Le pop orphelin

24.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Monde de merde

Sale journée. Me reviennent les paroles du générique du Pop Club version Lucien Ginsburg, dit Serge Gainsbourg :

Connaissez-vous les Champs Élysées ?
Pour les alyzées, allez-y !
Bercé par la voix de José,
Du lundi jusqu'au vendredi

Prenez une bouffée d'air pur,
Écoutez José Artur !
Des mots trempés dans le cyanure,
Écoutez José Artur !

Cette émission rythmait mes soirées d'étudiant. Je passais du devoir de mathématiques à celui de physique lorsque j'entendais Georges Brassens dans le poste, juste après le flash d'information de 23h00. J'ai apprécié ses différents talents, son éclectisme, sa voix et son culot.

Aujourd'hui, 24 janvier 2015, la voix de José Artur s'est définitivement tue à la suite d'un accident vasculaire cérébral. La camarde dont il se moquait — souvenez-vous qu'il disait que les quatre-vingts premières années de sa vie avaient été très dures mais que maintenant, ça allait mieux — a fini par le rattraper.

 

Le poids des mots, le choc des photos

20.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Mauvaise humeur, Je hais les politiciens

MST et son fan club n'en ratent décidement pas une. Dernièrement, il paraît que notre cher ministre de la santé se serait faite insulter par une fresque dans un local de l'hôpital universitaire de Clermont-Ferrand. Cette fresque, la voici :

Le poids des mots, le choc des photos

Fig. 1 : preuve du délit

Certes, cela frôle le bon goût sans jamais ne tomber dedans. Notre chère ministre de la santé s'en est offusquée et son entourage a même cru bon d'ajouter qu'il s'agissait d'une image d'un viol du ministre. Il y juste un petit problème car, au moment de faire recouvrir cette fresque d'un goût douteux, un petit malin a pris une photographie des ouvriers. Cette photographie, la voici :

Le poids des mots, le choc des photos

Fig. 2 : preuve du mensonge

L'absence de bulles m'a fait creuser le sujet. J'ai appris que cette fresque décorait ce local depuis plus de dix ans. Quatorze ans pour être très exact. Ce n'est que parce qu'un interne avec un esprit aussi potache que l'artiste initial l'a détournée pour s'adresser au ministre que cette fresque a défrayé la chronique et que la direction de l'hôpital s'en est ému. Jamais il n'y a eu de phylactères sur cette fresque, ceux-ci n'existaient que dans la mémoire d'un ordinateur. Ce n'était qu'un vulgaire montage photographique.

Mais ce mensonge a fait couler beaucoup d'encre. Et tant qu'on ne parle que de cela, on divertit, on élude le fond du problème. Cela permet de faire passer à peu de frais les médecins pour des gens infréquentables qu'il convient de remettre dans les rangs.

Je pensais personnellement que notre classe politique avait déjà touché le fond. Force est de constater qu'elle peut encore creuser.

 

Le prophète et le bonhomme de neige

17.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les tradis

Cela aurait pu être le titre d'une fable que La Fontaine n'aurait pas pu piller à Ésope. Cela aurait pu l'être si ce n'était pas aussi risible et symptomatique de l'évolution de certains courants religieux.

Il a neigé. Pas chez nous, non, mais en Arabie Saoudite où un joli manteau blanc recouvre le nord du pays. Le froid n'est pas une nouveauté dans ce pays, mais la neige est tout de même assez rare. Et avec la neige se trouvent toujours quelques personnes pour faire des dromadaires de neige, voire pour les plus mécréants des bonshommes de neige.

Le prophète et le bonhomme de neige

Fig. 1 : activités anti-islamiques de dangereux progressistes qu'il convient remettre dans le droit chemin

En effet, un certain Mohammad Saleh Al-Munadjid, un des cheikhs islamiques les plus influents du royaume, prétend que ceux qui seraient tentés de confectionner des bonshommes de neige feraient preuve d'un comportement dangereusement anti-islamique.

Tu m'en diras tant. Je propose qu'on leur coupe immédiatement la tête au sabre en place publique pour dissuader ceux qui seraient enclins à devenir de dangereux contrevenants à ne pas franchir la ligne blanche.

