Tu seras un prêtre mon fils

08.08.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit, Je hais les tradis, Haines ordinaires

Aïe, aïe, aïe, aïe, aïe… Nouvelle expérience ratée…

L'un de mes beaux-frères fait — en dehors de moi bien entendu, mais je suis irrécupérable et hors concours — sérieusement baisser les statistiques du taux de natalité familial. Je n'ai jamais abordé le sujet parce que c'est un sujet qui fâche et qui fâche d'autant plus qu'il ne semble pas vraiment apprécier de n'avoir que des filles.

Je n'ai pas eu à aborder le sujet car il est venu sur un plateau. Un jour où mes oreilles traînaient, quelle ne fut pas ma surprise d'entendre qu'il ne s'arrêtera qu'à partir du moment où il aura un fils pour qu'il devienne prêtre, prêtre traditionaliste s'entend. Cette réflexion explique peut-être la baisse de la natalité de cette branche puisque, le connaissant, je serais assez étonné qu'il ait demandé son avis à sa femme. Il me semble qu'elle est pourtant un peu concernée. Pourtant, au vu de l'éducation lamentable de ses enfants, il n'est pas vraiment nécessaire d'en rajouter au tableau.

Je trouve aberrant dans la société actuelle de prétendre occuper une place sociale en fonction du nombre de ses enfants. C'est pourtant ce qui se passe dans un certain milieu. En effet, il n'est pas tout de les faire, il faut leur donner une situation. Comme le disais si bien mon penseur préféré, José Artur, un enfant, c'est vingt minutes de plaisir, neuf mois d'attente et vingt ans d'emmerdes.

Je trouve encore plus absurde, sous prétexte qu'on ne pourra payer des étude à tous ses enfants, d'en orienter sciemment vers les ordres ou de négliger leur éducation car ce sont des filles. Voire de pousser aussi les filles vers la porte des couvents comme cela semble être le cas.

Mais ce n'est rien à côté de la réflexion initiale. Comment peut-on annoncer fièrement qu'on ne s'arrêtera d'avoir des enfants qu'à partir du moment où on aura un garçon ? Comment peut-on rajouter en plus qu'il devra être prêtre ? Son garçon, si un jour il en a un, aura ou n'aura pas la vocation pour devenir prêtre. Le forcer à endosser la soutane du prêtre traditionaliste n'est certainement pas la meilleure chose à faire.

À ce tarif-là, on ne peut plus parler de foi. Il s'agit au mieux d'endoctrinement, au pire d'une incommensurable et crasse bêtise. Que des gens qui défilent contre les avortements en se déclarant « pro vie » parce que l'embryon humain est une vie en devenir, donc une personne qui devrait avoir une certaine liberté ou un certain libre arbitre, soient capables de refuser a priori à cette personne le choix d'être ou de ne pas être prêtre me dépasse. Plus exactement, cela me sidère. Ils n'en sont certainement plus à une contradiction près.

Ne perdons jamais de vue que la doctrine à géométrie variable est la ligne de pensée la plus facile à suivre.

 

Un café, l'addition

07.08.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit, Je hais l'informatique, Vieux con, Matheux pervers

Lorsque j'ai commencé à travailler avec des outils informatiques, j'avais à ma disposition un panneau de clefs, une perforatrice en code 29 et un télétype de Digital. À chaque erreur dans un programme, il n'y avait aucune façon simple de la corriger. Si ce n'était pas trop compliqué à faire, j'avais à ma disposition un rouleau de scotch opaque et une pince à tiercé, mais dans la plupart des cas, il fallait repasser par l'étape performation des cartes. Autant vous dire qu'à l'époque, on faisait attention à ce qu'on écrivait car entre l'édition, la compilation et l'exécution d'un programme, il pouvait se passer plusieurs heures et il fallait recommencer tout le cycle à chaque correction.

