Avec les Grecs, on ne s'en Zorba

09.07.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les financiers, Je hais les politiciens

Vous me pardonnerez ce calembour facile et très approximatif mais il convient parfaitement à la situation actuelle. Quel que soit le point de vue des journalistes et des économistes que j'entends parler de la crise grecque depuis quelques jours, tous oublient volontairement ou non une partie plus ou moins significative du problème. Et selon leurs a priori politiques, le pan passé par pertes et profits est différent.

Posons donc les faits.

La Grèce a truandé ses comptes depuis des décennies. Ce truandage lui a permis d'entrer dans la zone euro — avec un an de retard sur les premiers pays — en lui permettant de financer à peu de frais son économie au travers de dépenses sociales, d'investissement, de traitement de fonctionnaires et de flux financiers divers. Le peuple grec en a donc directement profité, ce qui doit nuancer le fait qu'il est actuellement et pour sa grande majorité dans une misère noire. C'était il y a quinze ans que la Grèce devait être en excédent brut, pas aujourd'hui.

Les pays européens, en particulier les banques, ont acheté à tour de bras cette dette grecque alors qu'elles ne pouvaient ignorer la fragilité de l'état grec qui n'était qu'un secret de Polichinelle. Ce faisant, elle ont permis s'asphyxier les entreprises d'une partie des pays européens, France en tête. En effet, pourquoi prêter à des entreprises à un taux de 3% l'an alors que les bons du trésor grec, même risqués, rapportaient deux fois plus. Et pourquoi s'en priver puisque cette dette grecque était adossée à l'euro et que les autres pays de la zone euro seront contraints de la garantir en cas de défaut grec ?

Lors de la dernière restructuration de la dette grecque, nous avons sauvé notre système bancaire en injectant dans les banques grecques 100 milliards d'euros. Le but était plus d'éviter une contagion à notre système bancaire, donc de sauver les populations les plus fragiles de la zone euro que de sauver la Grèce et sa population.

Mais ce faisant, même si la population grecque n'était pas immédiatement aidée, l'état grec a tout de même bénéficié d'un allègement conséquent de sa dette. Aujourd'hui, le peuple grec n'en peut plus parce qu'une fois de plus l'indigence de son gouvernement ne lui a pas permis d'affronter la réalité en face. Je ne lui jette pas la première pierre, la situation de la France n'est guère meilleure et, si la Grèce saute, nous risquons forts d'être l'un des prochains sur la longue liste des pays à faire défaut dans un avenir plus ou moins proche.

Ainsi, du point de vue de la gauche, l'Europe n'a pas assez payé pour sauver le peuple grec. Du point de vue de la droite, l'Europe a trop payé puisque l'argent emprunté a tout de même bénéficié in fine au peuple grec. Du point de vue de la gauche, on oublie que cet argent a été déversé sciemment dans un puits sans fonds et qu'il s'agit de l'argent des contribuables européens et de la sécurité du système bancaire de la zone euro, de celui de la droite, on oblitère que c'est aujourd'hui que le peuple grec souffre et qu'il faudrait lui donner un peu d'air pour éviter de le ruiner encore un peu plus.

La crise s'amplifiant, les positions se radicalisent. Tsipras veut une aide d'urgence. Certains députés européens sont prêts à la lui donner sous forme d'aide humanitaire. Il s'agit là d'un point de vue à court terme. Les pays du nord, Allemagne en tête, veulent des réformes importantes, gages de remise à niveau à long terme. Ces deux points de vue sont déjà inconciliables du seul point de vue temporel.

La seule solution que l'Europe ait aujourd'hui pour éviter la destruction de la zone euro puisque tel est l'enjeu, c'est de reconnaître que la Grèce fera de toute façon défaut. Jamais cet état ne pourra rembourser une telle dette surtout en devenant jour après jour plus pauvre. Mais il ne s'agit pas non plus d'annuler purement et simplement cette dette parce que cela signifie aussi pour nous, heureux contribuables, une pression un peu plus soutenue. Je vous rappelle que notre beau pays n'a plus été en excédent primaire depuis 1974. Non, il s'agit d'étaler cette restructuration de dette sur plusieurs années et de conditionner les tranches de remises de sa dette aux réformes que l'état grec devra faire. En faisant de la sorte, non seulement il serait possible d'aider efficacement la Grèce mais aussi de lisser pour le système bancaire européen les pertes. À titre d'information, Bercy reconnaissait il y a quelques jours que le système bancaire français était exposé à hauteur de 68 milliards d'euros au risque grec. Avec le hors bilan et les produits financiers, on ne devrait être pas très loin de la centaine de milliards d'euros. Cela représente 5% de l'ensemble de la dette souveraine française, deux cents jours d'emprunts au rythme soutenu que nous avons. Une paille pour un pays comme la France qui n'est absolument pas endetté.

Tous les négociateurs, grecs comme européens qui discutent sur le sujet de cette dette ne devraient jamais oublier ces quelques points. Nous sommes sur une corde raide et s'il faut sauver la Grèce, cela ne doit surtout pas être à n'importe quel prix parce que tous ceux qui veulent absolument une annulation de la dette grecque seront aussi les premiers à descendre dans la rue lorsque l'état piochera dans leurs avoirs bancaires ou augmentera les impôts pour renflouer le trou. L'électeur a souvent une courte vue et une courte mémoire.