Le pire est que ce monsieur a été interrogé sur un site web religieux où il répond aux questions des fidèles par un père de famille. Si vous ne me croyez pas, la question et les réponses argumentées du cheick se trouvent ici. Je suis profondément désolé pour ceux qui ne liraient pas les plats de nouilles dans le texte, dans ce cas, il vous reste les services de traduction en ligne qui donnent une image assez fidèle de la teneur du texte.

Le cheick répond à la question à la question de savoir si un bon musulman a le droit de s'amuser avec ses enfants en faisant un bonhomme de neige et surtout de savoir s'il lui est permis sans griller en enfer de lui faire des yeux, un nez et une bouche. La réponse, détaillée et appuyée par l'avis d'érudits musulmans ou prétendus tels, démontre que ce type de construction revient à recréer l'image d'un être humain et que, selon l'interprétation rigoriste de l'islam sunnite pratiqué en Arabie Saoudite, c'est un grave péché. Les frondeurs s'exposent à des sanctions entre autre parce que le chick estime que :

Dieu a accordé aux gens la liberté de construire tout ce qu'ils veulent, à condition que ça ne contienne pas d'âme : des arbres, des bateaux, des fruits, des habitations…

Je suis assez contents pour les chiites iraniens qui ont la chance d'avoir un peu plus de neige à Téhéran et le droit de faire des bonshommes de neige sans qu'une fatwa leur tombe sur la figure sans crier gare. Mais à bien regarder, je trouve cette analyse quelque peu étrange. En effet, je suis assez content de savoir qu'un arbre, qu'un bateau, qu'un fruit ou qu'une habitation ne contiennent aucune âme. Le contraire m'eut dérangé et je pense que je n'aurais plus jamais abattu un arbre ou coupé un fruit de la même façon. Cela sous-entend aussi qu'un bonhomme de neige aurait une âme et que le cheick estime que le musulman est si faible qu'à partir du moment où il construit un bonhomme de neige, ce bonhomme de neige devient une icône païenne qu'il va forcément prendre pour un dieu et adorer. S'il n'y a pas d'alcool dans son beau pays, j'aimerais tout de même savoir ce que le cheick a bu — sans doute pas seulement de l'eau de la source zamzam — ou fumé pour produire un tel tissu de bêtises. Mais je suis beau joueur, je reconnais l'effort produit et l'entraînement sévère qu'il doit y avoir caché derrière cette petite déclaration.

Une question sous-jacente mérite pourtant d'être posée. S'agit-il d'une n-ième fatwa insolite de ce cheick qui n'en est pas à son coup d'essai puisqu'en 2008, il avait déjà appelé à tuer tous les rongeurs ? Dit comme cela, la fatwa pourrait paraître anodine tant les rongeurs peuvent être des nuisibles. Mais il conclut sa fatwa par un appel explicite à tuer Mickey Mouse, ce qui en change un peu le sens et la portée. Le pas qu'il a alors franchi aurait dû immédiatement l'amener à l'hôpital psychiatrique le plus proche muni d'une chemise avec les manches dans le dos. Mais il n'en a rien été. Et s'il ne s'agit pas d'une fatwa né dans le cerveau malade d'un religieux dément, ne s'agit-il pas plus incidieusement d'un combat contre une tradition prétendûment occidentale ?

Lorsque je travaillais dans ce pays, j'ai à de nombreuses reprises constaté la disjonction entre l'homme de la rue et le gouvernement rigoriste qui n'était là que pour donner bonne mesure aux musulmans du monde entier. Le roi n'est ni roi ni émir, son titre est le gardien des deux mosquées, ce qui n'est pas anodin. Le résultat est une population sclérosée, hypocrite. Il n'y a officiellement ni alcool ni pornographie. Je n'en ai jamais vu autant. Certes, pas dans la rue, mais sur les téléphones cellulaires, dans les palaces. Je n'en ai jamais vu autant parce que c'est interdit, comme durant la prohibition aux États-Unis. Un saoudien est capable de faire 1500 kilomètres un week-end pour aller se saouler à Bahrein et retrouver des marocaines qui l'attendent dans le placard de sa chambre, livrées par lespalaces comme oreillers. Puis il rendre chez lui complètement ivre au volant de sa voiture mais il n'y a aucun contrôle d'alcoolémie, officiellement, il n'y a pas d'alcool.

Si elle veut évoluer, la maison saoudienne devrait refuser les cheicks.

