Une idée née dans les cerveaux embrumés d'une bande de spécialistes s'appelant pompeusement le Conseil d'Analyse Économique a été évoquée sans faire trop de bruit vers le 15 septembre dernier. Cette mesure risque de ne pas faire plaisir aux propriétaires de leur résidence principale car pour ce CAE, il faudrait faire payer aux propriétaires une taxe sur un loyer fictif qu'ils se versent à eux-mêmes une fois remboursé leur emprunt éventuel.
Alors arrêtons-nous quelques minutes et voyons si j'ai tout bien compris. Vous savez que j'ai une intelligence déficiente et que j'aime assez regarder les choses par le petit bout de la lorgnette. Donc, cette nouvelle taxe, qu'est-ce donc ?
Le propriétaire d'un bien immobilier, quel qu'il soit, a déjà payé ses différents impôts sur les revenus avant de régler ses échéances de remboursement de prêt immobilier. Il a donc déjà été taxé, lourdement taxé. Il a néanmoins fait des sacrifices pour se payer un chez soi qui lui permettra d'être autonome financièrement. Il paie en plus une taxe foncière qui n'arrête pas d'augmenter bien plus que l'inflation. Mais cela ne suffit pas, il faudrait encore qu'il paie une nouvelle taxe concernant un loyer qu'il se payerait à lui-même. Comme cela ne concerne dans un premier temps que les habitations principales, sans doute dort-il sous les ponts virtuellement tandis qu'il touche virtuellement toujours un loyer qui n'est pas moins virtuel. Et pourquoi ne pas rajouter sur ce loyer ficitif une TVA du plus bel effet ? Rien ne m'étonnera plus dans un pays où l'on paie déjà sur sa facture d'électricité une TVA sur des taxes locales.
L'argument ayant conduit à ce pet de l'esprit collectif est d'après Antoine Bozio le suivant :
Le paradoxe, c'est que les revenus de la rente foncière sont moins taxés que l'investissement dans les entreprises. Et ce, alors même que l'immobilier est la seule assiette non délocalisable... Du coup, un Français a plutôt intérêt à vivre de ses rentes immobilières qu'à aider les entreprises à grandir, à investir et à prendre des risques ! Malheureusement, l'accession à la propriété est un argument porteur politiquement. Résultat, les propriétaires de leur résidence principale sont presque exempts de toute imposition, excepté la taxe foncière, dont la valeur n'a toujours pas été révisée et qui ne reflète plus la valeur des biens. Ils sont aussi totalement exonérés sur la plus-value générée lors d'une revente. L'état gaspille en outre de l'argent en dispositifs fiscaux avantageux pour inciter l'investissement locatif et construire des logements, sans que les résultats soient au rendez-vous sur les prix de l'immobilier. Une telle distorsion de la fiscalité en faveur de l'immobilier rend notamment les Français moins mobiles, en dissuadant les propriétaires occupants de déménager pour suivre les évolutions du marché du travail car louer leur logement leur coûte plus cher.
Mettre sur le même plan un placement que quelqu'un fait pour être chez lui et un investissement dans un capital d'entreprise est assez étonnant. Le second est risqué, le premier nettement moins. Pourtant, de la part de nos gouvernants, plus rien ne devrait m'étonner.
Donc, si j'ai bien compris, le grand machin qu'est le CAE recommande donc d'augmenter la fiscalité sur l'immobilier, soit en taxant des loyers imputés, ces loyers fictifs que se versent à eux-mêmes les propriétaires, soit, à défaut, en réactualisant la valeur locative qui détermine la taxe foncière. Je n'ai pas souvenir qu'il ait fallu attendre l'avis du CAE pour que les taxes foncières s'envolent.
