Dans l'antre du diable

06.10.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvais esprit, Haines ordinaires

S'il doit rembourser à la Société Générale les pertes occasionnées, il faudra à Jérôme Kerviel qui gagne 2300 euros mensuels quelques 177537 ans. Et encore, c'est compter sans les intérêts d'emprunt et en considérant qu'il consacre toute sa rémunération à ce remboursement. Loin de moi l'idée de prendre position pour cet employé ou son employeur, mais il faudrait tout de même voir à ne pas prendre les clients des banques de ce pays pour des imbéciles.

Pour avoir eu l'occasion de faire des installations de réseaux dans des salles de marchés, j'ai pu voir ce qui s'y passait réellement. Je pense même que si je n'avais pas vu ça de mes yeux, jamais je n'aurais pu y croire. La dernière prestation faite pour un agent de change est certainement celle qui m'a le plus marqué. Imaginez un jeune type d'à peine trente ans à la tête d'une fortune indécente qui achète un immeuble sur cour, dans le XVIIe arrondissement parisien — du bon côté du XVIIe, pas vers Guy Moquet —, et qui décide pour ne pas perdre la main de s'installer à domicile une salle de marché. On s'occupe comme on peut !

Le but du jeu était d'installer entre sa salle de marché personnelle — une cinquantaine d'ordinateurs avec quatre écrans par ordinateur — et son opérateur anglais une liaison sécurisé, redondante et à temps réel. Pas une simple liaison SDSL avec garantie de temps de rétablissement, non, une liaison dédiée pour les agents de change. Il y a même un opérateur de télécommunications, spécialisé dans ce genre de choses, et qui garantit qu'un ordre passé sera traité en moins d'une seconde à l'autre bout du monde.

Et le type en question m'explique son métier. Il m'explique sur quel type de produit il spécule. Personnellement, je suis un parfait néophyte dans tous les domaines d'investissement en bourse parce que cela ne m'intéresse pas. Plus exactement, cela ne m'intéresse pas non pas parce que je ne suis pas curieux, mais parce que j'ai réfléchi longuement au fonctionnement de la bourse et au problème des intermédiaires bancaires permettant à la majorité des petits porteurs de jouer en bourse.

Cet agent de change ne spéculait que sur un seul produit, les assurances-vie. Je ne savais même pas qu'on pouvait spéculer sur les assurances-vie ! Et il avait investi des fortunes dans des logiciels lui permettant de spéculer à un horizon de deux secondes. Ses cinquante ordinateurs surveillaient automatiquement le cours de tous les titres d'assurances-vie dans le monde entier, achetaient et vendaient automatiquement ces titres sur des critères variés. La seule certitude était que ces titres ne restaient sa propriété que durant deux secondes. Il m'expliquait aussi qu'il gagnait sur tous les tableaux, que les titres montent ou baissent, car ses outils étaient assez puissants pour se permettre d'acheter à découvert dans certaines circonstances.

En d'autres termes, cet agent de change gagne pour l'instant des fortunes sans ne rien faire d'autre que de surveiller une salle de serveurs informatiques. La seule compétence est dans les programmes informatiques qu'il a pu acheter et que personne, même pas lui, ne peut contrôler. En admettant même qu'il s'arrête devant un seul serveur, il ne peut pas suivre toutes les informations qui défilent sur les quatre écrans surtout lorsque l'horizon est de deux secondes.

Vous allez me dire que je digresse. Pas tant que ça puisque le tribunal correctionnel a comdamné Jérôme Kerviel à 5 ans de prison dont 3 fermes et 4,9 milliards d'euros. Ce tribunal reconnaît donc la responsabilité de cet agent de change, dédouanant par là même la banque de ses propres responsabilité. Ce tribunal a par un simple trait de plume affirmé que la banque n'était pour rien dans les agissements de son agent de change. En effet, on ne peut pas tenir pour responsable toute une banque des errements d'un employé. On peut pourtant se poser des questions quant à la responsabilité de sa hiérarchie directe qui ne pouvait pas ne pas savoir et qui a certainement fermé les yeux tant que l'agent de change en question leur rapportait des sommes rondelettes. Les outils informatiques utilisés étaient aussi ceux de la banque et s'il avait introduit des données biaisées, il faudrait déjà se poser la question de la sécurité desdits outils. La responsabilité n'est donc pas simple à déterminer et Jérôme Kerviel a parfaitement raison d'interjeter appel.