 

Petite analyse de la dette française à destination des imbéciles et des électeurs du Front de Gauche

15.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les financiers, Je hais les politiciens

D'après certains beaux parleurs de gauche, qu'il s'agisse des frondeurs, du Parti de Gauche ou de la gauche de la gauche, nous n'avons qu'à refuser de payer la dette de l'état pour que tout les problèmes de financement soient une bonne fois pour toute réglés, comme si notre déficit n'avait aucune source structurelle.

Ce faisant, ils évitent la question sournoise et incidieuse de savoir qui détient effectivement cette dette française. Pourtant, cette question, chaque contribuable français est en droit de la poser puisqu'il la finance au travers de ses impôts et des taxes et contributions qu'il paie. Je ne sais pas si vous avez remarqué la poésie de l'état lorsqu'il s'agit de nous ponctionner toujours un peu plus. À titre personnel, je trouve que nous vivons dans un pays fabuleux qui a tout de même réussi à régler tous ses problèmes fiscaux en appelant une taxe une contribution.

Mais revenons au sujet puisqu'une fois de plus je me suis coupé moi-même la parole. Revenons donc à la propriété de cette fichue dette. Figurez-vous que j'ai essayé de savoir en détail qui détient effectivement les créances françaises. Si on arrive assez facilement à avoir quelques informations générales, j'avoue qu'il est pratiquement impossible d'en avoir une vue précise tant cette dette relève d'un secret d'état bien gardé. Donner quelques informations devrait donner peur à la fois au contribuable de base français mais aussi aux diverses agences de notation.

À la fin du quatrième trimestre 2011, la dette publique au sens de Maastricht, qui est une dette brute et bizarrement calculée — j'en ai déjà parlé ici —, s'établit à 1717,3 milliards d'euros. La question est de savoir comment sont répartis ces titres. En effet, si ces titres sont répartis entre une multitude de petits épargnants, sa gestion sera différente de celle de titres dans les mains de quelques grands groupes financiers ou de fonds de pensions anglo-saxons. Les premiers prêtent en bons pères de famille, les seconds sont bien plus spéculateurs, avides, prêts à tout pour faire monter les taux d'intérêts quitte à mettre un pays à genoux. Je ne sais pas si vous voyez bien de quoi je veux parler. Pourtant, les exemples de la Grèce et des pays du sud de l'Europe sont assez éloquents. Bien entendu, ces spéculateurs ne sont pas responsables de ces crises financières, ils ne sont qu'opportunistes et il convient de ne pas leur jeter la pierre. Nous n'avons fait que nous mettre à leur merci.

Savoir qui détient notre dette permettrait de mesurer les conséquences d'un défaut de paiement, partiel ou total. L'hypothèse n'est pas absurde tant les finances françaises sont dans un état déplorable.

Assez étrangement, les banques européennes ont obtenu un prêt de plus de 450 milliards d'euros à 1% de la banque centrale européenne pour acheter fin 2011 de la dette européenne. Rassurez-vous, les banques françaises n'ont pas été en reste.

Pour se financer, l'état français vend ses bijoux de famille — entreprises, bâtiments, matériels de l'armée récemment, aéroports et j'en passe — et, de temps en temps lorsque le temps le permet, il émet des titres financiers, généralement sous la forme d'obligations. Une obligation, c'est un titre qui porte lors de son émission une échéance et un taux d'intérêt. Contrairement à une action, une obligation est prévisible sauf défaut de l'émetteur. Ces titres sont mis sur le marché par adjudication de l'Agence France Trésor à vingt banques aggrées, les « spécialistes en valeur du Trésor » (« SVT », de BNP Paribas à Goldman Sachs, en passant par Natixis, la Deutsche Bank ou la Société générale) chargés de les écouler. Ces banques savent donc à qui elles vendent — éventuellement — ces titres. Mais une fois ces titres vendus, ils circulent librement, quasiment au porteur. Leur détenteur final perçoit quant à lui ses intérêts tous les ans, intérêts qui ont été de 45,2 milliards d'euros pour l'année 2010.

En théorie, donc, comme les détenteurs de cette dette perçoivent des intérêts, on devrait les connaître.