Le problème de fond est que notre état est obèse et dispendieux. Il doit aider toutes les victimes de la société que sont dans le désordre :
Il lui faut toujours plus d'argent pour aider ces victimes. Le problème est que 40% de la population française ne paie pas d'impôt sur le revenu donc est exonérée d'une bonne partie des divers impôts et taxes. Et c'est encore les 60% restants qui vont payer pour essayer de remplir ce tonneau des Danaïdes, quitte à ce qu'ils paient plusieurs fois des impôts différents sur les mêmes sommes. Il n'y a pas à dire, l'égalite à la française, c'est beau.
Cette victimisation d'une partie de la société aboutit aussi à une dérive. Elle impose à la fraction de la population payant des impôts des choix de vie dépendant en partie de la fraction de la population qui ne paie pas d'impôts. Vouloir arbitrer par des taxes notre façon de vivre est une grave atteinte à nos libertés individuelles.
En effet, si je fais partie des classes moyennes, je peux choisir de me payer une belle et grande maison avec du terrain, de ne pas partir en vacances et de ne pas consommer des gadgets que je juge totalement inutiles parce que je me suis aménagé un espace de bien être chez moi et que quelques livres et la contemplation du paysage me suffisent. Pourquoi alors devrais-je payer des taxes foncières et d'habitation prohibitives qui m’empêcheraient purement et simplement ce choix de vie avec comme unique prétexte d'aider des gens qui dépensent leur argent à tort et à travers ou qui ne font rien pour sortir de leur situation ?
Parce qu'il faut bien indemniser les victimes de la société. Loin de moi l'idée de prétendre qu'il n'y a pas de personnes à aider, loin de loi l'idée de refuser de voir qu'il y a des détresses à traiter, mais de là à devoir aider 40% de la population, il y a un pas.
Autre exemple : Pourquoi devrais-je payer des taxes pour l'achat de ma résidence principale alors que je dois être de plus en plus mobile pour continuer à travailler et que je ne fais pas de plus-value sur la vente de ma maison ?
Même réponse, il faut toujours plus de recettes pour un état toujours plus dispendieux.
Plus j'y réfléchis, plus je considère que le seul impôt juste, n'en déplaise à nos gouvernants successifs, est l'impôt sur les revenus, sur tous les revenus, avec une première tranche symbolique dès le premier euro. J'y ajoute la TVA, mais en la modulant sérieusement. Très élevée pour les produits de luxe et symbolique sur les produits de première nécessité. Tous les autres impôts sans exception doivent être abolis parce que consistant à taxer des biens qui n'ont été achetés que par la fraction restante des revenus déjà taxés.
Mais soyons un instant réaliste. L'établissement d'une partie de la population en victime est une posture politique. À ce propos, il est assez symptomatique de constater que les 40% des français ne payant pas d'impôt sur le revenu correspondent à ceux qui votent toujours à gauche. Cela fait donc un fond de votes acquis à la gauche et la situation n'est pas prête de changer. Nous aurons donc toujours de plus ne plus d'impôts et l'ISF qui appauvrit la France ne sera pas aboli de sitôt.
Je propose donc des adaptations linguistiques pour trouver de nouvelles recettes fiscales.
Ne dites plus | Dites |
J'habite dans mon appartement. | Je me loue à moi-même, très cher, un appartement meublé, une activité lucrative que je reconnais avoir omis de déclarer au fisc depuis n années. |
Je cuisine chez moi le soir. | Je m'engage moi-même chaque soir et au noir comme cuisinier et je me verse un bon salaire en liquide virtuel hors TVA et charges sociales. |
Je fais le ménage. | Je me propose à moi-même un emploi à durée déterminée de quelques heures par semaine pour passer la serpillière et l'aspirateur. Occasionnellement, je m'ordonne aussi de faire la poussière et j'oublie de déclarer ces heures travaillées en plus de mon emploi principal depuis que les heures supplémentaites sont imposables. |
Je rentre chez moi à pied. | Je me loue à moi-même les services de mes pieds pour un tarif forfaitaire de dix centimes le pas hors taxe. Je me verse ce revenu à moi-même et j'avoue ne pas avoir eu la présence d'esprit de déclarer ce revenu sur ma déclaration annuelle. |
Voilà, c'est fait. Le prix Nobel de la paix bient d'être attribué à l'Organisation pour l'Interdiction des Armes Chimiques. D'un autre côté, il n'a pas été décerné à Vladimir Poutine, c'est déjà ça de gagné.
