Retraitons les retraites !

11.09.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur

Ça y est. Depuis cette nuit, l'âge légal de la retraite a été repoussé à 62 ans contre 60. Reste le passage devant le sénat, ce qui ne devrait être qu'une simple formalité.

Les députés français ont donc sonné le glas de cette mesure emblématique du premier septennat de François Mitterrand et les socialistes, certainement en mémoire du chef, ont déjà annoncé qu'ils reviendront sur cette mesure s'ils sont élus en 2012. Tous les arguments sont bons pour rallier des suffrages.

Le problème majeur de cette réforme n'est pas l'allongement de la durée de cotisation ni l'âge légal de départ à la retraite. Ne parlons pas non plus de la pénibilité du travail qui est, dans la majorité des cas, un faux problème. J'aimerais d'ailleurs assez avoir des statistiques réelles sur le pourcentage de travailleurs — pas de salariés parce que tous les salariés sont des travailleurs mais le contraire n'est pas vrai — ayant un métier réellement pénible. Le vrai problème est la continuité de l'emploi au cours de la vie professionnelle. En France, l'âge médian de sortie du marché du travail est de 58,4 ans (source INSEE) et l'âge moyen de liquidation de la retraite est de 61,5 ans (même source). L'âge de liquidation est ainsi dans la moyenne européenne. Passons sur le mélange entre âge médian et âge moyen, visiblement, nos politiques sont incapables d'en faire la différence. Il faudrait les renvoyer d'urgence sur les bancs de l'école pour recevoir un cours de mathématiques statistiques. Peut-être ont-ils voté cette mesure car ils ne sont pas confrontés au problème, l'assemblée nationale n'étant pas socialement représentative de la population active (les fonctionnaires et les professions libérales sur-représentés ne sont pas touchés par cette réforme).

L'âge médian signifie qu'il y a autant de personnes qui partent après l'âge de 58,4 ans que de personnes qui partent avant cet âge. Reculer l'âge légal de la retraite en partant du principe que cet âge médiant reculera aussi de deux ans est une aberration puisque l'une des mesures est politique et l'autre économique et que l'une n'implique pas l'autre. La seule conséquence sera une baisse mécanique des pensions versées.

Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que les carrières sont de plus en plus morcelées et qu'il n'y a que très peu de gens qui ne passent pas par la case Assedic. Parler du problème spécifique des carrières des femmes est donc un épouvantail puisqu'il n'est pas prouvé que les carrières des femmes sont plus morcelées que celles des hommes surtout dans les classes inférieures de la société. Repousser l'âge de liquidation des retraites à taux plein à 67 ans signifie simplement une baisse supplémentaire des pensions puisque ceux qui n'ont pas réussi à atteindre 40 ans de cotisations à l'âge de 65 ans auront encore plus de difficultés à atteindre 42 ans de cotisations à 67 ans.

Et l'on entend les syndicats et les politiques d'opposition, qui n'ont rien compris au sport en question, parler de choses aussi aberrantes que le rajout d'une taxe sur le capital, sur l'intéressement des salariés et sur plein d'autres choses qu'on pourrait taxer ou surtaxer pour payer les retraites. J'ai en particulier entendu chez Arlette Chabot que l'intéressement salarial est exonéré de charges sociales. Je suis content de savoir que les CSG et CRDS ne sont pas des charges sociales. Je pose donc la question : que sont les CSG et CRDS ? Il est vrai que ces deux taxes sont payées par le patronat et non par le salariat.

Et l'on entend personne pour proposer des réformes permettant de réduire le taux de chômage qui plombe aussi les recettes des caisses de retraite. Non, plutôt que d'attaquer le problème à la base, on va rajouter des taxes sur les entreprises ou sur les salariés, voire sur les deux. Je ne suis pas convaincu que ce soit intelligent ni même pérenne.

Et on ne parle que des retraites par répartition, donc des retraites des salariés, pas des retraites complémentaires ou des caisses des non salariés qui fonctionnent par point et dont la valeur des points peut subtilement changer d'une année sur l'autre.