Et il est urgent de trouver une issue à cette crise. Urgent car nous ne sommes pas loin de l'explosion d'une bulle obligataire sur laquelle tous les pays occidentaux sont assis. Cette bulle menace d'exploser à tout moment. Je pense à titre personnel que nous n'en sommes plus à savoir si elle va exploser, mais quand. Et lorsqu'elle explosera, la situation qui s'ensuivra fera passer la grande dépression des années 1930 et la crise des subprimes pour une aimable promenade de santé.

À ce propos, je note que pour la première fois ce matin, nous avons entendu parler dans des media nationaux du crash des bourses chinoises qui a pourtant commencé il y a un mois. En un mois, les principales bourses chinoises se sont dépréciées de 30%. Trois mille milliards de dollars se sont évaporés sur le marché des actions. Quand on sait que l'état chinois possède plus de la moitié des actions des entreprises cotées en bourse en Chine, on se dit que le problème aurait été bien plus prononcé dans un état respectant les libertés fondamentales. Je n'ai pas de nouvelles du marché obligataire chinois mais il ne faut pas perdre de vue que la Chine a investi tout ce qu'elle pouvait sur les obligations des états étrangers. Depuis quelques mois, elle investi même en renminbi, ce qui nous réserve de belles surprises en cas de déroute financière durant laquelle le renminbi pourrait bien s'apprécier fortement.

 

Dernière bataille avant la trève estivale

08.07.15 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Mauvais esprit, Déclaration de guerre

En remarque liminaire parce que la liberté, c'est dangereux, cet article n'a aucunement l'intention d'inciter les assujettis à refuser de se conformer aux prescriptions de la législation de la sécurité sociale, notamment de s'affilier à un organisme de sécurité sociale ou de payer les cotisations et contributions dues. Bien au contraire, son auteur réaffirme l'obligation de s'affilier à un organisme de sécurité sociale, pour l'assurance maladie et l'assurance retraite, dans le respect des directives européennes et de leur transposition dans le droit français.

Ceci étant dit, revenons à l'audience du mardi 7 juillet courant qui m'a vu comparaître une fois de plus contre l'URSSAF d'Alsace.

Si vous me lisez depuis quelque temps, vous savez que je suis à titre personnel l'un des libérés de la sécurité sociale, ce qui me vaut quelques procédures devant les tribunaux de notre belle république bananière. Mais, en tant qu'employeur, j'ai aussi un conflit ouvert contre l'URSSAF d'Alsace et concernant mes anciens salariés. En effet, l'URSSAF m'appelle depuis 2010 des sommes totalement aberrantes dont certaines ont déjà été payées deux fois. J'ai eu des saisies hors de toute procédure légale par un huissier corrompu, des menaces de la part de l'URSSAF, j'ai demandé des explications, ma comptable et mon expert-comptable ont essayé de comprendre en vain les calculs folklorique de ce machin que le monde entier nous envie. En juillet 2014, à la suite d'une n-ième contrainte de l'URSSAF, j'ai saisi le TASS. Non que je confie à ce tribunal la moindre légitimité puisqu'il est juge et partie, mais pour stopper la procédure en attendant d'organiser ma défense.

Les épisodes précédents de cette navrante aventure payée entre autre par vos cotisations sont :

En résumé, j'ai saisi le TASS de Mulhouse en juillet 2014 sur la base d'un faux en écriture d'un huissier. J'en avais laissé passer un certain nombre avant de décider à me défendre. Pour le principe, j'ai demandé un renvoi en octobre. En décembre, l'URSSAF s'est fendue en guise de conclusions d'un torche-cul — il n'y a pas d'autres termes — de cinq pages, annexes comprises dont un superbe faux en écriture et a refusé de plaider en face de mes soixante-dix pages de conclusions. Astrid ne savait déjà pas quoi dire.

En février, l'URSSAF s'est permis d'envoyer ses conclusions à la dernière minute. Vu leur contenu, j'ai dû demander un renvoi. Si je ne l'avais pas obtenu, j'aurais récusé le tribunal pour non respect du sacro-saint principe du contradictoire. En avril, l'URSSAF au travers de ma copine Astrid joue d'arguments dilatoires pour obtenir un renvoi en mai puis un autre au 7 juillet puisque le dossier n'était plus suivi par ma copine Astrid et que sa remplaçante n'avait pas encore pu étudier le dossier.

Or le 7 juillet 2015 au matin, je n'avais toujours pas les écritures de l'URSSAF. Mon avocat s'est tout de même présenté à l'audience. L'URSSAF y était représentée et a osé demander un renvoi. Mon avocat s'y est naturellement opposé puisque cela faisait plusieurs mois que nous attendions en vain leurs écritures et que cette même URSSAF nous avait déjà transmis un premier jeu de conclusions tout à fait remarquables.

Ce 7 juillet 2015, il faut dire que la température était exécrable au second étage du tribunal de Mulhouse et le président de séance a réduit son audience autant que possible en ne retenant que les dossiers parfaitement clos. L'URSSAF a donc obtenu un renvoi au 10 septembre à 14h00 en raison des conditions climatiques.

Toutefois, il me semble que le président du tribunal commence à perdre un peu patience puisque l'URSSAF a eu une injonction de conclure dans un délai de quinze jours et que, faute de conclure dans le délai imparti, ses conclusions pourraient être rejetées.