Pire, à l'énoncé de la condamnation, Jérôme Kerviel semble être le bouc émissaire dédouanant tous les autres agents de change de cette banque qui n'ont certainement pas fait mieux mais ne se sont pas fait prendre. Nous avons donc une banque qui fait porter à l'un de ses anciens employés l'intégralité de ses manquements et qui essaie de se faire une bonne image à peu de frais en déclarant qu'elle avait fait le ménage parmi ses traders et que leurs activités financières vont d'autant mieux que la pomme pourrie n'est plus dans le panier.

Et pendant ce temps, l'économie réelle continue sa plongée. Toutes les liquidités des banques sont placées en bourse, parce qu'il est plus tentant de prêter lorsqu'on a des rendements annuels à deux chiffres, ou chez des particuliers surendettés, parce que lorsqu'ils ne peuvent plus payer on les saisit, et non dans l'économie réelle qui passe par le financement des entreprises.

Mis à part ça, tout va bien. Les responsables sont condamnés, mais sans écrou, ce qui est surprenant pour quelqu'un de condamné à de la prison ferme. On discute allègrement des retraites et on ne parle pas des vrais problèmes qui ne tarderont pas à remonter à la surface. Le problème des retraites ne pourra être réglé que par un système comme celui de la CIPAV (professions libérales) qui est une retraite à points, ce qui évite l'épineux problème de l'âge. Et de toute façon, quelle que soit la réforme, si l'économie continue sa descente, poussée par les activités bancaires, la question de l'âge ne se posera plus.

 

Aucune augmentation d'après les organisateurs

05.10.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit, Haines ordinaires

Je viens de recevoir mon avis d'imposition concernant les impôts locaux — taxe d'habitation et taxe foncière. Cet avis concerne un appartement parisien et un box pour garer une voiture à l'autre bout de l'arrondissement. Il y a quelques mois, notre cher maire de Paris nous a indiqué que ces taxes augmenteraient un petit peu, quelques pourcents parce que, voyez-vous, elles ont moins augmenté à Paris que dans le reste de la France et que leurs taux états vraiment bas. Et alors, ce n'est pas parce que ça augmente partout qu'il faut augmenter les impôts des parisiens histoire de les augmenter ! Tous les parisiens ne sont pas des nantis.

De toute façon, il faut bien payer un jour ou l'autres toutes les opérations inutiles et onéreuses comme le « 104 », Paris-Plage, la réfection de la Place de la République pour la rendre aux piétons, les couloirs de bus et les différents petits travaux qui ont transformé depuis quelque temps notre belle ville en horreur tant pour ceux qui y vivent que pour ceux qui y passent (ou qui essaient d'y passer) : couloirs de bus idiots, tramways d'autant plus bête que RFF effectue actuellement des travaux d'entretien de la petite ceinture…

Bref, ma feuille d'impôt devait augmenter de 9 %. Je le savais. Mais je n'ai pas eu droit qu'à une augmentation de 9 %, tel que vous me lisez, j'ai eu droit à une augmentation de 21 %. Je n'ai pourtant pas l'impression que la surface au sol de mon immeuble a changé depuis l'année dernière. Ni d'ailleurs la surface habitable de mon appartement.

Je n'arrive pourtant pas à croire que le maire de Paris puisse mentir ou ne sache pas faire une division. En regardant de plus près l'avis d'imposition, je peux constater que l'augmentation de la part municipale est bien de 9 %. Mais à Paris, comme la ville est confondue avec le département de la Seine depuis le 1er janvier 1968, il n'y avait plus de taxe départementale. C'est assez logique, tout étant perçu par la ville, pourquoi traiter le cas du département. Le reste de l'augmentation est pourtant cachée dans le département de la Seine puisque une taxe départementale a été silencieusement ajoutée.

L'honneur est sauf. Delanoë sait faire une division. Mais il sait aussi se moquer ouvertement du monde puisque c'est bien sa majorité qui a voté cette nouvelle taxe. Et lorsqu'on regarde l'augmentation de la feuille d'impôt, Paris, qui d'après Delanoë est dans le peloton d'augmentation des taxes locales faibles passe dans le groupe de tête.

