Le meilleur système au monde

31.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les politiciens, Déclaration de guerre

Je suis tombé hier sur un rapport de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociales intitulé très laconiquement :

Les coûts de gestion de l'assurance maladie.

Oui, ce sera sans doute une découverte pour notre gouvernement, mais même lorsque c'est l'état qui paie, ce n'est pas gratuit. Le document que j'ai sous les yeux et qui date de septembre 2013 est assez éloquent. J'aurais pour ma part souhaité trouver celui de 2014 mais visiblement, celui-ci n'a pas été rendu public.

Reprenons donc les bases fondamentales de la communication gouvernementale et, j'ose, des journalistes couchés qui devraient rendre leur carte de presse qui leur sert plus souvent à obtenir des avantages fiscaux qu'à effectuer le travail honnête pour lequel ils sont payés. Il ne vous a sans doute pas échappé que depuis quelques mois, la communication du meilleur système de santé auto-proclamé au monde envoie des communiqués de presse à tous les media pour signaler à leurs clients — nous en sommes des clients depuis avril 2001 et non des cotisants — qu'il est interdit d'aller voir ailleurs si l'herbe par hasard y serait plus verte. Rares sont les journalistes qui ont creusé le sujet, ceux qui l'ont fait ont été censurés. J'en veux pour preuve la video du reportage de M6 sur le RSI qui a été censuré entre autre sur Youtube aux internautes français et que vous trouverez ici avant qu'il ne disparaisse totalement. La liberté d'expression est donc en France à géométrie variable. D'une part, on se permet de manifester après les récents attentats parisiens, mais d'autre part, on permet aussi sans réchigner qu'un état soi-disant démocratique censure une émission de télévision qui ne lui plaît pas. Je vous laisse disserter sur l'état pitoyable de nos institutions.

Mais revenons à ce rapport. Le gouvernement répète à l'envi qu'il este interdit de se désaffilier de notre belle sécurité sociale parce qu'il s'agit d'un régime légal. Un régime légal, pour fixer les idées, est un régime unique pour tout le monde. Mêmes primes d'assurance (je ne parle pas de cotisations), même couverture. Bizarrement, ce document tout à fait officiel pointe en page 3, synthèse, les quatorze régimes obligatoires d'assurance maladie auxquels s'ajoutent les onze régimes spéciaux, les vingt organismes conventionnés du RSI et les organismes délégataires, chaque OJRI (objet juridique non identifié) composant le regroupement d'OJRIs qu'est la sécurité sociale à la française gérant ses heureux cotisants en dépit de la rationalité la plus élémentaire. Le régime légal a pris un peu de plomb dans l'aile, pour cause, il s'agit d'un assemblage de régimes professionnels. Et tout ce beau monde nous coûte 12,5 milliards d'euros soit un peu plus de 300 euros par heureux cotisant et par an. C'est énorme, le facteur d'échelle devrait aboutir à des coûts de gestion bien plus faibles.

Penchons-nous maintenant sur l'annexe 5, celle qui parle du RSI. Page 332, je suis heureux de lire que les coûts de gestion du RSI apparaissent élevés même si la productivité s'est améliorée à la faveur de la forte hausse des effectifs affiliés depuis 2010. Et pour cause, tous les auto-entrepreneurs, statut créé en 2009, sont affiliés d'office au RSI. Il faut donc créer artificiellement de l'activité au RSI pour qu'il s'améliore. C'eset un point de vue assez étrange d'autant que je ne sais toujours pas à quoi ce grand machin sert puisque, à titre personnel, j'étais couvert par mon organisme conventionné. Je dis bien j'étais car, en bonne vache à lait, j'ai envoyé le RSI paître.

J'apprends aussi sur la même page que le RSI commence seulement à disposer d'une comptabilité analytique aboutie. C'est bien, nous sommes tout de même sept ans après la création du machin en question. Je trouve pour ma part assez étrange qu'un bazar qui gère de pareilles sommes puisse ne serait-ce qu'exister sans avoir de comptabilité analytique digne de ce nom. Cela devrait attirer les contrôleurs fiscaux, le RSI étant une entreprise privée, cependant il n'en est rien. Mais rassurez-vous, il en est de même pour le réseau des URSSAF. Si vous voulez en avoir la preuve, rendez-vous au tribunal des affaires de la sécurité sociale de Mulhouse le 10 février courant à 14h00, il y aura du sport !

