Sauf si vous avez passé récemment quelques jours sur la planète Mars, il n'a pas pu vous échapper que des rumeurs circulent sur un éventuel mariage entre PSA et General Motors. De ce que j'entends ici et là, PSA est trop petit, n'est pas assez performant et est voué à la disparition s'il ne fait rien. Pourtant, en 2011, le bénéfice de PSA n'est que de la moitié de celui de General Motors, ce qui au vu de la différence de taille des deux entreprises est un résultat qui n'est pas si mal que cela. Par ailleurs, General Motors est un colosse au pieds d'argile qui a été sauvé in extremis de la faillite il y a seulement trois ans.
Pire que tout, je lis que PSA construit des automobiles de petite et moyenne gammes. Pourtant, si je regarde ce qui a été fabriqué ces vingt dernières années par PSA, je vois tout de même chez Peugeot les 605, 607 et 508 et chez Citroën les XM et C6. En allant un peu plus loin, je trouve les Talbot Tagora, 604 et CX. Ce n'est pas si mal. Dire que ces voitures entrent dans la catégorie des voitures moyennes relève de la contre-vérité. Prétendre qu'elles auraient pu mieux se vendre est une lapalissade tant les économies de bout de chandelles demandées par Jacques Calvet sur les 605, XM et plus tard 607 ont durablement terni l'image de ces excellentes routières. Pensez simplement que la XM a été la voiture française qui s'est le mieux vendu en Allemagne et que si le bureau d'étude de PSA n'avait pas utilisé des connecteurs électriques inadaptés, les premières séries n'auraient pas eu l'image catastrophique et injustifiée qu'elle a traînée jusqu'à son retrait du catalogue.
Donc PSA cherche une alliance avec GM. Très bien. Que voyons-nous chez GM ? Une marque européenne, Opel, qui pour le coup ne fait que des automobiles entrant dans les catégories petites et moyennes et dont la fiabilité mécanique laisse à désirer. PSA risque donc de se retrouver en concurrence frontale avec une marque du même groupe — si l'alliance se fait — sur son propre territoire.
Souvenez-vous aussi que PSA a, dans les années 1970, tenté de tuer Citroën. Les véhicules étudiés entre 1974 et le début des années 1980 par Citroën étaient soit des Peugeot rebadgées (LN, LNA), soit des véhicules bas de gamme (Visa). La CX a failli être tuée en lui greffant un moteur d'origine Renault plus que calamiteux alors que le moteur issue de la DS donnait toute satisfaction. Citroën qui venait juste de fabriquer la SM et la CX s'est vu transformé en vendeur de boîtes à savon et il a fallu attendre l'arrivée de la BX puis de la XM pour qu'il y ait un début de renaissance. Et cette renaissance n'a été possible que parce que les clients de la marque attendaient un véhicule à l'identité forte, c'est-à-dire avec une suspension hydropneumatique et un système de frein à haute pression.
Dans le même temps, et après l'échec de sa 604, Peugeot tente de ressusciter la marque anglaise de prestige Talbot rachetée à grands frais. Il y a eu quelques réussites comme la Tagora, mais assez rapidement, Peugeot n'a pu assurer l'avenir de la marque et le dernier véhicule Talbot s'est vu affublé d'une calandre de 205 pour donner naissance à la 309, un numéro hors série chez Peugeot et un enterrement sans fleurs ni couronnes pour Talbot. Et la marque de prestige de PSA ayant disparu, Peugeot décide de relancer sous sa marque propre des véhicules de prestige avec les résultats que l'on connaît.
Il y a donc aujourd'hui dans le giron de PSA deux marques, l'une, Peugeot, construisant principalement des véhicules des classes inférieures et moyennes, et l'autre, Citroën, plus diversifié, mais avec une clientèle assez spécifique. Les deux marques produisent aussi quelques véhicules haut de gamme. Que serait l'avantage de GM dans une telle alliance ? Tirer Peugeot vers le haut en concurrençant Open ? Certainement pas. Quant à voir un jour un véhicule issu de GM avec une suspension hydropneumatique, je n'ose même pas y croire.
PSA a beaucoup à perdre avec une telle alliance. Je ne pense pourtant pas que la finance reine se satisfera de ces arguments. Puisse la famille Peugeot détentrice d'encore plus de 30% du capital (et plus de 40% des droits de votes) être raisonnable !