Fig. 1 : authentique carte perforée à 80 colonnes en code IBM à 12 lignes

J'ai utilisé des cartes perforées à quatre-vingts colonnes jusqu'en 1997, ayant même écrit un pilote pour utiliser une perforatrice en code 29 depuis une SparcStation 20 tournant sous Solaris 2.5.1. Le simple fait de pouvoir utiliser un vrai éditeur (vi), un compilateur Fortran (gcc 2.7.2.1 et le g77 correspondant) et un debugger (gdb/ddd) avant de perforer les cartes a été un progrès indéniable. Il ne restait plus que le coup de marqueur à mettre en biais sur la tranche de la pile de cartes. Pour ceux qui n'ont jamais travaillé avec des cartes, ce trait de marqueur permet de trier assez rapidement un monceau de cartes lorsqu'on s'est pris les pieds dans un câble et que l'ensemble d'un classeur de carte gît en vrac sur le sol de la salle machine. Pour être sûr que le périphérique de sortie donnerait un résultat lisible, j'avais même poussé le vice à écrire un pilote pour un télétype DecWriter II.

Fig. 2 : authentique télétype DecWriter II

L'apparition des éditeurs modernes (LSE ou EVE sous VMS/OpenVMS, vi sous Unix), la multiplication des langages de programmation et l'augmentation de la puissance des machines ont profondément transformé le rapport qu'un développeur peut avoir avec ses programmes en réduisant le temps nécessaire à l'édition.

Dans les années 80, je voyais essentiellement des programmes écrits en Cobol ou Fortran 66 ou 77 sur des cartes ou des rubans, ou à l'aide d'éditeurs orientés lignes qui n'étaient guère plus pratiques que les perforatrices. Je pense en particulier à l'éditeur EDIT.CMD de Flex9/UniFLEX. Ceux d'entre vous qui ont eu l'immense joie d'écrire du code Fortran pour Flex9 comprendront aisément ce que je veux dire. Les premiers micro-ordinateurs proposaient des éditeurs Basic un peu moins rébarbatifs mais pas beaucoup plus pratiques.

La mode du C apparaît au début des années 90. Avant cette époque, la puissance limitée des machines rendait obligatoire l'utilisation d'un langage adapté au problème à coder, essentiellement parce qu'il fallait que le programme soit compact donc que la majorité des opérations effectuées soient disponibles dans des fonctions intrinsèques au langage employé. Il était illusoire de surcharger la mémoire par des bibliothèques inutiles sous peine d'obtenir un laconique « out of memory error ». La plupart des développeurs ont néanmoins adhéré à cette mode du C en partant du principe que ce langage était capable de résoudre tous leurs problèmes. C'est une grave erreur. Le C a été écrit pour développer des systèmes d'exploitation et non pour un usage générique. Il est ainsi très difficile d'écrire un code propre en C et le C de référence à l'époque, le Kernighan et Ritchie, n'était absolument pas adapté aux calculs complexes. Lorsqu'on rajoute que le C est directement issu du slogan « il est interdit d'interdire », on se demande même pourquoi des non spécialistes ont utilisé ce langage pour autre chose que de la programmation système.

Par la suite, les utilisateurs ont pris conscience des limites du C K&R et ont spécifié un C ANSI subtilement différent du C K&R (voir les joyeusetés concernant les passages de paramètres sous forme d'int qui attrapent tous les débutants et moins débutants), puis un C++, version objet d'un C jugé trop impératif.

Aujourd'hui, l'immense majorité des développeurs ne jure plus que par Java. Java va résoudre tous leurs problèmes. Grâce à Java, le développeur moderne deviendra riche, sera musclé et sa femme va revenir. Euh, non, ça, c'est pour le marabout qui laisse des papiers à la sortie du métro, mais l'idée est en gros la même.

Je ne veux pas parler de la syntaxe du langage même s'il est évident qu'il y aurait beaucoup à dire. Personnellement, j'ai toujours préféré un langage impératif ou fonctionnel à un langage objet parce l'abstraction de la programmation objet est tellement grande qu'on ne sait plus exactement ce qu'on fait. Écrire un algorithme dans un langage objet est relativement facile. Pire, c'est à la portée de n'importe qui. En revanche, l'optimiser est beaucoup plus ardu. La conséquence immédiate est une débauche de ressources, tant du point de vue de l'occupation de la mémoire que de celle du processeur.