À suivre. Mais rappelez-vous toujours que nous avons le meilleur système de sécurité sociale au monde et que ces procédures sont payées avec vos cotisations et vos impôts.

 

Charges professionnelles

08.07.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les politiciens

Pour éviter de perdre les charges dues par les artisans et les petits patrons en cas de cessation d'activité, l'état français, dans sa grande sagesse, a déclaré que les dettes sociales des indépendants étaient des charges personnelles et non professionnelles. C'est pratique, cela permet de les recouvrer même en cas de faillite.

Je viens pourtant de tomber sur un arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 10 décembre 2013 (JurisData 2013-030950) qui requalifie les charges RSI en dettes professionnelles dans le cas d'une procédure de surendettement avec tout ce que cela implique. Quoi de plus naturel, ce sont des dettes qui sont nées d'une activité professionnelle.

 

La Grèce, l'Islande et les autres

06.07.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les financiers, Je hais les politiciens

Voilà, le résultat du référendum grec est tombé. Le non aux propositions des créanciers de la Grèce sur de nouvelles mesures de rigueur l'a emporté avec 61,31% contre 38,69%, selon les résultats définitifs publiés lundi par le ministère de l'intérieur. La participation s'établit à 62,5% des électeurs, ce qui nous apprend qu'au mieux — au mieux —, 38,32% des électeurs grecs ont voté « oxi ». J'écris au mieux car malgré une recherche poussée, je n'a pas réussi à obtenir le pourcentage de bulletins nuls ou blancs. Je ne sais pas pourquoi, mais il devait y en avoir.

Le seul vainqueur de ce référendum grec est l'ochlocratie. Pas la démocratie, l'ochlocratie car la démocratie ne peut fonctionner que lorsque l'intérêt général à moyen et long terme recoupe la somme des intérêts particuliers à court terme. Si ce n'est plus cas, la démocratie s'efface devant quelque chose qui ressemble à la loi du plus fort, ce plus fort n'ayant pas forcément la sagesse de choisir la bonne option pour s'en tirer au mieux à long terme. Le bon sens paysan disait chez nous que « ventre affamé n'a pas d'oreilles ».

Mais revenons à l'état de la Grèce. Les problèmes financiers de la Grèce ne sont pas récents. Déjà, au mitan du XIXe siècle, la Grèce a appelé à l'aide les grandes puissances européennes. Ces puissances l'ont aidée en contrepartie de la promesse d''instaurer d'un cadastre en Grèce. Plus de cent soixante ans plus tard, il n'y a toujours pas de cadastre exhaustif dans ce pays et, par bien des apects, ce n'est pas un pays moderne quoi qu'on puisse en dire.

L'Union Européenne a donc accepté dans la zone euro un état aux finances catastrophiques et géré depuis l'époque des colonels de manière pour le moins légère. Tout le monde était content, les grecs qui continuaient à vivre sur un grand pied avec l'argent des autres européens et les créanciers qui bénéficiaient de taux intéressants qu'ils se sont empressés de refiler à leurs épargnants sous la formes de produits dérivés.

Dans toute économie normale, lorsqu'une entité fait faillite, les créanciers et les membres de l'entité en faillite doivent prendre leurs pertes. Dans le cas de la Grèce, le peuple grec — responsable au titre des différentes élections — et les investisseurs dans la dette grecque sont principalement de petits épargnants qui ne savent généralement pas que leurs assurances-vie ou leurs plans d'épargne contiennent de la belle dette grecque bien moisie.

Il y a déjà eu des restructuration de la dette grecque, quoi qu'on puisse dire (la bagatelle de 100 milliards d'euros en 2012). La contrepartie de ces restructurations est pour la Grèce un certain nombre de réformes. Et ces réformes n'ont été que marginales. Pire, malgré les promesses de Tsipras en janvier 2015, rien n'a été fait depuis. Il est donc normal que la Grèce soit aujourd'hui devant un mur.

Pourquoi ? Ne pas vouloir faire de réformes revient à continuer sur la même pente. C'est confortable, cela a fonctionné depuis des décennies, pourquoi est-ce que cela devrait s'arrêter maintenant, là, tout de suite ? Le fait pour une minorité de grecs d'avoir dit non à ce référendum revient à chercher à imposer aux créanciers de prendre leurs pertes sans que le peuple grec ne veuille en prendre sa part. On comprend que cela coince en Allemagne. Mais ce qu'on sait un peu moins parce que c'est nettement moins médiatisé, c'est que l'Italie renâcle furieusement, que l'Irlande manifeste sa désapprobation et que l'Espagne et le Portugal n'en pensent pas moins. Tout le monde semble donc être prêt à aider une fois de plus la Grèce, mais sans vouloir absolument remplir le tonneau des Danaïdes. Et pour cela, il n'y a qu'une seule chose à faire, il faut que le gouvernement et le peuble grecs acceptent de réformer leur pays, ce qu'ils ne semblent vraiment pas prêts à faire. Pourtant, il faudra un jour que tous les gouvernements européens, pas seulement le gouvernement grec, commencent à comprendre qu'il est impossible de dépenser l'argent des autres sans penser à en gagner honnêtement par ailleurs. Parce que si nos gouvernements n'arrivent pas à le comprendre rapidement, nous serons tous officiellement pauvres. La réalité rattrapera la démagogie et dépassera le cynisme.