Pourtant, décerner le prix Nobel de la Paix à Malala Yousafzaï (16 ans), cela aurait eu une certaine allure, elle qui a payé, et lourdement payé dans sa chair son combat contre l'obscurantisme des fous de dieu.
Au lieu de cela, le comité Nobel a fait une fois de plus dans la politique de bas étage.
Je ne suis pas convaincu que donner ce Nobel a Malala l'aurait aidé dans sa lutte ouverte. Cela aurait été pour elle un risque supplémentaire, peut-être inutile. Mais au moins, cela aurait donné un signal fort en provenance de la communauté internationale. Au lieu de cela, il est attribué à un sombre organisme destiné à lutter contre les armes chimiques dans un pays, la Syrie, qui dit ouvertement ne pas en posséder. Nous allons en voir l'inefficacité dans les mois qui viennent.
C'est moralement discutable et Malala peut se consoler avec le Prix Sakharov pour la liberté de l'esprit du Parlement européen qui lui a été décerné le 10 octobre 2013.
Le prix Nobel de la Paix est devenu le pendant de la Légion d'Honneur, une distinction donnée à n'importe qui pour n'importe quoi. Souvenez-vous de l'inventeur du micro-crédit qui a été distingué après avoir fait fortune en prêtant des sommes minimes à des taux proches de l'usure. Il a peut-être aidé des foules immenses, pris des risques énormes, mais de là à en faire un philanthrope, il y a une marge.
Je ne me suis converti aux serveurs X86 que très récemment et, je dois dire, par défaut, faute de combattants. En effet, ma conversion n'a pas été dictée par une hausse sensible de la qualité des serveurs de type PC, mais par la baisse assez nette de celle des architectures concurrentes. Pourquoi aujourd'hui payer le prix fort d'une architecture bien conçue alors que la qualité n'est plus au rendez-vous ?
Pourtant, j'étais l'un des derniers mohicans.
Depuis le milieu des années 1980, j'ai eu successivement des S.M.T. Goupil (G3/6809 avec disques durs ST506), des IBM PS/2, du matériel Digital Equipment Corporation sous la forme de PDP-11, VAX et Alpha et une foultitude de matériel Sun Microsystems, exclusivement d'architecture Sparc.
Fig. 1 : logo permettant de reconnaître un matériel informatique peut-être de qualité
Parmi le matériel Sun, j'ai eu l'occasion de voir passer chez moi une partie de la série sun4c (SparcStation 2, SparcStation IPC, SparcStation IPX avec Weitek PowerUP), les plus beaux représentants de la famille sun4m (SparcStation 5 et 20 avec SuperSparc II et HyperSparc), le serveur raté sun4d 600M, quelques sun4u (Ultra 1E, 2E, 5, 60, 80, 420R, Blade 2000) et des sun4v (T1000 et T2000). J'ai donc une vue à peu près représentative du matériel, de son évolution et de ses points faibles.
Les SparcStations étaient des machines très onéreuses. Mais je dois dire que toutes mes anciennes sun4c et sun4m fonctionnent toujours. Même une SparcStation 20 allant sur ses vingt ans et pourtant stressée puisqu'elle embarque 448Mo de mémoire, une VRAM de 8Mo, quatre processeurs ROSS HyperSparc à 200MHz, une carte SCSI additionnelle, quatre ports 100BaseTX supplémentaires et deux disques U320 SCSI de 300Go, tout cela avec son alimentation d'origine fournissant à peine plus de 100W mais avec quelques ventilateurs supplémentaires. Un processeur ROSS, ça chauffe un petit peu, alors des modules doubles, même en double largeur, ça chauffe beaucoup.