Page 334, je constate que le RSI a coûté en 2013 la bagatelle de 416,7 millions d'euros. Mais pourquoi ? La gestion in fine des heureux cotisants est déléguée aux organismes conventionnés. La réponse se trouve page 335, le RSI reverse aux organismes conventionnés des frais de gestion qui sont déjà collectés par ces mêmes organismes conventionnés. Au passage, il garde un petit pécule pour sa propre gestion de parasite du système. C'est assez shadokien et on s'étonne page 336 que les coûts de gestion du RSI sont plus élevés que ceux du régime général. J'aime assez le fait que des hauts fonctionnaires découvrent l'eau tiède et surtout essaient de trouver des solutions. C'est très divertissant et, personnellement, à la fin d'une dure journée de travail, je m'offre la lecture de tels rapports. D'autres s'offrent un Pernod, question de moyens.

Je vous laisse découvrir le reste du document qui est assez exhaustif. Mais ce rapport n'aboutira à aucune décision. Notre belle sécurité sociale est gérée par les partenaires sociaux, c'est-à-dire les syndicats. Ceux-ci ont tout intérêt à tout faire pour ne pas couper la branche sur laquelle ils sont assis. C'est pour cela qu'ils ont réussi à faire passer une nouvelle taxe (charges patronales) pour le financement des syndicats et qu'ils ont fait le lobby nécessaire pour que les charges patronales n'apparaissent plus sur la fiche de paie des salariés. C'est pour cela aussi qu'ils refusent une rationalisation de bon aloi de la protection social qui est pour eux une véritable vache à lait et qu'ils mettent autant de mauvaise volonté à instaurer des comptabilités analytiques. Ils y ont intérêt, et cet intérêt se chiffre en centaines de millions d'euros.

Cet article serait incomplet sans que le document sur les coûts de gestion de l'assurance maladie soit éclairé par le rapport Perruchot qui nous parle des partenaires sociaux et de leurs coûts. Ces coûts ponctionnent directement et indirectement la société française dans son ensemble.

La conséquence de cet état de fait est la situation actuelle de l'économie française. Des charges toujours plus hautes sont perçues sur les travailleurs pour maintenir à flot une protection sociale qui ne sert qu'à faire vivre une caste de privilégiés, accessoirement offrir des prestations aux heureux cotisants lorsqu'il reste un peu d'argent dans les caisses. Il suffit de voir les problèmes des pensions de retraite impayées depuis plusieurs mois ou des prestations de la CAF remises à plus tard pour s'en convaincre.

Il est grand temps de faire imploser le système pour avoir une vraie protection à un coût raisonnable, gérée correctement, solidaire et assurant un risque. La protection sociale en France n'a pas un coût raisonnable parce jamais n'est mis en regard du risque une prime d'assurance, c'est une taxe sur le travail pompeusement appelée cotisation. Elle n'est pas gérée correctement, tous les rapports l'ayant auditée sont d'accord là-dessus. Elle n'est pas solidaire puisqu'il y a une foultitude de régimes différents qui remboursent ce qu'ils veulent à des affiliés d'office qui n'ont pas leur mot à dire.

Le jour où la sécurité sociale à la française aura vécu sera le premier jour du relèvement de la France. Espérons qu'il ne tarde pas trop, il est temps !

   rapport_couts_gestion_assurance_maladie_2013.pdf

  rapport-perruchot.pdf

 

Emprunts toxiques

29.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les financiers, Je hais les politiciens

J'espère que vous vous en souvenez sinon je ne servirais vraiment pas à grand'chose. J'ai déjà évoqué en ce lieu la CADES chargée d'écouler notre dette souveraine sur les marchés financier.