Plus grave encore, certains journalistes et certains hommes politiques s'appuient sur l'exemple de l'Islande. Alors, puisque des gens qui devraient pourtant être bien informés continuent sans scrupule à répandre des allégations douteuses, en particulier que l'Islande « a dit à ses cranciers et au FMI d'aller se faire voir, a nationalisé les banques, a arrêté les fraudeurs, a réalisé des allègements de dette et est maintenant en très forte croissance », je dois mettre quelques points qui manqueraient sur les i puisque l'Islande n'est qu'une utopie économique que l'on répète ad nauseam comme un mantra, une vérité absolue sans réellement aller voir ce qu'il s'y trame pour justifier certaines propositions grecques.

J'entends et je lis, ce qui est plus grave, partout que l'Islande a quitté le programme d'aide du FMI. Ce n'est pourtant pas le cas, il suffit d'aller faire un tour sur le site internet du FMI pour s'en convaincre. Tous les rapports sur l'état de l'Islande et les aides accordées s'y trouvent. Même un regard parfaitement superficiel comme celui d'un journaliste devrait voir que l'Islande, loin de là, n'a pas jeté le FMI hors du pays, FMI qui d'ailleurs ne tarit pas d'éloges pour l'Islande. Une lecture un peu plus attentive montre même que l'Islande a scrupuleusement suivi les conseils du FMI. Chose intéressante lorsque l'on lit tous les documents en détail, dans plusieurs cas, surtout quand il était question des banques, l'Islande est allée bien plus loin dans la logique libérale voir libertarienne que ne le recommandait le FMI.

Lorsque l'on parle de l'Islande, souvent revient la notion de révolution démocratique et anticapitaliste. L'Islande aurait eu le courage d'imposer à ses créanciers de prendre leurs pertes. Objectivement, l'Islande n'a pas renfloué ses banques. Mais ce n'était pas faute d'avoir essayé. En effet, la Commission Spéciale d'Investigation a écrit dans un rapport bien informé que le gouvernement islandait a tenté tout ce qu'il pouvait pour sauver les banques, y compris en demandant des prêts insensés pour payer les dettes des banques. On est donc loin du pays qui a envoyé ses créanciers au diable. Je ne lis pas l'islandais, mais je pense que les informations vraiment croustillantes figure dans la version en langue vernaculaire. La véritable histoire est, avant qu'elle ne soit réécrite, que le gouvernement islandait a essayé par tous les moyens de sauver ses créanciers mais que, hier comme aujourd'hui totalement incompétent, il a failli à sa tâche.

On apprend aussi dans ce rapport que les parlementaires islandais ont reçu de la part des banques beaucoup d'argent. De l'argent gratuit et sans aucune obligation. Et pire que tous, ces parlementaires ne sont pas — à l'exception de deux qui doivent payer pour tous les autres — les mêmes que ceux qui ont été reconnus coupables de fraude ou de délit d'initié. Les deux exceptions sont :

  • le chef de cabinet d'un ministère (Baldur Sakfelldur) qui a cru bon vendre la totalité de ses actions peut après avoir assisté à une réunion sur l'état des banques et qui a été condamné pour délit d'initié, trop bête qu'il était pour brouiller les pistes. Cela me rappelle le film Le Président avec Gabin et Blier que tout homme politique devrait regarder au moins une fois dans sa vie ;
  • Lárus Welding, que certains considèrent comme un acteur clé et qui est mentionné à plusieurs reprises dans le rapport, a été condamné hier et sera emprisonné pendant six mois, plus trois mois de probation. Il conserve tout l'argent qu'il a fait et compte faire appel. Compte tenu de la pente libertaire de la haute cour, sa condamnation n'est pas encore une certitude. La peine de prison qu'il vient d'obtenir devant les tribunaux d'instance inférieure est beaucoup beaucoup plus réduit que le procureur l'espérait, ce qui n'augure rien de bon pour les affaires ultérieures.

Le premier ministre, quant à lui, a été reconnu coupable de négligence dans son travail. Il reste complètement impuni. The Guardian en a fait un article : L'ex-Premier Ministre islandais Geir Haarde blanchi de négligence bancaire [Iceland ex-PM Geir Haarde cleared of bank negligence]. L'article de The Guardian était initialement intitulé « l'ex-Premier Ministre islandais Geir Haarde reconnu coupable du krach bancaire » [Iceland ex-PM Geir Haarde found guilty of banking crash failure], titre qui a été diffusé sur Twitter, ce qui bien sûr est le contraire absolu de la vérité.

Tous les autres protagonistes qui ont été condamnés à ce jour sont à la bulle bancaire islandaise ce que Bernie Madoff est à Goldman Sachs : des fraudeurs qui ont profité du climat, mais n'étaient pas des acteurs clés dans la bulle ou l'effondrement.

Mais passons à la nationalisation des banques. En effet, l'Islande a nationalité ses banques en un temps record, plus rapidement que le premier gouvernement Mitterrand a mis pour nationaliser le fleuron de l'industrie française au début des années 1980. Mais elle a aussi privatisées à nouveau deux des trois grandes banques nationales en un temps record, ce qui a permis aux créanciers de les racheter et de les vendre en un temps record à des fonds étrangers pour récupérer leurs avoirs. Si la troisième est encore dans le giron de l'état islandais, ce n'est qu'en raison des affaires judiciaires qui la secouent (Icesave). Non seulement l'Islande a privatisé son secteur bancaire, mais en plus, il a été vendu à l'étranger.