Les Ultra 1E et 2E sont d'assez bonne facture et ne posent pas de problèmes particuliers une fois oublié le mauvais vieillissement du ventilateur du processeur UltraSPARC 1 de l'U1E. En revanche, il y a eu une certaine dégradation lors du passage des machines Sbus/UPA aux machines PCI/UPA. Et un naufrage total lors du passage du PCI/UPA vers le PCI-X/PCI-E. Oracle n'a plus eu qu'à se baisser pour ramasser Sun Microsystems.
L'Ultra 5 est la première machine à problèmes. Le contrôleur de disque dur, un vulgaire contrôleur IDE, est vérolé jusqu'à la moelle. Les barrettes mémoire n'arrêtent pas de lâcher les unes après les autres. Heureusement, ce sont des barrettes ECC, donc le système prévient gentiment qu'elles sont en train de mourir avant qu'il ne soit trop tard. Enfin, il prévient souvent, presque toujours, mais cela n'empêche pas les mauvaises surprises. En dehors du caractère ECC, ces barrettes n'ont rien de plus qu'une vulgaire barrette mémoire d'un PC de bureau. Chose amusante, elles vieillissent bien plus mal que des barrettes no name de PC fabriquées en Chine sans aucun contrôle qualité. Faire de telles économies de bouts de chandelle au vu du prix d'achat d'une Ultra 5, c'est tout de même se moquer du monde voire prendre ses clients pour des imbéciles. À partir de ce moment, la part des machines Sun a commencé à s'écrouler. Le fait qu'il était possible d'utiliser Solaris sur des PC standard n'a pas aidé non plus.
Les U60, U80 et U420 étaient plus fiables que les U5. Enfin, si l'on peut dire. Sur les U60, un peu moins sur les U80, les alimentations n'arrêtent pas de claquer les unes après les autres. Heureusement, elles meurent sans injecter de haute tension sur l'électronique. Elles meurent parce qu'un condensateur travaille trop près de sa tension maximale, avec une ondulation trop forte et donc chauffe, vieillissant prématurément. Elles meurent aussi parce que les diodes Schottky d'entrée sont un peu faibles. Économiser trois francs six sous sur des machines qui valaient plusieurs dizaines de milliers de francs est mesquin. Les U80 provoquent elles-mêmes des erreurs de correction de la mémoire dès qu'elles contiennent 4Go de mémoire, ce que ne font pas les U420 utilisant pourtant la même carte-mère et les mêmes mémoires. Allez comprendre.
Et que dire des Blade 2000 ? Les Blade 2000 sont sensibles. Très sensibles. Les capteurs de température des processeurs renvoient par moment des valeurs aberrantes forçant la machine à s'arrêter brutalement car elle se met en protection. En mettant à jour l'openprom, on arrive à corriger le problème. Encore faut-il trouver la bonne version de l'openprom et avoir un contrat chez Sun pour pouvoir télécharger le patch. Mais cela ne règle pas le problème de la mémoire. Souvenez-vous. Nous étions le 1er août 2010. Une éruption solaire d'intensité C3 est dirigée vers la Terre, conduisant les 3 et 4 août 2010 à des tempêtes magnétiques avec force aurores boréales. Le samedi 7 août, les champs magnétiques autour de la tache 1093 produisent une éruption. Les sondes de la NASA photographient l’explosion qui génère une grosse protubérance de classe M1 et précipite une éjection de masse coronale (CME) dans l’espace — qui apparemment évite de justesse le plan de la Terre, nous sommes chanceux. L’explosion provoquent aussi des bruits de glissades dans les hauts parleurs de certaines radios ondes courtes. Et les Blade 2000 tombent comme des mouches avec des erreurs de mémoire du type :
Cheetah error trap taken
afsr[0000004000000037] afar[0000000034ae79c0]
TL1(0) TPC[4f2808] TNPC[4f280c] O7[4f27ec]
TSTATE[4411001607] M_SYND(0), E_SYND(37)
Highest priority error (0000004000000000)
"HW corrected E-cache ECC error for writeback"
ERROR(1): AFAR E-syndrome [J0203, pin 135]
ERROR(1): D-cache idx[0] tag[0000000000000000]
utag[0000000000000000] stag[0000000000000000]
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INSN6[0000000000000000] INSN7[0000000000000000]
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Plusieurs barrettes mémoire à changer pour que tout redevienne fonctionnel.