François Bon, fondateur de la maison d’édition numérique Publie.net a récemment mis en ligne sa propre traduction du « Le Vieil Homme et la Mer » d’Ernest Hemingway. Cette traduction est le fruit d'un travail original, François Bon ayant toujours été choqué par la mauvaise traduction de Dutour vendue par Gallimard de longue date. Sachant que le livre étant tombé dans le domaine public, sa seule erreur fut qu'il croyait qu'il l'était aussi en France. Pour la petite histoire, le fichier était téléchargeable gratuitement ce week-end sur un site canadien.
Vingt-deux exemplaires en tout et pour tout ont été téléchargés jusqu'à ce que les Editions Gallimard envoient un courrier aux libraires numériques pour les informer qu’ils étaient propriétaires des droits d’édition au format livre numérique et demandent à François Bon de retirer le fichier qui est assimilé à de la contrefaçon.
Après avoir reçu ce courrier, François Bon écrivait en tout honnêteté :
Ce matin, M. Antoine Gallimard, adresse rue Gallimard, Paris VIIe arrondissement, officier de la Légion d’honneur, président du Syndicat national de l’édition, membre du Conseil d’administration de la Bibliothèque nationale de France, demande le retrait immédiat de cette traduction, et réclame des dédommagements.
Je suis usé, poussé à bout, irrité. C’est à la création que ceux-là en veulent. Ils sont prêts à tous les gâchis pour maintenir leur pouvoir.
J’ai décidé d’interrompre momentanément les publications prévues sur publie.net, et me donne trois jours pour décision d’en arrêter totalement l’activité. Je ne peux pas continuer dans un contexte de telle hostilité dont toutes les manœuvres bureaucratiques récentes ont bien montré la collusion avec le pouvoir politique.
Pourtant, comme le note Maître Eolas, en France la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession. En d'autres termes, pour que les éditions Gallimard puissent se prévaloir d'un quelconque droit sur une édition numérique, il faudrait que les ayants droit d'Hemingmay aient explicitement cédé les droits numériques de l'écrivain à Gallimard dans un contrat liant les deux parties. À titre d'information, voici très précisément ce qu'indique la loi française à l'heure où j'écris ces lignes :
Article L131-3
Créé par Loi 92-597 1992-07-01 annexe JORF 3 juillet 1992
La transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.
Lorsque des circonstances spéciales l'exigent, le contrat peut être valablement conclu par échange de télégrammes, à condition que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité conformément aux termes du premier alinéa du présent article.
Les cessions portant sur les droits d'adaptation audiovisuelle doivent faire l'objet d'un contrat écrit sur un document distinct du contrat relatif à l'édition proprement dite de l'oeuvre imprimée.
Le bénéficiaire de la cession s'engage par ce contrat à rechercher une exploitation du droit cédé conformément aux usages de la profession et à verser à l'auteur, en cas d'adaptation, une rémunération proportionnelle aux recettes perçues.
Codifié par:Anciens textes:
Nous sommes donc en présence d'un éditeur qui utilise son poids pour intimider l'auteur d'une traduction originale. Bizarrement, lorsqu'il est possible de se faire une publicité à peu de frais, un certain nombre d'avocats sont prêts à défendre gratuitement jusqu'à l'indéfendable. Là, rien. La cause ne doit pas être assez intéressante. Pourtant, s'il y a une cause à défendre, et je dois dire à défendre de toute urgence, c'est bien celle-là. C'est notre liberté qui est en jeu, rien de moins. Je ne parle pas d'une quelconque autorisation à la contrefaçon, mais de simplement faire respecter le droit et uniquement le droit, ce qui s'applique à François Bon comme à Gallimard. Or Gallimard savait parfaitement qu'en France, on ne gagne pas devant un tribunal parce qu'on a raison, comme on ne perd pas parce qu'on a tort. On gagne parce qu'on a assez d'argent pour user l'adversaire et aller au bout des procédures. Ce qui s'est passé dans l'indifférence quasi générale est juste scandaleux et augure assez mal de l'avenir.
Tant que l'intimidation primera le droit, 1984 restera encore devant nous.