Il paraît aussi que l'Islande a procédé à un allègement de sa dette. Oui, mais pas vraiment. car l'endettement est réparti sous deux formes :

  • prêts liés à un indice de devises ;
  • prêts liés à un indice des prix à la consoàmmation.

Les premiers prêts ont plus que doublé au cours de l'effondrement du système bancaire. Il y a eu quelques réductions de dettes parce que ces prêts étaient manifestement illégaux, ce que confirme les minutes des procès tenus en Islande :

  1. Un Islandais en quasi-faillite attaque la banque en justice parce que le prêt était illégal (2011) (2012).
  2. Le tribunal oblige la banque à reprendre le prêt.
  3. Le gouvernement soutient que la décision du tribunal ne constitue pas un précédent et définit une loi qui limite l'étendue de l'allègement de la dette. Exemple.
  4. Un Islandais en quasi-faillite attaque la banque en justice parce que le prêt était illégal, et parce que la législation gouvernementale qui en découle était illégale, gagnant le procès. Par exemple.

Le second type de prêt est un peu plus compliqué à appréhender. Normalement, lorsque les prêts sont liés à l'indice des prix à la consommation — une chose rare en soi dans d'autres pays —, les remboursements augmentent en ligne avec l'inflation. Le système islandais est différent. Si vous empruntez 100 000 couronnes par an et que l'inflation passe à 10% (pas rare à l'époque post-effondrement, l'inflation a varié entre 4% et 20%), alors à la fin de l'année, vous devez 110 000 couronnes, même si vous avez payé des intérêts. Cela signifie que si votre prêt hypothécaire est de ce type, vous ne parviendrez jamais à le rembourser, parce que l'Islande depuis qu'elle a sa propre monnaie n'a jamais réussi à avoir une faible inflation. En effet, la couronne islandaise a été introduite en 1922 à parité avec la couronne danoise et a, depuis lors, perdu 95,95% de sa valeur. L'inflation est endémique et permanente en Islande. C'est pourquoi la plupart des prêts en Islande sont indexés sur les prix.

Il y a eu un programme d'allègement appelé la règle de 110%, qui a réduit toute hypothèque qui était de plus de 110% de la valeur de la propriété à 110% de la valeur de la propriété. Ceux qui étaient sous l'eau sont restés sous l'eau et cela ne les a guère aidé, car quelques mois plus tard, ils sont de retour là où ils en étaient.

Dans l'ensemble, l'allègement de la dette des ménages s'élève à 196,3 milliards d'ISK [couronnes islandaises, ndlr] tandis que les prêts indexés ont augmenté de 360 milliards d'ISK depuis septembre 2008 en raison de cette indexation (source).

Fondamentalement, les ménages sont moins bien lotis qu'ils ne l'étaient, pas mieux lotis, et les programmes de réduction de la dette n'étaient rien de plus que des manœuvres politiques pour gagner des voix, pas d'amnistie de la dette à proprement parler comme celle pour laquelle le mouvement Occupy avait fait campagne.

Mais une autre parole d'évangile stipule que l'Islande est désormais en forte croissance. Pas vraiment. L'Islande survit, elle ne croît pas. L'inflation pour 2012 est de l'ordre de 4%, en 2011 elle était de l'ordre de 5%. La croissance est estimée à 2,7% pour 2012 et était de 2,6% en 2011 (sources : estimation). Ce n'est pas réellement le signe d'une économie en bonne santé, surtout lorsque l'on regarde de près les chiffres fournis pas http://www.hagstofa.is/ et http://www.sedlabanki.is/ qui montrent que la plus grande partie de cette croissance provient de la croissance d'une bulle immobilière en Islande. Les entreprises ne récupèrent pas.

Aussi, gardez à l'esprit que la croissance est mesurée en couronne islandaise qui a une valeur d'environ 20-50% de ce qu'elle était en 2008, ce qui signifie que ces chiffres de croissance ne sont rien de plus que des erreurs d'arrondi dans l'effondrement de l'Islande en termes de devises étrangères.

Toujours convaincus que l'Islande est un exemple à suivre et qu'il faut l'adapter au cas grec ?

 

Coûts marginaux de gestion

04.07.15 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les politiciens

Comme l'aurait sans doutre signalé avec sa verve habituelle notre cher président de la république normal — le président, pas la république —, la sécurité sociale est gratuite. C'est l'état qui paie. Et cet état paie grassement pour son fonctionnement.

Or la sécurité sociale que le monde nous envie, c'est d'une part des prestations qui sont fournies à ses heureux cotisants et des coûts de gestion. C'est pourquoi le ministredes affaires sociales et de la santé et le ministre délégué chargé du budget ont demandé à l'Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) ainsi qu'à l'Inspection Générale des Finances (IGF) de conduire une mission relative à la gestion de l'assurance maladie anciennement obligatoire depuis l'arrêt de la cour de cassation du 18 juin courant et à la gestion des assurances maladie complémentaires. Il paraît que ces travaux s'inscrivent dans le cadre des travaux de modernisation de l'action publique initiés par le gouvernement.

Je ne vais pas vous paraphraser ledit rapport, simplement vous donner quelques axes de réflexions.