 

Les clichés ont la vie dure

10.09.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvais esprit

L'autre soir, je regardais « Catch me if you can ». Pour une fois qu'il passait quelque chose d'intéressant à une heure décente à la télévision, il fallait en profiter.

Rapidement, pour ceux qui ne connaissent pas, il s'agit de l'histoire, vraie mais certainement romancée, d'un adolescent attardé qui est devenu escroc international après que son père a été ruiné par un contrôle fiscal de l'administration américaine. Ce film commence aux États-Unis s'achève aux États-Unis, mais une incursion est faite en France, précisément à Montrichard en 1969.

Je décris la scène : un agent spécial du FBI — existe-t-il d'ailleurs au FBI des agents non spéciaux ? — entre dans une imprimerie dans laquelle l'escroc en question imprime des faux chèques. C'est la nuit de Noël, il est seul. Sur la place, on voit l'église d'où semblent provenir des chants traditionnels.

Tom Hanks, en entrant dans l'imprimerie, appuie sur le poing rouge, arrêtant les différents appareils en plein travail. Les papiers volent. Pour éviter une course-poursuite entre les équipements, il signale à tout hasard que le bâtiment est cerné par la police française qui l'abattra s'il sort seul.

Pour le spectateur qui avait vu l'extérieur de l'imprimerie durant la scène précédente, la place était parfaitement vide. Pourtant, dès que les deux hommes mettent un pied sur la neige, la police nationale française arrive avec force gyrophares et klaxons. Et dans le lot des véhicules de police se trouvent plusieurs DS de type III maquillées en véhicules pie.

Arrestation de Frank dans « Catch me if you can »

Quelle faute de goût, surtout pour un épavologue chevronné. Déjà, cela revient à dire que la police nationale avait du matériel neuf puisque la DS de type III n'a été ajoutée au catalogue Citroën qu'en 1968. Pourquoi pas. Après tout, après les événements de mai 1968, les véhicules de la police pouvaient avoir été caillassés et remplacés. On voit même qu'il s'agit de finition Pallas, ce qui est assez surprenant même pour une administration avant-gardiste puisque les poignées plates ne sont arrivées que bien plus tard. Autre chose, la police nationale n'a jamais eu de DS pie. Une série avait été faite, mais la police nationale ne s'en est jamais servie car les mécaniciens n'avaient pas les compétences pour entretenir ces mécaniques très particulières. Seule la gendarmerie nationale avait été dotée d'ID gonflées pour rattraper les chauffards sur autoroute puisqu'elles affichaient fièrement 150 ch au frein avec un moteur de 2175 cm3 muni d'un double turbo-compresseur.

Pourquoi donc réduire un pays à quelques images. Lorsqu'un film étranger parle de la France, on voit généralement des bistrots, des bérets et des baguettes de pain parfumées aux aisselles. Si on a de la chance et selon l'époque, on voit des Tractions Avant (même des modèles à malle bombée ou essui-glace en bas du pare-brise pour des films d'avant-guerre), des 2CV et des DS, quand ce n'est pas des trucs horribles comme la DS qui apparaît dans « Retour vers le futur II » et dont rien ne nous dit si elle est censée évoquer la France.

Et même les français s'y mettent pour se parodier eux-mêmes. À la fin du Fabuleux Destin d'Amélie Poulain, la petite Amélie descend une côte de Montmartre sur un vélomoteur conduit par l'un de ses amis. Et que voit-on furtivement dans le cadre ? Je vous l'accorde, il faut vraiment faire attention et seul un œil exercé ou à l'affût peut s'en rendre compte. Une DS avachie en stationnement ! La preuve en image :

Et qu'on ne me dise surtout pas que, lors du tournage, cette voiture était là juste par hasard !

 

Les photographies de Monsieur K.