Plus c'est gros, plus ça passe !

 

Brassens avait raison

04.10.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais l'informatique, Haines ordinaires

Usenet regorge de gens infréquentables. J'ai même parfois l'horrible impression que ce réseau attire un tas de personnes complètement asociales. J'en ai encore fait l'expérience pas plus tard que ce week-end. Entre les types qui ne peuvent vivre qu'en exhibant leurs diplômes et ceux qui sont fiers d'être Bac -1, tous deux connaissant absolument tout sur tout et même sur tout le reste, il y a vraiment beaucoup de choix pour définir le con étalon, celui qu'on devrait installer au pavillon des poids et mesures à Sèvres.

Il existe pourtant un très bon candidat à ce poste en la personne d'un sinistre individu qui hante les lieux où l'on parle système d'exploitation et qui a tellement peur de ne pas être reconnu à sa juste valeur qu'il se fait un point d'honneur à toujours poster avec l'adresse de sa prestigieuse école alors qu'il n'est qu'ancien élève. Il connaît tout sur tout et est désagréable et condescendant avec tout le monde. Il a sauté tant de pages dans le manuel du savoir-vivre que j'en arrive à me demander s'il sait même ce qu'est la politesse élémentaire. Pire, lorsqu'on lui met le nez dans ses erreurs, il biaise, prétend faire de la rhétorique et essaie de retomber sur ses pieds en changeant subtilement le sujet de discussion. Jamais il n'aura tort. C'est impossible, on ne peut pas avoir tort lorsqu'on sort d'une école pareille, surtout lorsque l'école est située rue l'Ulm. Et lorsqu'il a tort et que ça se voit un peu trop, bizarrement, ses messages disparaissent opportunément des archives. Je me souviens m'être fait un petit plaisir en le soufflant il y a quelques semaines sur fr.comp.os.unix, mais je n'arrive plus à trouver ce message. Faut-il ajouter qu'il n'y avait pas répondu ?

La dernière discussion était épatante. Du haut de sa superbe, il prétendait que les signaux sous Unix sont inutiles, nocifs, mal gérés et qu'il fallait toujours utiliser signalfd(). Et tout cela avec l'assurance du type qui sait programmer, qui a fait ça tout sa vie et qui parle donc en connaissance de cause.

Jusque-là, je veux bien admettre la chose. Mais ce qui était vraiment amusant, c'est lorsqu'il a rajouté qu'on devait toujours utiliser signalfd(), parce que c'est strictement équivalent à un gestionnaire de signal. Pour un professeur de mathématiques, ne pas faire la différence entre un traitement synchrone et un traitement asynchrone est déjà assez fort pour être noté. Mais prétendre en plus qu'ils sont équivalents…

Lui faire remarquer qu'il venait de dire une absurdité est la pire des choses à faire, cela revient à agiter un chiffon rouge devant un taureau. Tout y est passé, de mon incompétence crasse aux problèmes de design de mes programmes. Lui, il sait, il sait ce qu'est une définition et qu'on ne doit jamais utiliser une fonction async signal unsafe dans un gestionnaire de signal. C'est bizarre, ça fait au moins quinze ans que j'utilise de telles fonctions dans mes programmes. Il suffit de savoir un minimum ce qu'on fait. J'admets que c'est assez casse-gueule, mais si on ne maîtrise pas les signaux à fin de synchronisation, il vaut mieux ne pas les utiliser du tout.

Par ailleurs, j'ai une aversion profonde de la mode linuxienne qui consiste à ajouter des nouvelles fonctions, non portables, dans la glibc sous prétexte que les développeurs sont des branques qui ne savent pas utiliser les API existantes.

Qu'un tel individu me traite d'imbécile me fait sourire. En terme de programmation, et surtout en programmation parallèle, ce n'est pas un type comme lui qui peut me donner des leçons. À l'instar d'un critique d'art, cet individu est un eunuque, capable de critiquer mais incapable de faire. Pire, il est capable de critiquer une production alors qu'il avoue un peu plus loin ne même pas l'avoir regardée. Le code qu'il juge sans l'avoir vu de grotesque (sic) est régulièrement audité car qualifié par une agence américaine pour une utilisation en programmation multitâche embarquée et spatiale depuis une présentation dans une conférence en 2002. Et ces auditeurs sont certainement largement plus qualifiés que ce professeur de mathématiques pour critiquer un code source. D'ailleurs, ils ne se sont pas gênés de remonter une alerte au CERT concernant un system() mal placé qui pouvait occasionner une augmentation de privilèges. En me traitant d'imbécile, ce qui me fait rire, il traite aussi d'imbéciles les utilisateurs du programme en question ainsi que les auditeurs qui font régulièrement une revue du code. C'est déjà plus gênant, mais quand on a la science infuse, c'est tout naturel : tous des cons sauf moi.