Je ne veux pas parler non plus de la machine virtuelle Java qui me semble être une aberration technique sans nom. Je n'arriverai jamais à comprendre pourquoi on compile un programme Java dans un format binaire intermédiaire pour l'exécuter dans une machine virtuelle. On me dira que c'est pour des raisons de portabilité, mais l'argument ne tient pas puisqu'il faut porter la machine virtuelle, ce qui n'est pas plus simple. Autant porter directement un compilateur s'appuyant sur des API fixes comme POSIX ou utiliser une bibliothèque d'abstraction. On sait faire cela depuis longtemps sans aucun problème. Ceux qui ne me croient pas peuvent regarder l'antique bibliothèque porting library et en particulier les jackets des anciennes version de VMS qui permettaient d'utiliser un code POSIX sur un système qui ne l'était pas encore.

Dans un premier temps, je trouve que Java, contrairement à ce qui est trop souvent dit, n'est pas un langage discriminant. En d'autres termes, il ne permet pas de séparer un bon programmeur d'un mauvais. Trop de choses sont à la discrétion de la machine virtuelle qui ne s'en prive pas comme la gestion de la mémoire et les différentes ressources du calculateur, et la conséquence immédiate est que n'importe quel développeur du dimanche peut écrire des applications complexes, souvent jetables parce que leurs codes sources ne sont pas réutilisables, sans comprendre exactement ce que son ordinateur fera. Il est très facile d'écrire un programme de quelques lignes demandant plusieurs centaines de mégaoctets pour effectuer une tâche basique et tout le monde est content.

Java ne parle jamais de pointeur ni de récursion. C'est trop complexe et il faut masquer ces deux notions importantes au programmeur. Pire, le programmeur ne doit même pas savoir que cela existe. On ne peut pas prétendre écrire un bout de programme sérieux en C sans parler de pointeur ; en Java, si. Or les pointeurs sont partout, même s'ils sont plus ou moins masqués dans des objets Java comme des listes chaînées, des tables de hashage et j'en passe.

Les heureux développeurs qui ont fait leurs armes dans les écoles suivant la mode Java n'ont jamais eu à se dépêtrer dans des fichiers core de plusieurs megaoctets, avec la seule aide d'une calculette hexadécimale, lorsqu'il s'agit de déboguer des algorithmes efficaces de gestion de la mémoire (tables de hashage, allocateurs, ramasse-miettes…) qui se terminent par un laconique message de violation d'accès. Pire, ils ne savent pas utiliser un debugger et mettent au point leurs programmes à grands coups de System.out.println(). C'est tellement pratique… De la même manière, ils n'ont jamais été confrontés à la programmation multithreadée et aux problèmes de concurrences même si le langage Java permet de définir des threads.

Je veux bien admettre que la programmation à l'aide de pointeurs ne soit pas nécessaire dans les trois quarts des programmes écrits aujourd'hui. Pire, je suis conscient que les pointeurs sont dangereux si on les laisse dans les mains de développeurs qui n'ont pas les idées claires et que la programmation fonctionnelle n'est que très peu utilisée en pratique.

Mais il reste le dernier quart, certainement le plus intéressant. Sans connaître ni maîtriser les pointeurs, il est illusoire de travailler sur un programme efficace ou un noyau de système d'exploitation. Il ne faut même pas espérer en comprendre le fonctionnement.

Sans comprendre la programmation fonctionnelle ou multithreadée, il est impossible d'écrire des algorithmes à la fois massivement parallèles et efficaces. Certes, Java dans certains cas arrive à utiliser des threads, mais ils restent dans une machine virtuelle. Ce n'est pas exactement une parallélisation de calculs.

Vous allez me dire que ce n'est valable que pour un quart des programmes. Certainement, mais ce n'est pas négligeable pour autant. Personnellement, en réécrivant la routine A* de la bibliothèque bien connue BOOST en C et Fortran, j'ai divisé par vingt le temps d'exécution de cette routine et divisé par dix la mémoire nécessaire à son exécution. Et BOOST n'est écrit qu'en C++, même pas en Java. Je n'ose imaginer ce qu'il en aurait été.