Pourtant, sur le site de l'Agence France Trésor, rares sont les informations disponibles. Tout au plus apprend-on que 66% des détenteurs de la dette française sont des non-résidents français. En fouillant un peu, on trouve qu'à la louche, un tiers de la dette est déténue par des investisseurs français, qu'un autre tiers est détenu au sein de la zone euro et que le restant est détenu hors zone euro. Mais cela se corse lorsque l'on sait qu'un non-résident peut être un faux nez puisque sont comptabilisés dans les non-résidents des français de France qui détiennent ces titres au travers d'un portefeuille d'obligations géré à l'étranger, dans un paradis fiscal ou non. Pire, un investisseur qatari qui a investi dans la dette française au travers d'un fonds d'investissement à Luxembourg est considéré comme un investisseur en zone euro !

En creusant un peu le sujet, on apprend que les trois plus gros détenteurs de la dette française sont le Luxembourg, les Îles Caïmans et le Royaume-Uni. Pour information, la population des Îles Caïmans est de 44000 habitants et je doute qu'ils puissent à eux seuls financer leur quote-part même avec la meilleure volonté du monde.

Arrive donc la question qui fâche. Qui détient la dette française et est-ce un secret d'état ? Les enquêtes réalisées par l’Agence France Trésor auprès de ses vingt banques partenaires permettent d’en savoir un peu plus sur les gros acheteurs : principalement des banques centrales, des fonds souverains, des assureurs, des banques commerciales et des fonds de pension. Ce que confirme la base de données financières eMAXX, mise en place par Thomson et l’agence de presse Reuters, qui publient régulièrement la liste « des cinquante plus gros détenteurs de dette souveraine française » (hors banques centrales). Nous y retrouvons des assureurs (Axa, Allianz…), des mutuelles (MMA, MAAF, Groupama…), des banques (BNP-Paribas, La Banque postale, ING…) et une multitude de fonds d’investissement, principalement européens. Impossible d'en savoir plus alors que cette information est pourtant cruciale pour notre avenir.

Or cette absence de transparence est voulue. Elle est même inscrite dans la loi actuellement en vigueur — notamment l’article L. 228-2 du code de commerce, décret d’application n° 2002-803 du 3 mai 2002 publié au Journal officiel du 5 mai 2002, et l’article L. 212-4 du code monétaire et financier relatif à la nominativité obligatoire — et qui n’autorisent les conservateurs d’instruments financiers à communiquer aux émetteurs la liste de leurs détenteurs finaux qu’aux seuls émetteurs d’actions, de bons de souscription d’actions ou d’instruments de taux donnant immédiatement ou à terme accès au capital. Subtil.

Subséquemment, l'Agence France Trésor ne peut identifier précisément les détenteurs des obligations et bons du trésor. Fermez le ban, nous n'avons pas à savoir qui nous détient. Et ce, quelles qu'en soient les conséquences.

Face à cette opacité généralisée, des chercheurs suisses ont enquêté. Fins connaisseurs du gruyère, des banques et de l'opacité des transactions, il ne fallait pas moins que cela. Leurs conclusions sont édifiantes. Ils ont révélé que cent quarante-sept multinationales, tout en se contrôlant elles-mêmes, possèdent 40% de la valeur économique et financière des dizaines de milliers de multinationales du monde entier (source). Il serait étonnant qu'il n'en soit pas ainsi pour les dettes souveraines. Effectivement, selon les données présentées par la Banque des Règlements Internationaux (BRI), un organisme géré par cinquante-huit banques centrales nationales, les banques étrangères possédaient en juin 2011 13 % de la dette de l’État français. Soit 176 milliards d’euros, dont plus des deux tiers sont entre les mains de banques britanniques, japonaises, allemandes, états-uniennes et suisses. Mais il ne s’agit que d’un euro sur dix empruntés. Les autres, on ne sait trop. Sans doute se trouvent-ils répartis chez vous et moi, sournoisement.

Vous avez peut-être oublié le versement des intérêts aux porteurs des titres. Ou vous vous demandez encore comment l'état fait pour verser ses intérêts. Rassurez-vous, il y a pensé. La société  Euroclear France, organisme boursier privé, est le dépositaire central des titres français. Elle fait l'intermédiaire entre la Banque de France et les détenteurs de titres du Trésor pour leur verser leurs intérêts ou leur pécule quand l’emprunt arrive à échéance. Euroclear sait ainsi parfaitement qui détient quoi et à quel moment. Mais la loi lui interdit de rendre ces données publiques.

Pourtant, ce sont bien les contribuables qui financent.

À terme, ce seront tous les citoyens qui vont payer. Directement ou indirectement.