Figurez-vous qu'hier, cette CADES s'est fendue d'un communiqué de presse à ne pas diffuser partout, raison pour laquelle je l'offre ici à votre sagacité. Vous constaterez que cette émission s'est faite en renminbi, la monnaie chinoise. Vous allez me dire, et vous aurez raison, que la monnaie chinoise est le yuan. Pas exactement. Le renminbi (RMB) est le nom officiel de la monnaie chinoise qui se traduit par « monnaie du peuple ». Le yuan est le nom désignant communément la monnaie chinoise comme unité de compte. Pour comprendre cette différence : si on avait la même différentiation en zone euro, on achèterait chaque jour notre baguette de pain 0,9 « yeuros » avec notre monnaie, le « renmeuro ». Les économistes parlent donc en général du renminbi, alors qu’un investisseur souhaitant acheter une obligation chinoise la paiera en yuans.

Cette petite précision étant faite, je constate pour ma part que nous avons emprunté en monnaie étrangère et en en étant très fiers. Comme si les emprunts toxiques adossés aux monnaies étrangères ne nous avaient pas servi de leçon récemment. Les gens ont vraiment la mémoire courte.

Pourtant quand on emprunte dans une monnaie étrangère, cela peut faire très mal lorsque cette monnaie s'apprécie vis à vis de la monnaie locale dans laquelle les sommes empruntées ont été dépensées. Lorsque l'on sait par ailleurs que la Chine achète actuellement de l'or à tout va pour préparer la convertibilité en or de sa monnaie, on peut se douter qu'elle va grimper rapidement.

Et nous allons encore payer un maximum en pleurant sur les emprunts toxiques. Les emprunts ne sont pas toxiques, seuls les gens qui les contractent sont des imbéciles.

 

Élections grecques

27.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les financiers, Je hais les politiciens

J'ai eu la curieuse impression que les élections législatives qui se sont tenues en Grèce dimanche dernier intéressaient plus les français que leurs propres élections. Je n'arrive pas non plus à savoir s'il faut se réjouir ou non de la victoire de Syriza, une coalition de la gauche radicale, qui vient de s'allier à un parti de droite nationaliste pour avoir la majorité absolue. Souvent les extrêmes se rejoignent, en voici encore une illustration patente.

Je ne peux que constater l'état de la Grèce, sa dette de plus de trois cent vingt milliards d'euros (175% de son PIB) ainsi que l'état déplorable de sa population, saignée à blanc. Il ne faut cependant pas croire que cet état fut provoqué par l'Europe. Tout au plus par l'euro. En effet, la Grèce n'aurait jamais dû rentrer dans la zone euro et ne l'a été que parce que les grandes puissances ont jeté un voile pudique sur l'état des finances de ce pays qui battait monnaie à une vitesse soutenue à l'instar de l'Espagne et de l'Italie pour vivre bien au-dessus de ses moyens.

La crise de 2008 a gravement frappé la Grèce et ce qui était jusque-là caché sous le tapis a explosé au grand jour. Sans moyen de monétiser sa dette, la Grèce a dû faire appel au FMI et à l'Europe, lesquels ont fait pression sur son gouvernement pour en assainir le budget. Des efforts ont été faits. Des efforts douloureux, mais comme la Grèce partait de tellement loin, il n'y a pas eu les réformes qui s'imposaient. Les impôts ne rentrent toujours pas, il n'y a toujours pas de véritable cadastre, une grande partie de l'économie est souterraine et échappe à l'impôt. On ne change pas en quelques années des décennies de mauvaises habitudes, tant du gouvernement qui maquille ses comptes que des contribuables qui font tout pour échapper au fisc.

Le résultat est le gâchis que l'on voit actuellement. Un pays en déconfiture, une population de plus en plus pauvre et un vote pour l'extrême gauche qui vient de s'allier avec un parti nationaliste eurosceptique.

Pourquoi ? Parce que Syriza a promis de restructurer cette dette. Mais pour cela, il va falloir discuter avec le FMI, avec l'UE, la BCE et quelques autres créanciers. Il est assez facile de déclarer abruptement que les créanciers internationaux se sont gavés sur le dos de la Grèce, mais c'est aller un peu vite en besogne. La finance n'est toujours qu'opportuniste et rien ne forçait la Grèce à vivre au-dessus de ses moyens depuis si longtemps.