Je pense qu'il y en a parmi vous qui accèdent au réseau Internet grâce à l'opérateur Orange. Heureux que vous êtes, vous n'imaginez pas la chance que vous avez puisque contrairement aux abonnés des autres fournisseurs d'accès internet, vous recevez ou allez maintenant recevoir du spam en fonction de vos habitudes sur la toile. C'est un immense progrès.
L'article 17 de ses conditions générales de vente datant de 2010 est pourtant déjà éloquent puisqu'il permet à l'opérateur de quitter son rôle de fournisseur d'accès en utilisant des données relatives au trafic des abonnés à des fins publicitaires. L'opérateur se réserve aussi le droit d'utiliser ces données durant les douze mois suivant leur émission. Il ne vous prend pas en traitre, il vous prévient.
La CNIL, qui ne rate pas une occasion de faire parler d'elle, n'avait pourtant pas tari d'éloges lorsque Orange a lancé ce qui était présenté comme un service révolutionnaire. Pourtant, Orange ne se cachait pas utiliser le DPI (Deep Packet Inspection) qui est une violation de la correspondance privée. En d'autres termes, si votre facteur se permet d'ouvrir votre courrier sans une raison valable — adresse illisible par exemple —, vous êtes en droit de porter plainte. Si Orange fait la même chose avec votre courrier électronique ou avec les données de votre navigation sur Internet, non seulement vous ne pouvez rien dire, mais en plus il faudrait lui dire merci parce qu'il s'agit d'un service révolutionnaire et gratuit.
Le problème dans cette affaire n'est pas l'utilisation de la technologie DPI. Après tout, des sites comme Google l'utilisent, mais ils ont au moins la décence de ne pas avancer cachés. Chez Orange, c'est plus mesquin, puisque l'utilisateur moyen, qui non seulement ne lit pas les conditions générales de vente — ou alors en diagonale, ce qui revient au même —, n'est pas toujours en mesure de comprendre ce qui se cache derrière un article aussi alambiqué.
Vous me demanderez pourquoi j'écris aujourd'hui un tel billet. C'est assez simple. Je gère plusieurs clients qui sont contraints de rester chez Orange et ceux-ci ont reçu récemment un courrier électronique contenant le paragraphe suivant :
Par l’acceptation de cette offre, vous autorisez France Télécom à utiliser les données relatives à votre trafic afin de pouvoir vous proposer les produits ou services de France Télécom pouvant répondre à vos besoins, et ce pour une durée de douze (12) mois à compter de leur émission. Vous pouvez vous opposer à cette utilisation à tout moment en contactant l’Orange Service Clients – Gestion des données personnelles – 33734 Bordeaux cedex 9.
Je ne sais pas si vous voyez bien le côté absurde de la chose. Pour interdire l'utilisation de ses données personnelles à fins de prospectives publicitaires ciblées, l'agrume demande à ses clients d'envoyer un courrier papier a son service clients. Pour un fournisseur d'accès internet qui règle tous ses différends avec ses clients par courrier électronique, c'est un peu fort. Mais le client ayant d'autres choses à penser, c'est autant de clients qui vont oublier de résilier cette partie du contrat. Et quand bien même un courrier sera-t-il envoyé à Bordeaux, quelle garantie avons-nous qu'Orange arrêtera ce service sur la ligne du client en question ?
La technologie DPI pose déjà de nombreux problèmes lorsqu'elle est utilisée par des marketteux et des publicitaires. Imaginez maintenant qu'elle soit utilisée par une dictature. Dormez sur vos deux oreilles, brave gens, l'agrume veille.
Je ne sais pas si vous avez bien fait attention, mais l'annonce de la candidature de Nicolas Sarkozy à un deuxième mandat présidentiel a été faite le même jour que celle de l'arrivée de l'épidémie de grippe en France. Je ne sais pas s'il y a là un lien de cause à effet, mais la coïncidence est assez troublante pour être remarquée, la France étant depuis quelque temps dans un état grippal assez prononcé.
Le même jour, nous avons découvert sous nos yeux ébahis — enfin les vôtres parce que personnellement, je suis grincheux et blasé — son affiche de campagne. Je ne résiste pas à vous présenter l'affiche originelle, celle-ci ayant été détournée avec des slogan comme la « la France morte » ou « la Francfort » et force incrustations d'images en arrière plan.