Je souhaite bien du plaisir à ce genre d'individu. Un jour ou l'autre, dans son parcours professionnel, il risque de tomber sur quelqu'un plus fort ou plus bête que lui. Dans son parcours personnel aussi. Ce jour-là, je ne voudrais pas être à sa place parce qu'il risque de se sentir très seul.

Il faut toujours se méfier du retour de balancier. D'un autre côté, quand on est con, on est con…

 

Pour ne pas perdre la face

02.10.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les tradis

Parmi mes connaissance se trouve tout un tas de traditionalistes plus ou moins bornés et fiers de leurs positions. L'immense majorité, pour ne pas dire l'intégralité de ceux-ci, considèrent que le mariage est une maladie qui contraint la femme à rester chez elle, qu'elle ait ou non des enfants. Le mythe de la mère au foyer en prend un coup puisque je croiyais bêtement que seuls ses enfants contraignaient la femme à rester chez elle.

Il se trouve aussi qu'une de mes connaissances a neuf enfants et qu'avec son mari, on ne peut pas vraiment dire que cela se passe bien. Je ne prendrais pas part à ce différend et me garderais bien de juger ou même de prendre position. En revanche, je trouve assez effrayante l'attitude des traditionalistes qui essayent d'aider cette famille. Je dis aider parce que je ne trouve pas de mot plus adapté et moins polémique.

En plusieurs mois, j'ai reçu des appels téléphoniques, vu passer des courriers électroniques appelant à payer des neuvaines. Pour ceux qui ne seraient pas au courant, une neuvaine est un ensemble de neuf jours durant lesquels un croyant paie un prêtre — traditionaliste, cela va de soi sinon ça ne compte pas — pour qu'il dise une messe par jour. Pour les plus pingres, une neuvaine peut prendre la forme de neuf jours de prière. J'ai vu passer des appels à la prière, au jeûne même. Naturellement, tout cela est en union de prière. Lorsqu'on sait que certains membres du groupe en question ne peuvent pas me voir car je suis un horrible déviant, l'union de prière prend tout son sens.

Ce qui me dérange, ce n'est pas qu'on paie des neuvaines, qu'on jeûne ou qu'on se flagèle. À vrai dire, je m'en contrefiche à partir du moment où personne ne me demande d'aller me fouetter en public pour expier une faute qui n'est pas de mon ressort. Ce qui me gêne franchement aux entournures, c'est que personne ne se pose la question de savoir ce qui est bon ou non pour cet homme, cette femme et ces neuf enfants. Non, cela ne leur viendrait même pas à l'esprit. En revanche, il faut à tout prix sauver les apparences. Dans ce milieu-là, monsieur, on ne divorce pas, on prie. Et on prie pour que ça ne termine pas en drame. Il paraît qu'en priant tous, Dieu les aidera.

Arrêtez-moi si je me trompe, mais réagir comme cela, n'est-ce pas de la même veine que de prier Dieu quand on a mal aux dents ? Que l'on soit croyant ou non, il faut déjà se prendre en main, ne pas fuir ses responsabilités avant d'en appeler à Dieu. Pour être tout à fait exact, cette attitude est assez proche de celle évoquée dans Matthieu 4 5-7.

Alors le diable le prend avec lui dans la Ville Sainte, et il le plaça sur le pinacle du Temple et lui dit : " Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et sur leurs mains ils te porteront, de peur que tu ne heurtes du pied quelque pierre. " Jésus lui dit : " Il est encore écrit : Tu ne tenteras pas le Seigneur, ton Dieu. "

En d'autres termes, l'évangéliste explique qu'il ne faut pas crier vers Dieu en espérant recevoir une aide à partir du moment où l'on ne fait rien soi-même pour essayer de s'en sortir.