Or le FMI, la BCE et l'UE ne sont pas ouverts à la négociation. Tout au plus, des delais pourraient être accordés, mais je ne vois pas comment ces trois grands créanciers pourraient renoncer au principal. Cette dette est désormais détenue à plus de 80% par les états de l'UE au travers du FESF (fonds européen de stabilité financière) et de prêts bilatéraux, par la BCE, par les banques centrales nationales des pays de la zone euros hors Bundesbank allemande et par le FMI. La répartition est la suivante :

  • FESF pour 141,8 milliards d'euros ;
  • prêts bilatéraux pour 52,9 milliards d'euros ;
  • FMI pour 32,1 milliards ;
  • créanciers obligataires PSI pour 30 milliards ;
  • BCE pour 27 milliards ;
  • autres créanciers pour 35,1 milliards (sources BNP Paribas).

La Bundesbank n'est pas exposée à la dette Grèque, mais aux créances du FESF et des prêts bilatéraux. C'est même le pays le plus exposé au risque souverain grec puisqu'il a 56,5 milliards d'engagements. Suivent la France avec 42,2 milliards, l'Italie avec 37,3 milliards et l'Espagne avec seulement 24,8 milliards. Nous sommes tous mouillés et nous risquons gros pour avoir prêté à la Grèce en espérant qu'un gouvernement puisse y remettre de l'ordre.

En 2012, la Grèce a procédé à une opération d'échange de dette. Cette manœuvre appelée PSI (Private Sector Involvement) a permis d'effacer un peu plus de 100 milliards d'euros d'obligations même si Athènes a dû par la suite recapitaliser son secteur bancaire à hauteur de 50 milliards d'euros. Ce PSI s'est aussi accompagné de fortes réductions d'intérêts et d'un rallongement substantiel des durées de remboursement. En effet, le remboursement du capital de la dette ne doit commencer qu'en 2023 et s'achever en 2042. Les créanciers publics ont aussi consenti des aménagements de leurs créances, réduisant par deux fois le taux d'intérêt et allongeant les durées de remboursement. Mieux, depuis mars 2012, les profits — gain en capital et revenus d'intérêt — réalisés par la BCE et les banques centrales nationales sur leurs portefeuilles d'obligations grecques (27 milliards d'euros) sont reversés à l'état grec.

Maintenant, ce que nous ne savons pas. La baisse des taux d'intérêt de la dette et le retour à la croissance modeste de l'économie grecque l'an dernier ont permis à la Grèce de renouer avec un excédent primaire positif. Pour 2015, la Commission Européenne prévoit un taux de croissance nominale de 3,3% et un taux d'intérêt sur la dette de 2,4%. L'excédent primaire est attendu à 4,1% du PIB. Au final, le ratio d'endettement grec devrait baisser d'au moins six points cette année. Et la commission s'attend à le voir ramené à 157,8% du PIB fin 2016.

Et c'est à ce moment que les grecs choisissent l'extrême gauche. Mélenchon content même si cela risque de définitivement ruiner le pays. Première annonce, le nouveau gouvernement fera un audit avant d'entrer dans le vif des négocations. Trois à six mois d'audit pour aboutir, d'après un article du Monde Diplomatique, à « une réduction significative de la valeur » de la dette publique. Tsípras évoquait alors « un moratoire sur le service de la dette, afin que les sommes conservées soient affectées au redressement de l’économie ».

Le problème est que la Grèce n'a pas de temps à perdre. Si un audit rigoureux pourrait permettre à Syriza d'être en position de force face aux créanciers en montrant les erreurs du passé, le gouvernement grec a aussi besoin de ses créanciers qui le maintiennent sous perfusion. Les marges de manœuvre du nouveau gouvernement grec sont donc ténues et l'automne risquera d'être difficile pour lui. Il ne suffit pas de promettre, encore faut-il tenir ses promesses. Si la Grèce n’obtient pas une renégociation de sa dette, elle peut tout simplement décider d’arrêter de la rembourser. Après tout, c'est son choix et nous avons été assez bêtes pour créer une zone euro sans fédéralisme.