La sécurité sociale a perverti les mentalités, les Français n'ont plus aucune idée de la valeur des choses. Tout irait mieux si on rendait leur argent aux Français avec moins de charges sur leur salaire. Les gens qui pensent que la santé est gratuite sont soit abrutis par l'état, soit ils n'ont jamais lu leur feuille de paie sur laquelle figurent leurs cotisations.

Henri Pigeat

Mais revenons à cette mission dont l'objet était d'approfondir l'état des lieux en matière de dépenses de gestion de l'assurance maladie obligatoire et de proposer des pistes de réduction de ces dépenses et d'amélioration de la qualité de service offerte aux assurés. Plutôt que de s'engager dans des comparaisons internationales difficiles à exploiter, cette mission a procédé par analyse des études et des données nationales disponibles et par l'exploitation d'un questionnaire adressé aux opérateurs de l'assurance maladie, quelle soit obligatoire ou complémentaire.

Il en ressort immédiatement que l'assurance maladie est marquée par le poids des systèmes d'information qui structurent profondément son organisation et qui contribuent à expliquer les écarts d'efficacité entre les différents organismes. Mais il ressort aussi de ce rapport que les assurances santé privées sont moins chères et plus efficaces que la sécurité sociale. Ceux qui ont le choix de leur assurance — c'est-à-dire tous les Français depuis l'ordonnances 2001-350 — ne veulent absolument pas qu'on les réintègre dans le giron du monopole autoproclamé de la sécurité sociale.

Parlons maintenant de chiffres. La gestion des assurances maladie obligatoire et complémentaires a coûté 12,5 milliards d'euros à la collectivité en 2011 (sources : commission nationale des Comptes de la Sécurité sociale pour l’assurance maladie obligatoire, DREES pour l’assurance maladie complémentaire). Il s'agit donc de trouver des moyens permettant une meilleure gestion de l'assurance maladie obligatoire et complémentaire.

Et ce n'est pas difficile. La gestion du risque maladie est fortement structurée par la distinction entre l'assurance obligatoire et l'assurance complémentaire malgré certaines exceptions comme le régime Bismark d'Alsace-Moselle et les mutuelles de la fonction publique. Au total, quatre-vingt-six opérateurs gèrent quatorze régimes obligatoires répartis en trois régimes généraux (CNAMTS, MSA et RSI) et onze régimes spéciaux. Gravitent autour de cette nébuleuse les vingt organismes conventionnés du RSI, le Gamex et quelques autres prompts à se jeter sur le gâteau à se partager. Le secteur de l'assurance complémentaire est encore plus fractionné avec plusieurs centaines d'organismes qui assurent une prise en charge complémentaire (682 exactement à la fin 2011). Il faut cependant noter que la recherche d'une efficacité toujours plus importante amène le secteur complémentaire à se restructurer rapidement et à réduire drastiquement le nombre de ses intervenants.

Néanmoins, la mission estime nécessaire de renforcer la transparence sur les coûts de gestion, qu'il s'agisse des régimes obligatoire ou complémentaire, au profit des assurés. En outre, dans l'hypothèse où cette orientation n'entraînerait pas une diminution significative des frais de gestion dans les années à venir, la mission considère que la modération des frais de gestion pourrait être ajoutée aux conditions existances des contrats solidaires et responsables qui ouvrent le droit à des réductions fiscales et sociales.

La mission remarque aussi que des gens qui ne cotisent pas à l'usine à gaz de l'assurance maladie française bénéficient quand même de celle-ci quand les cotisations sont eux-mêmes privés de certains prestations. Elle pointe l'AME et la bonne conscience qu'elle procure.

La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, mais elle doit en prendre fidèlement sa part.

Michel Rocard.

Le rapport et son détail : assurance_maladie_rapport_2014.pdf

Mais revenons à ce qu'est exactement l'assurance maladie à la française. L'assurance maladie est un dispositif chargé d'assurer un individu face à des risques financiers de soins en cas de maladie, associé parfois au versement d'un revenu minimal lorsque l'affection prive la personne de travail. C'est un dispositif de sécurité sociale (au sens large) et de protection sociale. Un système d'assurance maladie étatique peut être géré par un organisme d'état, délégué à des organismes privés, ou bien être mixte. Son fonctionnement, comme toutes les assurances, est construit sur la mutualisation du risque. Chaque personne cotise en échange de quoi elle est remboursée selon un barème fixé.

Le problème, lorsqu'un système d'assurance maladie est étatique, est que le dogmatisme et la politique peuvent rapidement supplanter la logique des actuaires. La prime payée par l'assuré ne suis pas forcément les règles de l'assurance pure qui n'est basée que sur le risque puisque le système étatique remplit à la fois une fonction d'assurance et une fonction de répartition dans lesquels les plus aisés — ou ceux que le gouvernement et les partenaires sociaux considèrent comme les plus aisés — paient pour les plus défavorisés. Il n'y a plus aucun rapport entre la prime et le risque couvert, plus de contrat ou de responsabilité. Ce système, à terme, rend arbitrairement certaines personnes irresponsables et d'autres responsables.

En France, le montant les primes appelées cotisations est proporitionnelle d'une part au revenu, mais aussi à sa profession (libérale, fonctionnaire, salarié…). Jamais il n'est adossé à un quelconque calcul de risque. Il entraîne mécaniquement l'absence complète de responsabilité des assurés puisqu'il est impossible de demander à quelqu'un d'être responsable lorsqu'on l'empêche d'être libre. Les gouvernements ont beau jeu d'appeler continuellement à la responsabilité des assurés assujettis alors qu'ils les déresponsabilisent en leur enlevent toute libérté de choix. D'où les surconsommations médicales, les files d'attentes, les déremboursements permanents, etc.