Rien n'est fait dans les formations Java pour apprendre aux étudiants à penser autrement que dans le paradigme Java. Ils n'arrivent pas à implanter un simple tri de liste chaînée. En revanche, ils sont capables d'assembler des tas de boîtes noires qui font la même chose mais dans une débauche de ressources tout à fait remarquable et qui ferait pleurer n'importe qui ayant travaillé sur des machines dont la mémoire vive était limitée à quelques malheureux kilooctets.

J'ai beaucoup de mal à imaginer que de tels développeurs deviennent un jour de véritables programmeurs. On me rétorquera que les écoles n'enseignent que ce que l'industrie demande, donc Java. Certainement, mais il ne faut pas oublier qu'il faudra toujours des artistes sachant utiliser des pointeurs et connaissant la programmation fonctionnelle ou la récursivité pour que ces développeurs aux petits pieds puissent coder leurs applications jetables. Il faudra toujours des gens capables d'écrire des systèmes d'exploitation ou des machines virtuelles, et ces développeurs Java en seront incapables.

Pire, ces formations orientées vers la programmation objet prétendent toutes simplifier la programmation par l'abstraction des différentes opérations dans des méthodes, des objets, des trucs et des bidules. Mais est-ce plus facile de réécrire une n-ième fois un arbre de hiérarchie d'objets ou d'utiliser une programmation fonctionnelle ? Personnellement, je ne suis pas sûr que la programmation objet soit aussi efficace qu'on le prétend dès qu'on parle de projets importants et complexes. Reprendre la définition d'objets lorsqu'ils sont manifestement inadaptés est quasiment impossible. Il vaut mieux jeter le code et le réécrire totalement.

Bref, je suis de plus en plus enclin à penser que la programmation objet n'a qu'un seul but : fournir des tas de programmeurs. Comme ces programmeurs seraient médiocres s'il fallait leur inculquer des concepts comme la programmation fonctionnelle ou les pointeurs, on préfère cacher leur médiocrité crasse dans la programmation objet où il est beaucoup plus difficile d'être mauvais. On privilégie la quantité à la qualité en changeant le paradigme et en comptant sur le fait que dans la plupart des cas, ça devrait passer. Effectivement, dans la plupart des cas, ça passe. Sauf de temps en temps où l'on fait un feu d'artifice à plusieurs millions de francs en faisant exploser une Fusée Ariane 5…

Vous me direz qu'en C, lorsqu'on a une erreur comme une violation d'accès, il est très souvent difficile d'en trouver la source. C'était vrai il y a quelques années. Aujourd'hui, il existe un nombre d'outils conséquent pour déverminer tous les accès fautifs à la mémoire, que ce soit en lecture ou en écriture, avant que le programme s'arrête sur une violation d'accès.

La conséquence de tout ça, c'est qu'un bon programmeur parlant C, Fortran, Ada, Scheme ou Haskell dans le texte arrivera à se mettre à Java en quelques jours et à écrire de bien meilleurs programmes qu'un développeur ayant cinq ans de pratique quotidienne de Java et ne connaissant que cela. La réciproque est fausse.

L'avenir n'est pas rose. Les hordes de développeurs Java écrivent actuellement du code non maintenable, ignoble, jetable, mais rapidement. La durée d'écriture d'une application est de plus en plus courte, ce qui nuit à sa qualité, mais cela ne semble encore gêner personne. Lorsque tous les dinosaures avec des écailles — ndlr. le dinosaure avec des écailles est l'ancêtre du geek — auront disparu, il ne restera plus que cette génération de sagouins qui n'aura plus les compétences requises à l'écriture de programmes efficaces.

À cet instant, on peut faire un parallèle avec la NASA. La NASA veut aujourd'hui envoyer à nouveau des hommes sur la lune et elle a annoncé qu'il lui faudra un certain nombre d'années pour y arriver. Je ne sais pas si vous avez déjà réfléchi au fait que l'ayant fait plusieurs fois entre 1969 et 1974, elle devrait pouvoir atteindre son but très facilement. Il y a juste un problème : toutes les compétences qui avaient permis à envoyer un homme sur la lune avec la puissance de calcul d'une calculatrice de poche actuelle ont disparu et il faut réinventer la roue.