C'est en fait le seul choix que son gouvernement peut faire actuellement. Baisser les taux d'intérêts plus qu'aujourd'hui risquera d'être difficile. Rallonger les durées de remboursement ne changera pas grand'chose. Objectivement, un flash du 5 janvier de Patrick Artus, analyste de Natixis, aborde l'hypothèse d'une annulation de la dette grecque et indique que

si la Grèce fait défaut sur sa dette extérieure détenue par les non-résidents, les prêteurs publics devront être remboursés de cette perte par les états de la zone euro. Ceci conduira à une hausse de 2,6 % de la dette publique de la zone euro […], ce qui ne changerait pas significativement la solvabilité budgétaire des pays de la zone euro.

Le sang froid de cet analyste me laisse assez rêveur d'autant plus que l'Espagne et l'Italie et la France seront en première ligne avec un beau tas de créances douteuses dans leur comptes. Mais pire que cela, les créanciers imposeront à nouveaux des taux d'intérêts élevés à la Grèce car les taux d'intérêts sont pour les prêteurs des primes de risque.

Faire défaut serait reculer pour mieux sauter tout en aggravant la situation à terme. Mais que ne ferait pas un gouvernement par pure idéologie ou clientélisme ?

La suite à l'automne.

 

Les affres de l'URSSAF

26.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Déclaration de guerre

J'ai reçu ce soir par la poste toujours au tarif lent un courrier de mon ancienne URSSAF. Je suis en effet en procédure contre elle depuis plusieurs années pour entre autres des faux en écriture de sa part. J'attendais une n-ième réponse négative de leur part voire leurs conclusions pour l'audience du 10 février prochain. Il serait temps.

Je n'ai reçu qu'un courrier gentil me signalant qu'en date du 15 janvier 2015, mon compte cotisant avait été transféré de mon ancienne adresse à l'URSSAF de Paris. C'est très bien, j'ai déménagé mon siège social l'an passé dans le département de la Corrèze. Je leur ai aussi signalé que j'étais l'un des 472 salopards libérés de la sécu.

Nous voyons donc que le grand machin que le monde nous envie sans le vouloir chez lui s'améliore indubitablement. Il ne perd plus les dossiers, il les traite comme bon lui semble.

 

Faites sauter la banque !

24.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les financiers, Monde de merde, Je hais les politiciens

Ça y est, c'est fait. La banque centrale européenne vient d'annoncer hier son premier quantitative easing, en bon français, son premier assouplissement quantitatif. L'euro est donc officiellement mort ce jeudi 22 janvier 2015. Je vais vous expliquer pourquoi.

Qu'en termes galants ces choses sont dites. En effet, un assouplissement quantitatif est un euphémisme par litote. Il s'agit tout simplement de faire tourner la planche à billets pour fabriquer de la monnaie de singe. Et la BCE va en imprimer pour quelques onze cents milliards d'euros en dix-huit mois. Rien que cela.

Pour fixer les idées, posons un petit calcul. La zone euro est actuellement constituée de dix-neuf pays qui comptent trois cent trente-quatre millions d'habitants. Logiquement, la France devrait récupérer deux cent dix-sept millions d'euros de masse monétaire supplémentaire sur la même période, à peu près 10% de sa dette publique. Les esprits simples et les électeurs du front de gauche diront que c'est très bien, que cela permet de se désendetter. Sauf que ce n'est pas réellement prévu comme cela. Le diable est vraiment dans les détails.

Un petit schéma valant souvent mieux qu'on long discours, voici les cours de deux monnaies étrangères vis à vis de l'euro.

Faites sauter la banque !

Fig. 1 : lente agonie vis à vis du dollar US

La chute de l'euro face au dollar semble lente, mais c'est une illusion d'optique. En effet, le dollar US est en petite forme et se déprécie lui aussi. Tout au plus se déprécie-t-il moins vite que l'euro. En revanche, le cas du franc suisse est assez éloquent :

Faites sauter la banque !