09.09.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit

J'entends depuis quelques jours les journalistes dire tout et n'importe quoi sur Bernard Kouchner. Il y en a même un pour avoir noté que la fameuse photo de Monsieur K. avec un sac de riz a demandé trois prises.

Personne n'a cru bon de noter que cette opération faite avec des sac de riz était la pire des choses. À se demander si ces journalistes ont mis les pieds un jour en Afrique. À se demander aussi s'ils ont fait un jour cuire un riz bas de gamme, standard. Pour faire cuire du riz de qualité normale — pas du basmati ou du thaï —, il faut compter entre vingt-cinq et trente minutes de cuisson dans de l'eau bouillante. Il faut donc en plus du riz, deux ingrédients qui ne se trouvent que difficilement en zone désertique, à savoir de l'eau à peu près propre et du bois ou l'un de ses dérivés (charbon…). Une population qui n'a pas les moyens d'acheter du riz d'importation n'a que le bois pour faire cuire ce riz car elle est aussi incapable d'acheter du gaz, du pétrole ou de l'alcool pour faire fonctionner un réchaud.

Envoyer du riz dans les zones désertiques sous couvert d'aide humanitaire est donc un crime puisque ce riz ne concourt qu'à une seule chose, l'avancée du désert en raison de l'arrachage des derniers arbustes pour le cuire. Et encore, je ne parle pas des maladies qui résultent de la cuisson du riz dans une eau impropre à la consommation.

Ces sacs de riz, envoyés à grands renforts de publicité, n'ont été bénéfiques qu'à la population de rats des ports africains de destination qui ont pullulé grâce à notre bonté et à Bernard Kouchner qui a construit son image sur cette action. Et il faut dire que cette image lui colle toujours à la peau.

Mais ces actions médiatiques inutiles voire contre-productives ne sont pas l'apanage de Monsieur K. J'ai eu la chance de me trouver à Fénérive, sur la côté est de Madagascar, un peu après le passage d'un cyclone. Une ONG qui a pignon sur rue, mais que je ne citerais pas, avait lancé une campagne de collecte de dons pour aider les malgaches. J'ai eu l'occasion de voir à Tamatave des hangars débordants de couvertures et de lits de camp. Sur la côte est, les malgaches ont une nette tendance à dormir sur des nattes et se contrefichent royalement de lits de camp. Les couvertures données par cette organisation ont simplement permis de casser l'économie locale puisque les fabricants de couvertures n'arrivaient plus à vendre leurs productions. Au final, les donateurs ont répondu à l'appel des différentes ONG qui ont envoyé du matériel. Mais jamais elles ne se sont posé la question de savoir si ce matériel était réellement utile. Il en est des couvertures et des lits de camp comme des sacs de riz. Ce sont des fausses bonnes idées qui permettent souvent de se dire qu'on a fait quelque chose pour ces gens, par solidarité, par bonté d'âme, par humanité ou pour toute autre raison imaginable.

L'histoire des photographies de Bernard Kouchner avec un sac de riz sur l'épaule me fait juste sourire. Le problème du sac de riz de Monsieur K. n'est pas tant ces photographies que le sac de riz lui-même.

 

Haiku

08.09.10 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais l'informatique

Je ne sais plus qui me demandait ici mon avis sur le système d'exploitation Haiku. C'est intéressant mais horriblement lent, certainement la faute à la programmation orientée objet utilisée partout dans ce système. Malgré cela, le fonctionnement est plutôt bon pour une version qui est toujours une version alpha. Enfin, vu de l'extérieur, parce qu'il ne faut pas essayer de faire des accès concurrents aux disques, il s'ensuit des corruptions de fichiers à répétition.

Un premier regret, sa version alpha 2 est livrée avec un gcc antédiluvien informatiquement parlant puisqu'il s'agit d'un gcc 2.95.3. Naturellement, le système ne connaît pas nativement le Fortran, même pas le 77. Pour tester quelques programmes intéressants, il me faudra compiler un gcc décent et récent.