La même situation risque de se produire à moyen terme dans le domaine de l'informatique. Après le café, il faudra régler l'addition et cette addition risque d'être salée.

 

Je hais les touristes

06.08.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur

J'ai conscience d'acheter mes chemises chez Marks & Spencer et d'apprécier les vestes croisées, mais ce n'est pas pour cela que le touriste de base doit me confondre avec quelqu'un parlant volontiers anglais ou, pire, avec un panneau indicateur. Il paraît que j'ai un physique qui pourrait me faire passer pour anglais, mais de là à me confondre avec un panneau indicateur, il y a un pas que je trouve assez difficile à franchir.

Concernant l'anglais, je ne le parle que contraint et forcé. Je vous promets de me mettre sérieusement à l'anglais lorsque j'aurai fini mon apprentissage du français. De toute façon, ce n'est pas bien grave, j'arrive à me débrouiller dans la langue de Shakespeare bien mieux que la plupart des anglais dans celle de Molière et je répondrai aux touristes perdus dans la capitale dans leur langue maternelle ou en anglais le jour où ils arriveront à me demander autre chose que

Plîse ? Ouhère are ze tchahmpse zilaïsis ?

J'ai trop peur qu'on les retrouve huit jours après à la Bourboule et qu'ils donnent en sanglotant aux autorités le signalement d'un sadique qui opérait à la gare du Nord. J'avoue n'avoir aucune envie de filer en Suisse et d'y attendre quelques années que cette histoire soit oubliée.

J'ai travaillé dans un certains nombre de pays dont des pays fermés totalement aux touristes et les gens de ces pays n'imaginent pas leur bonheur. Je hais les touristes ! Ils se croient chez eux alors qu'ils sont chez nous ! Le touriste en ville est comme le pigeon : c'est un parasite ! Je rêve d'un Paris sans touristes et sans pigeons. Le bonheur… Personne au mois d'août pour nous pousser dans les wagons bondés du métro… Personne pour nous demander le chemin de la tour Eiffel depuis le Trocadéro… Pour les provinciaux, depuis le Trocadéro, il faut être aveugle ou touriste pour ne pas voir la tour Eiffel qui est plantée juste de l'autre côté de la Seine. Elle doit être trop petite.

Et encore, il faut distinguer les touristes selon leurs origines :

  • l'allemand rêve de défiler au pas de l'oie sur les Champs Élysées, un atavisme à surveiller sans doute, et se comporte en pays conquis ;
  • l'anglais part du principe que tout le monde doit parler sa langue et ne fera aucun effort pour essayer d'en parler une autre sous prétexte qu'il y a des générations d'anglais avant lui et depuis la guerre de cent ans qui nous ont obligé à parler leur langue parce qu'ils avaient la paresse d'apprendre la nôtre ;
  • l'irlandais termine aviné — ce qui est une performance à la bière tiède — au pub de la rue François Miron ;
  • l'italien, ah l'italien… J'ai entendu un guide arborant des autocollants d'une agence de voyage napolitaine mettre en garde son groupe à la station Palais royal–Musée du Louvre contre les pick-pockets qui sont susceptibles d'agir dans ladite station et de les voler. Si ça, ce n'est pas l'hôpital qui se fout de la charité !
  • le japonais ne visite pas Paris, il fait un marathon. Il doit avoir tout vu, y compris les grands magasins, en 48 heures chrono et ne doit surtout pas perdre de temps à attendre une rame de métro… Il monte d'ailleurs à l'assaut d'une rame comme il allait à l'assaut de Pearl-Harbour… Je ne sais pas si vous voyez bien ce que je veux dire. C'est un spectacle assez amusant, sauf lorsqu'on est déjà dans la rame et qu'un groupe important de japonais se tient sur le quai, prêt à pousser tout le monde pour y entrer ;
  • le français se croit partout chez lui — c'est tout de même un peu plus légitime que tous les autres —, a tout vu et croit tout connaître sauf les poubelles de la ville de Paris qu'il ne trouve jamais. On suit sans peine son parcours en suivant les papiers gras qu'il laisse derrière lui. Parfois, j'ai honte d'être français.