Mais que va-t-il donc se produire ? Faut-il que désespérée, la femme trucide son mari ? Faut-il que le mari en vienne à frapper sa femme ? En tout état de cause, la situation n'est pas tenable. Mais on ne divorce pas. De toute façon, de quoi cette femme vivra-t-elle après un divorce puisqu'elle n'a plus travaillé depuis une grosse quinzaine d'années ? J'en entends déjà me dire qu'elle pourrait vivre d'une pension alimentaire. Certes, en admettant que son mari puisse la régler. Et une fois les enfants grands, de quoi vivra-t-elle ? Et à sa retraite ? Parce que pour le coup, la pension de reversion risque d'être un peu faiblarde !

J'ai peine à trouver des mots pour qualifier ce genre d'attitude. Pour ne pas perdre la face, onze personnes sont prises en otages d'une conception pour le moins bizarre des rapports humains. Est-ce que l'apparence est à ce prix ?

 

Crise de foi

01.10.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais l'informatique

J'ai une crise de foi, je l'avoue humblement. Depuis quelques jours, rien ne va plus. Contributeur aux logiciels libres et soucieux de la qualité du produit, je déprime. En fait, je déprime depuis que j'ai vu les sources d'un micro-noyau pour essayer de relancer FreeVMS. L'idée est de relancer le projet en utilisant un micro-noyau et en codant les serveurs dans un langage solide comme ADA. La procédure de compilation de ce micro-noyau est une aberration comme je n'en ai que rarement vu et je n'en suis pas encore arrivé au bout. Pourtant, je m'obstine.

J'ai fait mes armes en Fortran 77, voire 66, entre un VAX et un Convex. Arrivé à l'armée — oui, je suis un vieux con modèle réserviste qui a eu l'immense chance de passer plus d'un an dans les rangs de l'armée et qui regrette que ce ne soit plus une obligation tant cela apprendrait à certains bipèdes à vivre —, j'étais enfermé dans une cage de Faraday à produire du code C89 aux normes des laboratoires de la défense, le genre de code C qui ne plante pas, où l'on vérifie toutes les valeurs de retour des fonctions, où l'on regarde à deux fois les types des objets. J'avais même derrière moi un spécialiste de la revue de code. Depuis, mes productions sont carrées, rien ne dépasse et voir les sources d'un simple noyau Linux me fiche un coup de bourdon indescriptible.

Pour pouvoir écrire des choses simplement, c'est-à-dire avec un environnement de développement correct et un compilateur décent et 32 bits, j'ai été amené à utiliser un système s'appelant Linux. C'était au siècle dernier sur un i386DX16/i387DX16 avec 8 Mo de mémoire, le noyau était un 1.0.9 parfaitement utilisable. Depuis, il y a eu quelques évolutions comme le 2.0 et le 2.2, dernier noyau réellement utilisable. Quoique s'il on regarde de plus près, on peut raisonnablement se demander ce que faisait un serveur web dans le noyau 2.2. J'avais alors la foi et étais prêt à lancer une sainte croisade. Et tout s'est dégradé. D'abord, on a eu le 2.4 et aujourd'hui, il faut faire avec un noyau 2.6 qui ne ressemble plus à rien. Il n'y a plus de branche de développement séparée. En dehors de l'architecture principale amd64, le reste fonctionne au petit bonheur la chance et il n'y a plus aucune garantie d'avoir un noyau bootable lorsqu'on le pêche directement dans la branche 2.6 de kernel.org. On ne sait pas pourquoi des pilotes stables depuis des années ne sont pas intégrés au noyau alors que de sombres saletés le sont. Les API changent subtilement d'un patch à l'autre.

Et c'est sans compter avec la glibc. Le type qui développe cette bibliothèque est un sombre idiot qui n'est pas capable de comprendre des spécifications qu'il prétend pourtant avoir lui-même écrites. Pour avoir poussé la programmation POSIX jusque dans des coins obscurs des spécifications, je suis tombé sur un certain nombre de problèmes inhérents à la glibc. À chaque fois que je remontais des rapports de dysfonctionnement, la réponse était toujours la même : l'erreur était dans mon code et non dans la glibc. Jamais, ce Ulrich Drepper n'a pu accepter qu'il était incapable de faire la différence entre un « shall » et un « should ».