L'installation d'un gcc moderne s'avère compliquée en raison de la corruption des fichiers lors d'accès concurrents. Les prérequis au Fortran que sont gmp et mpfr compilent aléatoirement et les archives statiques ne sont pas toujours utilisables. N'aimant pas ce qui n'est pas reproductible, je retente donc l'installation de l'image du jour, instable, mais peut-être meilleure du point de vue des accès concurrents aux disques. Croisons les doigts et, n'ayons pas peur, toutes les autres choses que l'on pourra croiser. De toute façon, je teste ce système dans une machine virtuelle Qemu, je ne risque donc pas grand'chose.

Après réinstallation, j'obtiens maintenant un terminal équivalent d'une pseudotitihouaillerie avec un shell bourne tendance GNU canal historique puisqu'il s'agit d'un bash en version 4.0.35(1). Un uname -a me renvoie :

Haiku shredder 1 r38534 Sep 5 2010 06:38:08 BePC Haiku

C'est donc un bon début ! Essayons de faire en sorte que cela continue. Un répertoire du disque contient un tas de fichiers d'en-têtes POSIX, ce qui augure assez bien de la suite. J'ai donc un système avec un compilateur C, un C++, mais pour le Fortran, il faudra recompiler depuis les sources, et un tas de bibliothèques POSIX. Ne compliquons pas les choses et tentons la compilation du gfortran qui va bien avec la version de gcc déjà installée, soit un gfortran 4.3.3. Je n'arrive pas à comprendre les gens qui mettent à disposition des compilateurs C et C++ sans y adjoindre un compilateur Fortran surtout lorsque celui-ci fait partie intégrante de gcc. Passons.

Les compilations des prérequis se passent bien. La configuration de gcc aussi, mais sa compilation échoue. Il paraît que le trigramme i586-pc-haiku n'est pas supportée par gcc stage 1. Je suppose qu'il faut patcher gcc pour obtenir quelque chose d'intéressant. N'ayant pas de temps à perdre avec ce système, je verrai cela plus tard.

Mes premières impressions me laissent une impression bizarre, comme si on avait essayé de marier de force un système POSIX avec le WorkPlaceShell d'OS/2 devenu eComStation, le tout sous la bénédiction d'un noyau qui ne ressemble à rien puisqu'il est écrit en C++. Au final, le système est lent et le bureau est austère voire janséniste mais pas désagréable. Il faut tout de même reconnaître qu'avec la version r38534, je n'ai plus vu de problème de corruption des données sur le disque.

Je crois que je ne saisis pas trop l'intérêt du système en question. J'arrive encore à comprendre l'intérêt de pouvoir réutiliser du code binaire écrit pour BeOS, quoiqu'il ne faille pas perdre de vue qu'informatiquement parlant, il s'agit de très vieux programmes puisque BeOS n'évolue plus depuis une dizaine d'années. Pourquoi ne pas émuler en userland et sur un noyau BSD ou Linux les ABI de BeOS ? Cela me semblerait plus efficace, plus stable et l'équipe de développement pourrait arriver plus rapidement à ses fins. En effet, non seulement le système de base doit être stable, mais il faut encore qu'il supporte une quantité phénoménale de périphériques. Tous ces pilotes restent aujourd'hui à écrire.

Je ne nie pas qu'intellectuellement le projet soit intéressant, mais je trouve la démarche d'OSFree plus saine puisqu'il s'agit de cloner un système d'exploitation singulier et non de cloner un noyau d'un système en rajoutant sur celui-ci tout ce qui existe pour faire tourner des programmes qui proviennent d'un autre système.

 

À gauche ou à l'ouest ?

07.09.10 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit

J'ai écouté d'une oreille pas trop distraite l'émission de Daniel Mermet hier sur France Inter qui n'était pas encore en grève. Étaient invités deux sociologues qui, s'ils n'étaient pas de la gauche radicale et réactionnaire, étaient au moins à l'ouest.