Il y a quelques mois, j'ai eu les mêmes problèmes sur des T1000. Barrettes mémoire parties en vacances pour des durées indéterminées. Pourtant, ces machines sont branchées sur un courant secouru parfaitement ondulé. Et cette nuit, rebelote :
SC Alert: MB/CMP0/CH3/R1/D0 deemed faulty and disabled
SC Alert: MB/CMP0/CH3/R1/D1 deemed faulty and disabled
ERROR: The following devices are disabled:
MB/CMP0/CH3/R1/D0 MB/CMP0/CH3/R1/D1
Ce n'est pas beau. J'ai réussi à faire redémarrer ce serveur à distance en désactivant deux barrettes mémoire sur les huit. Sur une machine coûtant la bagatelle de plus de 15000€ HT, c'est navrant.
J'ai rencontré un syndicaliste. Je devrais écrire un syndicaliste intelligent, il en existe tout de même quelques uns, luttant pour le bien du pays et non pour son confort personnel puisqu'il distribuait des tracts pour une mobilisation constructive et la mise à plat des trente-cinq régimes de retraite français alors que, dépendant d'un régime spécial, il avait tout à y perdre.
Je lui annonce que profession libérale, je n'entre pas dans la catégorie de travailleurs dépendant de son syndicat. De là part une discussion que je qualifierais avec le recul d'instructive et de pathétique.
Reprenons les faits. Un syndicaliste vient me voir et ne me traite pas de psychopathe — sic le dernier de la CGT que j'ai pourtant aimablement reçu dans mon bureau une fois qu'il en avait forcé la porte —, pire, écoute mes problèmes et me signale que sa sœur était dans la même situation que la mienne.
Ce syndicaliste, de statut cadre, a une sœur d'une quarantaine d'années qui a fait des études pour être orthophoniste. Travaillant du lundi matin 9h00 au samedi soir, sans jour de congé, elle gagnait il y a deux ans 2000 € nets à la fin du mois. L'an passé, elle ne gagnait plus à volume de clientèle par ailleurs égal que 500 € nets mensuels et, cette année, il m'a dit devoir l'aider à la fin du mois car elle n'arrivait plus à nourrir sa famille. Nous parlons bien entendu d'un cabinet qui fonctionne normalement, depuis plus de dix ans, pas d'un nouveau cabinet qui n'a aucune clientèle. Le choix pour cette femme est de continuer le métier pour lequel elle a sacrifié des années d'étude ou d'en changer pour réussir à vivre.
J'avais l'impression d'être un peu moins seul. Je n'irais pas jusqu'à dire que cela fait du bien, mais ne pas être seul dans ce genre de situation démontre au moins que je ne me raconte pas des histoires pour me rassurer.
En effet, je suis confronté au même problème. L'an passé, j'arrivais à un solde positif tous les mois de pas loin de 2000 €, solde positif que je réinvestissais immédiatement car je ne peux compter sur personne pour avoir une retraite si un jour j'y arrive. Cette année, le solde n'est plus lors des bons mois que de 500 € et je sais déjà que l'an prochain, ce solde sera au mieux nul. Je dis au mieux parce que dans la pire des situations, il pourrait être négatif de 500 €. Cette modification n'est pas due à une baisse de revenu mais à la simple augmentation de mes impôts et charges.