Fig. 1 : affiche officielle de la campagne
On me souffle dans l'oreille que l'affiche ci-dessus n'est pas la bonne et que celle-ci daterait de 1942. Pourtant, la ressemblance est frappante et je m'étonne que personne n'ait encore fait le rapprochement. Encore une erreur des communicants. Voici donc l'affiche officielle.
Fig. 2 : image du petit Nicolas qui veut paraître plus que sa taille alors qu'il n'y a aucune honte à être petit.
Son bilan est catastrophique — et je le dis d'autant plus que, si je porte à droite, j'ai surtout dû le supporter ! — mais jusque là, pourquoi pas. Il a parfaitement le droit de faire prendre à ses électeurs leurs vessies pour des lanternes. C'est le jeu, et si on a donné le droit de vote à tout le monde, c'est-à-dire aussi à tous les imbéciles, pourquoi s'en priver ? À sa place, je ne risquerais pas de prendre une claque aux prochaines élections, je partirais dignement sans demander mon reste et sans le déshonneur d'une défaite annoncée. Tout au plus, passerais-je pour un incompris. De Gaulle l'avait fait avant lui, Giscard n'a pas eu la défaite humiliante qui lui est actuellement promise dans les sondages et qui risque fort de ne pas changer en deux mois parce qu'il y a à la fois un rejet de la politique et de l'homme, même pour des gens votant traditionnellement à droite, je pense en particulier aux gaullistes sociaux et au centre-droit.
Sur cette affiche, le plus gênant est l'image en arrière plan. Vous allez me dire que c'est une photographie d'une mer ou d'un océan quelconque. Mais Numerama nous fait découvrir qu'il s'agit en fait d'une vue de la mer Égée depuis une côte de Grèce. La découverte a été permise par la diffusion du fichier numérique de l'affiche qui révèle, quel dommage, les données EXIF du fichier. On voit que la description de l'image de fond n'a pas été changée et qu'il s'agit d'une photo de la banque d'images Tetra Images intitulée « Greece, Clouds over Aegean See ».
La France n'a certainement pas assez de côtes maritimes pour en tirer une image de mer calme. Et surtout, que faut-il comprendre ? Je ne peux pas croire que les communicants ou prétendus tels du nouveau candidat soient tellement mauvais qu'ils n'aient pas vu le rapprochement que pourraient faire les mauvais esprits entre l'état de la France et celui de la Grèce qui se situe actuellement au bord de l'insurrection et du chaos financier.
Une gaffe de plus. Mais où s'arrêtera-t-il ?
Anton Voyl n'arrivait pas à dormir. Il alluma. Son Jaz marquait minuit vingt. Il poussa un profond soupir, s'assit dans son lit, s'appuyant sur son polochon. Il prit un roman, il l'ouvrit, il lut; mais il n'y saisissait qu'un imbroglio confus, il butait à tout instant sur un mot dont il ignorait la signification.
Il abandonna son roman sur son lit. Il alla à son lavabo; il mouilla un gant qu'il passa sur son front, sur son cou.
Son pouls battait trop fort. Il avait chaud. Il ouvrit son vasistas, scruta la nuit. Il faisait doux. Un bruit indistinct montait du faubourg. Un carillon, plus lourd qu'un glas, plus sourd qu'un tocsin, plus profond qu'un bourdon, non loin, sonna trois coups. Du canal Saint-Martin, un clapotis plaintif signalait un chaland qui passait.
Sur l'abattant du vasistas, un animal au thorax indigo, à l'aiguillon safran, ni un cafard, ni un charançon, mais plutôt un artison, s'avançait, traînant un brin d'alfa. Il s'approcha, voulant l'aplatir d'un coup vif, mais l'animal prit son vol, disparaissant dans la nuit avant qu'il ait pu l'assaillir.
Ceux qui ont quelques lettres auront reconnu un passage de « La Disparition » de Georges Perec, membre de l'oulipo. Si vous faites attention, vous remarquerez que ce livre conséquent ne comporte pas la lettre « e », une prouesse en français, un peu comme si Schiller n'avait jamais utilisé le « s ».
Comment Georges Perec a-t-il pu signer « La Disparition » ? Je n'irais pas jusqu'à dire que cette question m'obsède et m'empêche de dormir, mais cette question mérite qu'on la pose.
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