Fig. 2 : décrochage de l'euro, dévissage vis à vis du franc suisse

Le décrochage du franc suisse a été immédiat, dès l'annonce par la banque centrale de la confédération de ne plus suivre un taux de 1,2 CHF pour 1 €. On peut dire ce que l'on veut des helvètes, on peut gausser sur leur drapeau qui ressemble à deux sens interdits, mais on ne peut pas nier leur pragmatisme financier. Le banquier central suisse est très loin d'être un imbécile et savait qu'en lâchant l'euro, le franc suisse allait bondir. Il ne pouvait donc pas ignorer que les exportations suisses qui constituent tout de même une bonne part des revenus suisses allaient en pâtir et que cela risque aussi de mettre à mal les 3,5% de chômeurs de la confédération. Pourtant, il l'a fait.

Je suis prêt à faire le pari que cette décision a été mûrement réfléchie et n'a été appliquée que devant les rumeurs insistantes de QE de la part de la BCE, le banquier suisse préférant à un marasme économique en Suisse une période de difficultés qu'il juge temporaires.

Pourtant, quasiment tous les commentateurs, les marchés et les investisseurs saluent cette opération. À titre personnel, cependant, j'ai plutôt à cette occasion l'immense regret de vous faire part du décès de la monnaie unique appelée « euro ». Je ne suis ni heureux ni triste. L'euro était une bonne idée, mais on ne conçoit pas une monnaie unique sans avoir a minima un gouvernement économique commun. La question est maintenant de savoir s'il faut à tout prix continuer cette aventure désastreuse.

Regardons maintenant les conséquences probables de cet assouplissement quantitatif annoncé par Mario Draghi. Le mécanisme est assez subtil pour tenter de le décortiquer. Dès l'annonce de cette opération, les opérateurs de marché ont réagi positivement et le CAC40 s'est apprécié de 1% en quelques minutes. Mais, dès que Mario Draghi a précisé que les banques centrales nationales porteront 80% des risques liés aux rachats contre 20% pour la banque centrale européenne, les mêmes opérateurs ont immédiatement prix leurs bénéfices. Pas folles, les guêpes !

En d'autres termes, chaque banque nationale va racheter ses propres obligations d'état, la banque centrale européenne ne portant que 20% du risque, soit deux cent vingt milliards d'euros sur les once cents milliards qui devraient être injectés. Toutes les banques nationales viennent donc d'obtenir le droit de battre monnaie quasiment à discrétion pour monétiser leurs dettes d'état, ce qui semble tout de même assez paradoxal lorsqu'on se targue d'avoir une monnaie unique.

Ce que vient donc de faire Mario Draghi est de reconnaître implicitement que l'euro est mort. Parce que la conséquence de cette monétisation est la suivante : l'Italie va battre monnaie comme du temps de la lire, même chose pour l'Espagne ou la Grèce. L'Allemagne quant à elle n'imprimera pas un seul billet puisqu'elle se permet même le luxe d'avoir un budget excédentaire. Quant à la France, je vous file mon billet que nous amis du gouvernement vont monétiser à tout va en nous expliquant comment dépenser cette cagnotte providentielle.

Sauf que ces billets vont être imprimés et mis en circulation. Les banques centrales vont les inscrire à leurs bilans et il risque fort de se passer quelque chose. C'est justement ce quelque chose qui a poussé la Suisse à ne plus défendre sa monnaie puisque la Suisse à elle seule ne peut pas défendre l'euro. Y a-t-elle seulement intérêt ? Si la Suisse continue à acheter des euros, que fera-t-elle lorsqu'elle ne sera plus en possession que de monnaie de singe ? Continuer à défendre l'euro est même dangereux pour elle puisque du jour au lendemain, l'euro pourrait bien ne plus rien valoir du tout.

La décision de jeudi dernier enterre simplement le concept d'union monétaire puisqu'il est impossible de parler d'union monétaire lorsque toutes les banques nationales peuvent monétiser comme elles le veulent. Aujourd'hui, toutes ces banques vont imprimer des euros, mais ce n'est pas une solution viable à terme. Certaines banques vont en imprimer plus que d'autres mais la valeur globale de l'euro sera fixée par la masse monétaire libellée en euros. Lorsque le déséquilibre sera trop grand, l'euro implosera de lui-même, naturellement.

La catastrophe est déjà écrite, rien ou presque ne pourra l'arrêter. C'est cela que la décision de la Banque centrale suisse a voulu dire. La taille de l'assouplissement n'est pas le sujet.

 

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