Ces deux penseurs avaient une idée amusante : abroger la TVA en la reportant sur un impôt sur le revenu étendu. Jusque-là, pourquoi pas, c'est la suite qui devient amusante. Le taux de ce nouvel impôt devrait être entre 10% et 90% des revenus fiscaux annuels. Mazette, 90%… Cela devrait contribuer à relancer le tourisme en Suisse ou au Luxembourg.

J'avoue, devant tant d'imbécillité crasse, ne pouvoir réprimer un sourire. Pour la personne qui est au bas de l'échelle, cela ne changera pas les choses puisque les 10% de ce nouvel impôt seront peu ou prou compensés pas la disparition de la TVA. Mais pour les gens qui gagnent un peu plus confortablement leur vie, ce sera un autre problème. Croyez vous sérieusement qu'un cadre supérieur, imposé à 50% de ses revenus, restera dans notre beau pays de France ? Croyez-vous qu'on trouvera encore en France avec une taxation aussi idiote des entrepreneurs pour jouer avec leurs biens, ne pas avoir de couverture sociale et faire fonctionner l'économie réelle ? Un tel système revient à tout niveler par le bas, car il vaudra mieux être pauvre qu'appartenir à la classe moyenne, et ceux qui ne se réduiront pas à la misère iront vers des cieux plus cléments.

Et je passe sous silence les stances habituelles sur les taxations des entreprises, la suppression de la taxe professionnelle, le taux d'impôt sur les sociétés qui a baissé depuis 2007. Daniel Mermet, je t'aime bien, mais de grâce, vérifie les dires de tes invités et arrête de les laisser dire n'importe quoi. Depuis 2004, je n'ai pas vu baisser le taux d'impôt sur les sociétés, ce qui ne veut pas dire que ce taux a baissé en 2004, simplement que je n'ai pas mes archives comptables sous la main pour vérifier. La taxe professionnelle n'a pas été abrogée, seule son assiette a été modifiée. En tout cas, si elle a été supprimé, je n'étais pas au courant puisque j'ai non seulement reçu l'imprimé Cerfa cette année, mais je l'ai aussi payée. Quant aux taxes diverses et variées que peut payer une entreprise en France, le seul adjectif qui me vienne spontanément est effarant. Mais pour s'en rendre compte, il faudrait peut-être de temps en temps laisser parler ceux qui sont confrontés à ce problème, ce qu'ils vivent. Rajouter des taxes parce, soi-disant, elles baissent, c'est bien beau. Depuis cinq ans, les différents impôts ponctionnant les PME ne font qu'augmenter, mais ce n'est pas grave puisqu'il s'agit des taxes locales ou de la part patronale des cotisations sociales. Du point de vue du salarié, rien ne change. Du point de vue du patronat, dont ne l'oublie jamais, l'immense majorité est aujourd'hui moins payée que la médiane des salaires de son entreprise, la vision est un peu différente. Mais ces gens ont d'autres choses à faire que de défiler dans les rues. Ils ont un peu plus de conscience professionnelle puisque s'ils s'arrêtent de travailler, non seulement ils risquent de se retrouver à le rue, mais ils vont encore produire de nouveaux chômeurs.

Et tu n'as pas oublié de parler des retraites. C'est bien. Mais pour être crédible, tu aurais pu dire que depuis le début des années soixante-dix, tous les démographes tirent la sonnette d'alarme. Aucun gouvernement n'a voulu pour des raisons purement électorales traiter le problème, préférant le laisser à son successeur. Et comme c'est au pied du mur qu'on voit le mieux le mur, plus on attend, plus la solution risque d'être douloureuse.

Il y a un vrai problème économique, et ce problème ne pourra pas être résolu par des taxes nouvelles ou des augmentations de taux de taxes existantes. À la limite, on pourrait ponctionner les profits financiers issus des banques et des bourses. Mais ponctionner encore l'économie réelle déjà exsangue est une immense bêtise qui risque juste d'être contre-productive en poussant à la faillite un bon nombre de PME qui sont fragilisées par le système financier depuis l'explosion de la crise en 2008, crise pourtant prévue par de nombreux économistes que personne n'a écoutés.