On dit que le parisien est râleur et n'accueille pas bien le touriste, mais c'est faux ! C'est le touriste à Paris qui se comporte n'importe comment. Au bout d'un certain temps, ça fatigue.

 

Fétichisme maniaque

05.08.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit, Je hais l'informatique, Vieux con, Je hais les écolos

Il paraît que les tablettes électroniques sont bonnes pour l'environnement. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre lorsqu'on sait que quatre-vingt pourcents des composants de ces bijoux de technologie sont issus de sources primaires et qu'ils ne se recyclent que très mal — ou que leur recyclage est dispendieux en énergie, ce qui revient pratiquement au même.

Ces tablettes sont, paraît-il, écologiques parce qu'elles évitent l'abattage d'arbres pour fabriquer du papier. C'est un fait indéniable, le papier est issu du bois donc des forêts. Mais d'où provient donc l'énergie nécessaire au fonctionnement de la tablette ? Je n'ai encore jamais vu un tel gadget muni de panneaux solaires, encore qu'il faudrait discuter du rendement total du panneau solaire, construction et destruction comprises. Combien de livres peut-on lire avec un tel engin avant qu'il ne tombe en panne ? Combien de jeux de piles ou d'accumulateurs aura-t-il consommé ? On ne parle jamais du taux de panne de ces bidules ni de leur consommation, encore moins des lunettes de leurs sympathisants. Personnellement, je n'ai encore jamais vu un livre, même très ancien, tomber en panne. J'entends déjà les esprits forts me signaler qu'ils peuvent être dévorés par les vers. Peut-être, mais l'électronique n'aime pas l'humidité non plus et si elle n'est pas dévorée par les vers, elle s'oxyde et moisit, ce qui fait qu'au final, le résultat est le même.

Par ailleurs, l'argument du nombre d'arbres abattus me semble particulièrement spécieux. Je reçois des volumes énormes de publicité dans mes boîtes aux lettres, que ce soit à Paris ou au fin fond de la campagne, et j'aimerais savoir, au regard de la consommation de livres moyenne annuelle par habitant, quelle fraction de la consommation annuelle de papier la publicité utilise. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression que cette fraction n'est pas vraiment négligeable. Les mêmes esprits forts me diront que la publicité est faite sur du papier recyclé. Certes, mais je les mets au défi de reconnaître un papier recyclé correctement d'un papier neuf.

Les marchands de soupe à la tête desquels se situe Apple, la petite pomme qui fabriquerait des machines à laver si le fait d'avoir une pomme sur une machine à laver faisait vendre, et qui essaient de nous refiler malgré nous ces tablettes électroniques indispensables nous affirment péremptoirement que le livre est mort, déjà enterré et que pour être un homme moderne, il faut absolument avoir une tablette tactile pour lire. Je n'ai pas encore vu le faire-part annonçant la mort du livre.

Et si je n'en veux pas, de ces trucs électroniques ? Et si j'étais un fétichiste maniaque et tellement pervers qui collectionnait les bouquins ? J'aurais l'air bête avec des disques durs sur mes étagères ou des cartes mémoires qui ne seront peut-être pas compatibles avec la prochaine tablette parce qu'il faut bien faire marcher le commerce. Avec des livres contre les murs, on peut isoler phoniquement et thermiquement un appartement. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé d'isoler un appartement avec des cartes mémoire… Je vois d'ici le tableau.

Sérieusement, arrivez-vous à imaginer les bibliothèques et les librairies d'un monde où la tablette électronique a remplacé le livre ? La relation avec un livre est charnelle — je vous ai déjà dit que j'étais pervers — : l'odeur du papier et de l'encre, le toucher du vélin et de la reliure ne sont pas étrangers à l'amour des livres. Je n'ai encore jamais vu quelqu'un sentir une tablette ou en caresser une et je crois que le jour où je verrai ça, je désespérerai encore plus de mes frères humains.