En mettant à plat mon budget mensuel avec mon expert-comptable, nous sommes arrivés à la conclusion aberrante suivante : je dégagerais plus d'argent à la fin du mois en mettant mon appartement et mon garage parisiens en location et en allant prendre n'importe quel travail d'employé de base en Alsace ou en Corrèze payé 1500 € nets mensuels. En plus, je ne travaillerais plus que trente-cinq heures, aurait des heures supplémentaires, cinq semaines de congés payés et la sécurité sociale. Je n'ai donc aucun intérêt à continuer à faire mon métier.
Il y a juste un problème. J'ai sacrifié dix ans de ma vie après le baccalauréat pour faire des études me permettant de ne pas vivre correctement des fruits de mon travail (deux ans de classes préparatoires, un diplôme d'ingénieur en électronique et traitement du signal, un mastère de communications numériques et une thèse de doctorat en traitement du signal et métrologie) et cela m'ennuierait légèrement de les oublier pour aller faire chef de rayon au supermarché du coin. Je n'ai pas passé dix ans de ma vie à vivre comme un moine pour gâcher cela dans un métier alimentaire pour de simples raisons financières.
Actuellement, je suis démarché par un cabinet de recrutement suisse. Sachant que j'arrive à peine à vivre en France du fruit de mon travail, que croyez-vous que je vais faire ?
À votre avis, à long terme et sachant que je ne suis pas le seul dans ce cas, quels seront les vrais perdants ?
Nul n'est prophète en son pays. Et surtout, nul ne doit avoir raison trop tôt. Au printemps 2007, j'écrivai un article dans une revue dans lequel je signalais que la période dans laquelle nous étions en train d'entrer ferait passer la grande dépression de 1929 pour une aimable promenade de santé. J'y indiquai aussi que cela ne serait pas une crise mais une situation longue de laquelle nous ne nous sortirons qu'après un très long purgatoire.
Nous étions un an avant le 15 septembre 2008, chute de Lehman Brothers.
Notez bien que je ne tire aucune fierté ni aucune gloire de l'avoir écrit. Je pense même que nous aurions pu nous affranchir de la période actuelle. Il aurait suffit de prendre les mesures qui s'imposaient et que le gouvernement aurait encore pu prendre jusqu'en 2009.
Pourtant, aujourd'hui, soit cinq ans après la déflagration due à la faillite de Lehman, force est de constater que rien n'a réellement changé. Mais comment pourrait-il en être autrement ?
En effet, les errements de tous les gouvernements des pays dits développés depuis une bonne trentaine d'années ne permettent pas de sortir de la situation actuelle sans pleurs ni grincements de dents. Rares sont les pays qui ne sont pas endettés à outrance à force d'essayer de faire perdurer un système de cavalerie qui ne pouvait tenir que durant les trente glorieuses, lorsque l'augmentation de la richesse était de loin supérieure à ce qu'elle est actuellement.
Mêmes les États-Unis d'Amérique qui sont encore la première puissance économique mondiale sont touchés puisque depuis une dizaine de jours, toute l'administration fédérale est fermée pour cause de différend budgétaire. Loin de moi l'idée de donner un avis sur ce shutdown, contrairement à la situation française, je n'en connais ni les tenants ni les aboutissants, mais lorsqu'un pays commence à avoir 17 000 milliards de dollards de dette publique, on ne doit pas s'étonner de devoir faire des coupes budgétaires ici ou là.
Fig. 1 : sites internet des administrations américaines en drapeau
Ne nous trompons pas, nous sommes très proche de la situation des USA puisque notre dette publique tourne joyeusement autour de 2 000 milliards d'euros et ne cesse de croître. La question est maintenant de savoir si nous pouvons encore continuer à vivre continuellement au-dessus de nos moyens. Plusieurs écoles s'affrontent.