En ce sens, il est inadmissible d'entendre des salariés s'élever contre l'augmentation de l'âge de départ à la retraite. Le vrai combat n'est pas ce combat d'arrière-garde, mais devrait être un combat pour l'emploi de la tranche des 55-65 ans. Comment veux-tu demander à quelqu'un de travailler jusqu'à 62 ans lorsque l'âge médian d'arrêt d'activité est d'un peu moins de 59 ans ? Il est aussi lamentable de repousser l'âge de départ à taux plein de 65 à 67 ans. Mais ce n'est pas, comme je l'ai entendu, pour remonter le niveau de pensions des femmes. C'est pour éviter que des gens qui se sont retrouvés au chômage puisse avoir de quoi vivre décemment, ce qui est autre chose.

Plus il y aura de chômeurs dans la tranche 55-65 ans, plus cet âge de départ sera repoussé et plus les pensions seront faibles. C'est imparables. Avant de râler contre les différents âges de départ, il faut déjà lutter contre ce qui fait que les gens quittent leur emploi avant l'âge de départ légal ! Et qu'on ne me parle pas de pénibilité puisque la définition de la pénibilité est largement surannée. Il faudrait remettre tout ceci à plat, mais personne ne veut aujourd'hui revenir sur des acquis sociaux qui ne se justifient plus dans la plupart des cas. Conduire un train de marchandise était un métier pénible dans les années 50, lorsqu'on mettait du charbon dans une 141R. À l'heure de la traction électrique, ce n'est plus le cas. En revanche, enseigner dans un collège dans les années 50 n'était pas pénible. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Il faut donc reculer l'âge légal de départ à la retraite, mais toucher l'âge du taux plein n'est pas une fatalité si on se débrouille pour employer cette tranche d'âge. Et là, on entend généralement que ces personnes sont fatiguées, ne sont plus employables, en d'autres termes sont des rebuts de la société. Que ces personnes ne puissent pas faire de travaux physiques est une chose, mais elles peuvent faire tout un tas d'autres choses. Si elles sont mises à l'écart, c'est en grande partie en souvenir de la contribution Delalande. Bizarrement, cette position est assez bien partagée par une droite qui n'est pas au gouvernement. Oui, Daniel, la droite ne peut pas être réduite au simple sarkozysme et il existe une droite largement plus sociale mais qui n'a pas pignon sur rue. Il serait peut-être bon de temps en temps d'inviter ce genre de personnes. Les propos tenus dans ton émission gagneraient en crédibilité.

Je vais aussi rajouter quelque chose qui ne va peut-être pas te faire plaisir, mais à écouter certains de tes invités, j'ai de plus en plus l'impression qu'être de gauche ne signifie pas avoir une fibre sociale. Les réactions de tes invités sont bien plus souvent motivées par la jalousie à l'égard des fortunés que par une recherche d'équité sociale. On pleure sur l'ouvrier pour ne pas avouer que l'on bave sur son voisin cadre supérieur en ignorant superbement la contre-partie de sa réussite sociale. On rêve alors de taxer les gens qui ont de l'argent non pour aider le bon peuple mais pour que ces gens soient moins riches ou pour rétablir une quelconque équité plus saine que l'espèce d'égalitarisme révolutionnaire qui ne mène jamais qu'à un désastre plus grand. C'est cette vision dogmatique qui a engendré l'impôt de solidarité sur la fortune qui lui-même a créé le bouclier fiscal pour éviter des aberrations qui faisaient que certains contribuables avaient plus d'impôt à payer que leurs revenus annuels ! Il est assez cocasse de voir aujourd'hui ceux qui ont permis la création de l'ISF râler sur le bouclier fiscal qui en est directement issu. N'oublie jamais que trop d'impôt tue l'impôt.

 

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