 

La culture sur France Inter

04.08.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur

Remarque liminaire : cet article a été écrit dans la foulée d'une émission passant sur France Inter le 4 août 2010. J'ai été induit en erreur par le présentateur et ai attribué à l'un des invité les mots du second. Je réitère mes plus plates excuses à Monsieur Albert Ben Loulou qui n'était pas responsable de la sentence qui m'a fait bondir. Le nom du coupable est cité dans les réponses à ce papier.

À ce propos, j'ai particulièrement apprécié le dialogue avec Monsieur Ben Loulou qui m'a aimablement signalé mon erreur. Ce n'était pas le cas d'un autre contributeur qui aurait pu tout autant me corriger. Voici l'extrait de l'émission en question.




Pour des raisons d'honnêteté et pour que les réponses à ce papier restent compréhensibles, je n'ai pas touché un mot de l'article initial que voici.

Je viens d'apprendre que Georges Simenon a passé la seconde guerre mondiale caché aux États-Unis. C'était dans l'émission Microfictions d'Ali Rebeihi, le mardi 3 août 2010, vers 20h30 sur France Inter et le responsable était Albert Ben Loulou, ami de Frédéric Dard.

L'émission portait sur Frédéric Dard, autant dire qu'il s'agissait d'un marronnier de l'été et que dans ce cas précis, un ami de l'auteur était le bienvenu. Mais un ami n'est pas un spécialiste. Ce spécialiste auto-proclamé de Frédéric Dard en particulier et de la littérature française en générale en est arrivé on ne sait comment à parler de Georges Simenon. Je sais bien que tout le monde est en vacances au mois d'août et que les journalistes et animateurs d'émissions de radio sont contraints de faire avec les spécialistes qui restent joignables, mais ce n'est pas une raison pour donner la parole à n'importe qui et surtout de le faire parler de n'importe quoi. Le fait d'avoir été un ami de Frédéric Dard ne fait pas de vous par la grâce des ondes un spécialiste de la littérature française.

Georges Simenon se serait, d'après lui, courageusement caché (sic) aux États-Unis durant la seconde guerre mondiale. Il est vrai qu'il s'est caché, mais plus prosaïquement entre la Vendée et les Charentes-Maritimes où il a failli être pris plusieurs fois parce que son nom ressemblait beaucoup au patronyme à consonnance prétendûment juive Simon. Il n'est parti visiter les États-Unis qu'après la guerre, en 1945. L'auditeur de base, qui n'a aucune raison de connaître la biographie de Simenon, pourrait se méprendre sur l'homme.

Plusieurs choses me dérangent profondément. D'une part, nous avons un journaliste se targant de faire une émission littéraire sans avoir aucune espèce de culture générale et qui glisse de Dard à Simenon tout en réduisant Simenon à Maigret à tel point que je me demande s'il a un jour ouvert un roman de Simenon, et d'autre part, nous avons un individu qui se dit spécialiste de la littérature policière parce qu'il connaissait le père de San Antonio, ce qui est tout de même assez léger, et qui diffame un Simenon qui ne peut même pas répondre pour rétablir la vérité. Aucun de ces deux individus n'a la culture nécessaire pour tenir une émission littéraire mais les deux ont une prétention culturelle à une heure de grande écoute.

Ce n'est pas la première erreur grossière relevée dans les émissions « culturelles » d'Inter depuis quelques mois mais je crois qu'il s'agit de celle qui a fait déborder le vase. Quand Val et sa clique comprendront-ils que lorsqu'on a la prétention de produire des émissions culturelles, il faut être un minimum crédible. Les animateurs qui ont quitté la station récemment avaient pour bon nombre d'entre eux un solide bagage culturel. En tout cas, ils semblaient vérifier leurs sources plus attentivement. Quant aux invités, je ne sais pas si c'est à cause de l'été, mais le niveau baisse sensiblement.

Certes, France Inter n'est pas France Culture, mais ce n'est pas pour cela non plus qu'il faut raconter impunément des bêtises dans le poste. Messieurs Hees et Val, relevez le niveau ou vos auditeurs iront écouter la différence ailleurs.

 

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