« Qui sème le vent... | La filocherie du jour » |
Pour un vivrensemble toujours plus convivial et festif, un rapport a été remis mardi aux ministres de l'éducation nationale et du travail. Ce rapport propose de créer un statut pour les parents élus délégués dans l'établissement scolaire de leur enfant. À la lecture du rapport, ce nouveau statut pourrait s'inspirer de celui des délégués du personnel.
Reprenons donc. Il faudrait dans notre beau pays, ou dans ce qu'il en reste, créer un statut particulier pour les parents d'élèves qui s'engagent bénévolement et volontairement, pour représenter les autres parents dans les conseils de classe, les conseils d'administration et autre comité rigolos et festifs émanant de l'éducation nationale. Et pour faire bonne mesure et répondre à la lancinante revendication de certaines fédérations de parents d'élèves comme la FCPE et la PEEP, un rapport a été demandé et ce rapport a été remis en grande pompe, parce qu'il faut au moins cela à Najat Vallaud-Belkacem, ministre de la médiocrité l'éducation nationale et Myriam El Khomri, ministre du chômage travail.
Pour faire bonne mesure encore, le ministre de l'éducation nationale a présenté ce rapport (merci de ne pas me signaler que j'ai écrit le ministre, une fonction ne s'accorde pas, et si une ministre existe bien dans le dictionnaire, il s'agit d'une prostituée.). Elle distingue deux types d'élus. Les premiers sont des délégués élus chaque année dans les écoles, les collèges et les lycées publics et qui consacrent quelques annuellement à leur engagement. Cet engagement pourrait être grandement facilité par une meilleure organisation dans les établissements. S'il n'est pas toujours évident pour des délégués de se libérer à 17h00 pour un conseil de discipline, il ne va pas être évident, mais alors pas vraiment, d'accorder les horaires d'un artisan chauffagiste, d'un employé de bureau et d'une infirmière de nuit et je ne vois pas vraiment bien ce qu'une meilleure organisation dans les établissements pourra changer. Parfaitement consciente de cela, le ministre a plaidé pour des réunions à des heures compatibles avec leur activité professionnelle (sic), précisant à l'attention de son auditoire médusé par tant d'intelligence que des textes existent, qu'ils ne sont pas toujours respectés et qu'ils pourraient être renforcés (resic). Il est certain que de nouveaux textes de loi s'imposent.
Par ailleurs, les associations de parents d'élèves constatent chaque année un défaut de volontaires dans certains établissements, notamment dans le secondaire. Jamais ces associations ne se demandent si le problème ne viendrait pas d'elles. Non, le problème est toujours extérieur et les parents élus rescapés doivent asister à plusieurs conseils de classe par trimestre là où une certaine tradition séculaire voulait que chaque parent délégué n'intervienne que dans une seule classe.
Mon esprit chagrin me souffle que ces parents sont volontaires. Personne ne les a poussés et c'est en tout connaissance de cause qu'ils se sont engagés et je ne vois pas en vertu de quoi les plaindre. Après tout, si leur mandat leur pose un problème, il peuvent toujours démissionner.
Mais ce n'est pas tout. Lorsqu'il y a une bêtise à faire, le gouvernement n'est pas loin. En effet, le ministre a aussi évoqué les 907 élus aux instances départementales, académiques et nationales qui auraient besoin d'une semaine à dix jours par an pour remplir leurs fonctions. Il faut trouver une solution, c'est urgent, pour qu'ils puissent trouver du temps sans que cela ne les pénalise dans leur vie professionnelle. Et, rajoute-t-elle, il faut que cette solution soit acceptable pour les partenaires sociaux.
Partenaires sociaux… Rien que l'expression me met de mauvaise humeur ! Gageons encore que les discussions à venir vont accoucher d'un accord complètement tarte sous prétexte de vivrensemble sirupeux d'autant que ce fumeux rapport coécrit par l'ancien ministre de la ville Fadela Amara, recasée inspectrice générale des affaires sociales, et Christine Gavini-Chevet, inspectrice générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, propose quatre scénarii plus ou moins coûteux pour l'état. Comme ils sont coûteux et que nous avons plein d'argent public à dépenser, ces scénarii ont maintenant été étudiés. Accrochez-vous bien, ou accrochez-vous mieux pour ceux qui seraient déjà assis !
Parmi les scénarii proposés figure celui d'un statut calqué sur celui de l'élu local pour les 907 élus en question. Le coût est évalué de 2,6 à 32 millions d'euros pour l'état. Notez bien la fourchette, preuve que le travail préliminaire au rapport aura été parfaitement et rondement mené. Mais comme nous sommes en faillite et que l'état n'a plus un centime dans ses caisses, même l'hypothèse basse est inenvisageable. Dans ce cas, les deux rapporteurs imaginent un autre statut qui permettrait aux parents délégués d'être autorisés à s'absenter, pendant leur temps de travail, pour les réunions liées à leur mandat, tout engardant leur salaire qui resterait versé par leur entreprise sans aucune prise en charge. Les organisations patronales sont, on s'en doute, contre cette mesure. Comment les en blâmer ?
Mais en France, il faut toujours imposer de bonnes idées, surtout lorsqu'elles sont totalement idiotes. Ainsi, j'apprends que des discussions vont maintenant démarrer avec les partenaires sociaux, en vue d'annonces mi-décembre et de premières mesures applicables à la rentrée 2016. Et comme cela ne suffit pas, la valorisation des engagements de ces parents investis dans la vie de « leur établissement scolaire » pourrait aussi être prise en compte dans une loi que présentera Myriam El Khomri début 2016.
À cet instant d'un aussi brillant exposé, un doute m'assaille. Un salarié sera défrayé par son employeur des heures passées à l'exécution de son mandat. Mais pour un indépendant, un artisan ou un commerçant, que faudra-t-il faire ? Devra-t-il compenser lui-même le chiffre d'affaire perdu ? La question mérite d'être posée et je ne vois dans ce rapport aucune réponse. De là à dire qu'on veut discriminer une fois de plus les indépendants pour qu'ils n'aillent surtout pas donner de mauvaises idées au monde enseignant, il y a un pas que je franchis d'un pas leste.