Exemple :

PTHREAD_KILL(3)           Manuel du programmeur Linux          PTHREAD_KILL(3)

NOM
pthread_kill - Envoyer un signal à un thread

SYNOPSIS
#include <signal.h>

int pthread_kill(pthread_t thread, int sig);

Compilez et effectuez l'édition des liens avec l'option -pthread.

DESCRIPTION
La  fonction  pthread_kill()  envoie  le  signal sig à thread, un autre
thread du même processus  que  l'appelant.  Le  signal  est  dirigé  de
manière asynchrone vers thread.

Si sig est 0, aucun signal n'est envoyé, mais la détection d'erreur est
quand même effectuée. Cela peut être utilisé pour vérifier  l'existence
d'un identiant de thread.

VALEUR RENVOYÉE
En  cas  de  réussite, pthread_kill() renvoie 0 ; en cas d'erreur, elle
renvoie un numéro d'erreur, et aucun signal n'est envoyé.

ERREURS
ESRCH  Aucun thread avec pour identifiant thread n'a pu être trouvé.

EINVAL Un signal invalide a été spécifié.

CONFORMITÉ
POSIX.1-2001.

Oui, je vous ai mis directement la traduction de la page du manuel en français. J'ai tout de même vérifié les spécifications POSIX et les pages de manuel de tous les autres systèmes POSIX à ma disposition : OpenVMS, NetBSD, FreeBSD et Solaris. Toutes sont d'accord entre elles et confirment bien cette page.

Notez qu'il est indiqué qu'on peut utiliser un sig nul pour tester l'existence du thread. Si le thread n'existe pas, la fonction doit renvoyer la valeur ESRCH. Le type pthread_t est un type opaque. Dans tous les systèmes corrects, cette valeur n'est pas directement un pointeur, il y a toujours une indirection. Cela signifie qu'on peut utiliser cette fonction pour tester la présence d'un thread. Sous Linux, pour des raisons de performances — tu parles, ça évite juste une indirection et un tableau de pointeurs dans la mémoire statique du processus —, il s'agit d'un pointeur. Lorsque le thread n'existe plus, la mémoire pointée est libérée et pthread_kill() renvoit bien une erreur, mais une erreur sale de segmentation. Pour des raisons de performances, on doit alors ou placer un gestionnaire de signal sur SIGSEGV, ce qui n'est pas toujours ni aisé ni faisable, soit rajouter des mutexes un peu partout pour être sûr, lorsqu'on envoie un signal à un thread, que ce thread existe toujours. C'est donc optimal du point de vue de la glibc mais pas du tout du point de vue du programme. Ce qui est amusant, c'est que tous les programmes qui utilisent cette fonction avec un signal nul et qui n'ont pas été développés sous Linux risquent d'avoir de sérieux problèmes.

Des exemples comme celui-là, j'en ai des tas, et pas que dans la glibc. Il y en a dans un paquet de bibliothèques livrées en standard avec toute distribution Linux qui se respecte. Mais il y en a aussi dans le noyau. Les développeurs du noyau touchent à tout et dans tous les sens. Ils développement essentiellement sur x86 et se contrefichent des problèmes d'alignement de la mémoire ou d'ordre des octets. Cela peut donner des choses amusantes. Entre la libpcap qui ne fonctionnait plus du 2.6.27 au 2.6.30 sans la patcher dans tous les sens, les règles iptables qui ne fonctionnent plus sous 2.6.35, le pilote i2c_bbc qui est cassé depuis le 2.6.27, l'instabilité chronique du 2.6.36, les utilisateurs de sparc64 sont des petits gâtés.

Utilisant Linux sur des architectures différentes du PC x86, j'ai de plus en plus l'impression d'essuyer les plâtres avec une brique.

Développeurs, il est grand temps de rechercher la qualité. Linux s'est imposé par sa qualité. Ne cassez pas ce que vous avez créé. Ne perdez pas de vue que si Linux est la partie émergée de l'iceberg, il a entraîné un certain nombre d'autres projets dont certains pourraient lui damer le pion. OpenBSD est prétendûment sécurisé, mais il est inutilisable pour autre chose qu'une machine frontale. FreeBSD suit malheureusement la philosophie linuxienne. Mais il reste NetBSD, activement développé et bien plus propre que Linux.

 

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