Certains théoriciens comme Hans-Hermann Hoppe mettent en doute l'assurabilité même de la santé. En effet, notre santé n'est pas totalement aléatoire, puisque par nos comportements nous pouvons grandement l'influencer (alimentation, tabac, hygiène de vie). Est-il juste qu'un non-fumeur participe aux frais de santé d'un fumeur atteint d'une maladie des poumons ? La sélection du risque fait partie intégrante du métier de l'assureur. Cela signifie-t-il qu'un handicapé ou quelqu'un de gravement malade doive être laissé aux seuls soins de la solidarité privée, faute de pouvoir être couvert par une assurance ? L'assurance par définition couvre le risque aléatoire, et non les événements certains : il suffirait donc d'être assuré avant l'événement, par exemple dès la naissance. Une telle prise en charge de soi-même semble impensable dans les pays où l'étatisme oblitère la responsabilité individuelle en prétendant s'occuper de la santé de chacun. Pourtant que fait l'état (ou la gestion collective au travers d'institutions telles que la sécurité sociale en France) si ce n'est jouer le rôle d'un assureur, ce qu'il fait très mal et à un coût démesuré ?

Nous sommes aujourd'hui exactement dans la situation que Bastiat avait prédite :

Supposez que le gouvernement intervienne. Il est aisé de deviner le rôle qu'il s'attribuera. Son premier soin sera de s'emparer de toutes ces caisses sous prétexte de les centraliser ; et pour colorer cette entreprise, il promettra de les grossir avec des ressources prises sur le contribuable [...] Ensuite, sous prétexte d'unité, de solidarité (que sais-je ?), il s'avisera de fondre toutes les associations en une seule soumise à un règlement uniforme. Mais, je le demande, que sera devenue la moralité de l'institution quand sa caisse sera alimentée par l'impôt ; quand nul, si ce n'est quelque bureaucrate, n'aura intérêtà défendre le fonds commun ; quand chacun, au lieu de se faire un devoir de prévenir les abus, se fera un plaisir de les favoriser ; quand aura cessé toute surveillance mutuelle, et que feindre une maladie ne sera autre chose que jouer un bon tour au gouvernement ? 

Frédéric Bastiat en 1850

Henri Lepage quant à lui fait un autre constat :

Le système poursuit en réalité d'autres finalités que celle de soigner et de guérir les malades. La sécurité sociale est en effet devenue un gigantesque mécanisme de redistribution de rentes au profit d'intérêts puissamment structurés et implantés au cœur de la vie politique française.

Retournons-nous maintenant sur l'histoire récente. Puisque le système français est tout de même un système d'obédience vaguement communiste, regardons un peu ce que peut nous enseigner la médecine soviétique. En 1918, l'Union Soviétique est devenue le premier pays à promettre l'universalité des soins de santé du berceau à la tombe par la socialisation complète de la médecine. Le droit à la santé est en effet devenu un droit constitutionnel des citoyens soviétiques. Les avantages proclamés de ce système constitaient en ce qu'il réduirait les dépenses et éliminerait les pertes qui proviennent de la duplication inutile, en d'autres termes de la concurrence. Remarquez bien que ces buts sont en tous points semblables à ceux utilisés par Barack Obama et Nancy Pelosi, des buts séduisants et humains de couverture universelle et de bas coûts avec les résultats que l'on sait.

En Union Soviétique, le système a eu des décennies pour réussir. Pourtant, l'apathie répandue et la pauvre qualité du travail ont paralysé le système des soins. Je cite ici des extraits d'un texte écrit pas un ancien chirurgien soviétique.

Dans les profondeurs de l'expérience socialiste, les établissements de soins en Union Soviétique étaient au moins un siècle derrière le niveau moyen américain. De plus, la saleté, les odeurs, les chats errants dans les corridors, l'ivrognerie du personnel médical et l'absence de savon et de produits nettoyants, additionnés au désespoir et à la frustration, ont paralysé le système. Selon les propres évaluations officielles russes, 78 % de toutes les victimes du SIDA en Russi ont contracté le virus par des aiguilles sales ou du sang contaminés par le virus dans les hôpitaux d'état.

En Russie soviétique, l'irresponsabilité s'exprimait ainsi : « ils feignent de nous payer et nous feignons de travailler. » Le contraire eut été étonnant lorsque l'on sait qu'un neurochirurgien recevait un salaire de 150 roubles, soit un tiers du salaire moyen d'un conducteur d'autobus. S'ensuivit alors une pière qualité des services, une corruption généralisée et d'innombrables décès. Pour recevoir les services de base de la part des médecins et du personnel infirmier, les patients devaient donner des pots-de-vin. Cet ancien chirurgien soviétique a même déclaré :

J’ai même été témoin du cas d’un malade qui, n’ayant pu acquitter le pot de vin, est mort en essayant d’atteindre un cabinet de toilette au bout du long couloir après une chirurgie cérébrale. L’anesthésie n’était pas chose usuelle pour les avortements ou les chirurgies mineures de l’oreille, du nez, de la gorge et de la peau. C’était un moyen d’extorsion par les bureaucrates sans scrupules de la médecine.

