certaine mesure à une comptabilité analytique.

J'aime assez. Le lecteur est sans doute trop bête pour que la CNAMTS utilise une comptabilié analytique. Ne pas l'utiliser permet aussi de cacher des choses sous le tapis plus facilement. Plusieurs questions : pourquoi certains domaines et surtout que signifie une certaine mesure ?

Page 70, j'apprends qu'une partie de la dette va être refilée à la CADES. Mais une partie seulement. Qui va donc renflouer le reste du Titanic ? Page 73 se trouve la liste des nouvelles immobilisations corporelles. C'est intéressant.

À partir de la page 130 figurent les engagement hors bilan. C'est assez facile et cela vaut franchement le détour. Un tableau récapitulatif résume la situation page 136.

Ce bilan comptable ne tient pas la route et n'importe quelle entreprise devrait immédiatement se déclarer en état de cessation des paiements. Des pirouettes permettent de s'en tirer en déclarant que les dettes sont ne grande partie des comptes courant d'organismes d'état débiteurs et autres absurdités comptables. Cela fait encore illusion.

Pour combien de temps encore ?

 

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