L'école que j'appellerais mélenchoniste à courte vue et au couteau entre les dents prétend qu'il suffit d'annuler cette dette en signalant aimablement mais fermement aux créanciers de l'état français que ce même état ne remboursera jamais. Très bien. C'est révolutionnaire et totalement idiot comme toute révolution. D'un autre côté, pour avoir tenté de discuter avec un membre haut placé du Front de Gauche pas plus loin que dans ces pages, souvenez-vous, comment en attendre autre chose ? En effet, si sur le papier il est très intéressant d'annuler purement et simplement notre dette, qu'en sera-t-il lorsque nous aurons à nouveau besoin d'emprunter ? Le leit motiv du Front de Gauche est que sans les charges de la dette, notre budget serait à l'équilibre. Foutaises ! Ces trois dernières années, les différents gouvernements ont créé pour 70 milliards d'euros de nouveaux impôts en augmentant les dépenses de 75 milliards. Le raisonnement ne résiste donc pas à l'analyse. Par ailleurs, une partie de cette dette est détenue par des petits épargnants. Qu'adviendra-t-il lorsque l'état leur dira que leurs économies placées à la banque et durement acquises seront perdues ? Restons donc sérieux et oublions les théories économiques du Front de Gauche.
Une autre école consiste à payer cette dette en faisant fonctionner la planche à billets, donc par l'inflation ou la dévaluation. Là encore, ce ne serait une solution viable que si le budget de l'état était à l'équilibre en absence de charge de la dette. Dans tous les autres cas, ce ne serait qu'une cavalerie de plus. Les plus vieux se souviendront avec une larme des trois dévaluations successives du franc français de la première moitié des années 1980.
La dernière solution est un remboursement de cette dette et une orthodoxie budgétaire. Mais il y a deux freins et non des moindres : d'une part une nouvelle augmentation des impôts et d'autre part une cure d'austérité drastique.
Je gage que la solution sera un mélange d'augmentation des impôts, d'austérité et d'inflation puisque la banque centrale européenne n'annoncera jamais une dévaluation de l'euro. Néanmoins, aucun gouvernement ne prendra le risque politique de le faire. En effet, tous les gouvernements récents, sans exception, ne cherchent qu'à faire perdurer un système à bout de souffle, sans doute parce qu'ils savent que les électeurs finiraient par voter pour leur intérêt particulier plutôt que pour l'intérêt général.
Or l'intérêt général n'est pas quelque chose qui va faire rêver les foules. L'intérêt général à long terme passe par une réduction drastique des dépenses, donc par une diminution du mille-feuille administratif, par la suppression de tout un tas de prestations sociales à l'efficacité douteuse et par une orthodoxie budgétaire, la première chose étant de revenir au bon vieux système soit disant archaïque de l'ancien régime qui faisait correspondre à chaque classe de dépenses une caisse différente. L'électeur ne choisira pas tout seul cette voie. La preuve est qu'il préfère actuellement voter Front National (un parti qui n'a toujours rien compris des mécanismes de base de l'économie) ou Front de Gauche (il est amusant de voir comment les deux fronts se rejoignent sur leur compréhension de l'économie) alors qu'il faudrait voter pour des gens qui ont une certaine maîtrise des mécanisme économiques. De la même manière, comment demander à un homme politique, dont la politique est un métier plus qu'une vocation, de supprimer son poste ?
Bizarrement, des pays comme l'Allemagne, la Belgique ou la Suisse s'en tirent bien mieux que nous. Souvent, avec des budgets publics inférieurs en proportion du PIB. Chose remarquable, tous ces pays ont des structures fédérales, c'est-à-dire que les décisions concernant les citoyens sont prises localement. Les dépenses y sont aussi gérées localement pour éviter au maximum les dérives.
Mais sans doute un pays comme la Suisse est-il sous-développé puisqu'un suisse gagnant annuellement 200000 CHF ne donne à l'état que 25% de ses revenus, tous impôts, taxes et assurances maladie confondus. À titre de comparaison, nous ne sommes pas loin de 60% en France pour les mêmes revenus bruts.
Il existe donc des pays en voie de développement et d'autres en voie de sous-développement. Prenons garde !
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