Chose perverse, il fallait tout de même améliorer les statistiques de mortalité très élevée dans ce système et on donnait généralement congé aux patients avant qu'ils ne donnent leur dernier souffle à l'hôpital d'état.

Je reprends ici les parole de cet ancien chirurgien :

Ayant été député populaire dans la région de Moscou de 1987 à 1989, j'ai reçu beaucoup de plaintes de négligence criminelle, de pots-de-vin pris par des apparatchiks de la médecine, des ambulanciers ivres et d’intoxication alimentaire dans les garderies et les hôpitaux. Je me rappelle le cas d'une fille de quatorze ans de ma zone qui est morte de néphrite aiguë dans un hôpital de Moscou. Elle est morte parce qu'un docteur avait décidé qu’il valait mieux économiser les précieux films radiographiques (importés par les Soviets contre de la monnaie forte) au lieu de revérifier son diagnostic. Ces radios auraient réfuté son diagnostic de douleur neuropathique.

Au lieu de cela, le docteur a traité l'adolescente avec une compresse chaude, ce qui l'a tuée presque immédiatement. Il n'y avait aucun remède légal pour les parents et les grands-parents de la jeune fille. Par définition, un système de payeur unique ne peut pas permettre un tel remède. Les grands-parents de la fille ne pouvant pas faire face à cette perte sont tous les deux morts dans les six mois suivants. Le docteur n'a reçu aucune réprimande officielle.

Ce n'est pas étonnant que les fonctionnaires et bureaucrates du gouvernement du Parti communiste, dès 1921 (trois ans après la socialisation de la médecine par Lénine), se soient rendu compte que le système égalitaire des soins était bon seulement pour leurs intérêts personnels comme donneurs, administrateurs et distributeurs de rations ─ mais pas comme utilisateurs privés du système.

Comme dans tous les pays avec la médecine socialiste, un système à deux vitesses a été créé. L'un pour la masse populaire et l'autre, d'un niveau de service complètement différent, pour les bureaucrates et leurs serviteurs intellectuels. En URSS, tantdis que les ouvriers et les paysans mouraient dans les hôpitaux d'état, la médecine et les équipements qui auraient pu les sauver demeuraient inutilisés dans le système de la nomenklatura. À la fin de l'expérience socialiste, le taux de mortalité infantile officiel en Russie était plus de 2,5 fois plus haut qu'aux États-Unis. Plus de cinq fois celui du Japon. Pire, le taux de 24,5 morts pour mille naissances vivantes a été remis en question récemment par plusieurs députés russes qui prétendent que c'est sept fois plus qu'aux États-Unis puisque d'après les derniers chiffres, le taux de mortalité infantile russe serait de 55 à comparer au taux américain de 8,1 pour mille naissances vivantes. Et encore, le chiffre des États-Unis est biaisé. Il est l'un des plus hauts des pays industrialisés puisqu'il inclut aussi les enfants morts en bas âge, donc les prématurés qui comptent la majorité des morts infantiles.

En effet, la plupart des pays ne comptent pas les morts des prématurés. Certains ne comptent pas les morts qui surviennent dans les soixante-douze premières heures. Quelques pays ne comptent pas même les morts dans les deux premières semaines de leur vie. A contrario, à Cuba qui se fait forte d'un taux de mortalité infantile très bas, les enfants en bas âge sont seulement enregistrés quand ils ont plusieurs mois, sortant ainsi des statistiques officielles toutes les morts d'enfants, nombreuses, qui ont eu lieu dans les premiers mois de la vie.

Mais revenons au cas de la Russie. Après soixante-dix dans de socialisme riant, 57 % de tous les hôpitaux russes n'avaient pas l'eau chaude courante. Pire encore, 36 % des hôpitaux situés dans les secteurs ruraux de la Russie n'avaient pas d'eau ou d'égout du tout. Pourtant, la Russie soviétique était un pays surdéveloppé puisqu'elle produisait une bombe thermonucléaire et une chaussure de taille 42 par habitant et par an. Tout en développant ses systèmes d'armements, ses programmes d'exploration spatiale, la Russie soviétique a totalement ignoré les besoins humains de base de ses citoyens.

À ce point du raisonnement, il faut constater que la qualité épouventanble des services de santé n'est pas l'apanage de la seule Russie soviétique. Elle n'est que le résultat d'un monopole d'état sur les soins. Et ce résultat peut arriver dans n'importe quel pays.

C'est sans doute que fort de cette expérience, la plupart des pays asservis par l'empire soviétique ont délaissé le système entièrement socialiste pour la privatisation de leur système de santé en s'assurant qu'il y ait une concurrence entre plusieurs entités. D'autres, incluant beaucoup de démocraties européennes socialistes ont l'intention de privatiser le système de soins et de décentraliser le contrôle médical. On y voit la propriété privée d'hôpitaux et d'autres unités de soins comme un facteur déterminant critique d'un nouveau système plus efficace et humain.

C'est ce qu'on voit un peu partout autour de nous. C'est ce qu'on ne voit pas en France. Pire, la France est le seul état qui rame à contre-courant. Sans doute avons-nous raison contre le reste du monde une fois de plus.

L'ennui dans ce monde, c'est que les idiots sont sûrs d'eux et les gens sensés pleins de doutes.

Bertrand Russel

 

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