 

La guerre du train n'aura pas lieu

14.01.15 | par Le Grincheux | Catégories: Je hais les financiers, Je hais les politiciens

J'ai la chance d'être ce que la SNCF appelle un grand voyageur. En effet, j'ai la chance de faire quelques milliers de kilomètres tous les mois grâce à la SNCF et je commence à en entrevoir les desseins profonds. Je vous l'avoue, c'est un peu difficile tant les intérêts de la direction de la SNCF, de celle de RFF, des syndicats et du monde politique y jouent une guerre de tous les instants. Heureusement que radio-sacoche m'a un peu aidé sur ce coup-là.

Depuis des années, je constate que la petite ligne Limoges-Brive, celle qui passe par Pompadour, est en travaux l'été. Naïvement, lorsque j'ai appris que RFF changeait les traverses antédiluviennes, je pensais que c'était pour en mettre des neuves. Que nenni, je sais maintenant de source sûre que les traverses qui sont posées actuellement sont les anciennes traverses déposées de la ligne d'Ussel qui, elle, a eu la chance d'en avoir de plus neuves. Ce qui n'est plus bon pour Ussel est bon pour Pompadour et Saint-Yrieix. Passons. Je pense pourtant que ce qui coûte réellement cher dans cette opération ne sont pas les traverses mais le fait de devoir déposer les voies.

J'ai aussi appris que cette ligne était en sursis car RFF ne voulait plus entretenir les infrastructures entre Pompadour et Saint-Yrieix. Le projet est donc de faire un terminus à Pompadour depuis Brive et un autre à Saint-Yrieix depuis Limoges. C'est très bien, sauf que la majorité des ouvrages d'art sont à Vignols — les sept viaducs — et que les ouvrages d'arts entre Pompadour et Saint-Yrieix sont bien moins nombreux et ont tous été restaurés récemment — dont un tunnel refait à neuf. Passons.

Il y a quelques années, les horaires de cette ligne ont été complètement désorganisés pour que plus personne ne puisse la prendre, le nombre de rotations a été réduit, les gares fermées, les voies de croisement déposées. Une fois la ligne coupée en deux, la SNCF déclarera que ses trains seront vides et elle sera supprimée comme a été supprimée la liaison entre Limoges ou Brive et Clermont-Ferrand parce que la région Auvergne n'a pas voulu achever les travaux entre Laqueuille et Eygurande, un petit tronçon de 22 km de voies pour 7 millions d'euros que la région Limousin était prête à prendre en charge au moins en partie.

Vous allez me dire que c'est perdu au fin fond du Massif Central et vous aurez raison. Il n'empêche que c'est en plein milieu de la ligne Bordeaux-Lyon et, qu'à l'heure où j'écris ces lignes, le Bordeaux-Lyon demande un passage par Paris. La fermeture de la ligne Ussel-Laqueuille est non seulement scandaleuse sur le plan de l'aménagement du territoire, mais aussi sur le plan de l'utilisation des finances publiques. Alors que des dizaines de millions d'euros ont été investis dans le but de revitaliser la liaison transrégionale, des sections de voies quasiment neuves se retrouvent à l'abandon ou en cul-de-sac. Entre Eygurande et Ussel, la fibre optique a même été posée quelques mois avant la fermeture. Il est évident que tous ces investissements n'ont une utilité qu'avec une liaison de bout en bout.

Remarquez bien que la région Auvergne n'en est pas à son coup d'essai car un autre tronçon vers la région Rhône-Alpes a été fermé récemment. Ce ne serait que risible si la France n'était pas en déficit chronique et que ce n'était pas l'argent du contribuable.

Pourtant, en ces temps de disette budgétaire et malgré le fait que le conseil d'état a rejeté la LGV Poitiers-Limoges, sa déclaration d'utilité publique vient d'être signée. C'était le 10 janvier dernier.

La LGV Poitiers-Limoges, qu'est-ce donc ? Vous allez me dire qu'il s'agit d'une ligne à grande vitesse pour faire rouler des TGV et vous auriez tort. En effet, il s'agit d'un barreau à voie unique reliant comme son nom l'indique la capitale poitevine chère à Marie-Ségolène Royal à Limoges, donc un peu Brive-la-Gaillarde donc un peu aussi Tulle chère à son ancien petit ami actuellement grand croix de la légion d'honneur et accessoirement président d'une république un peu trop bananière.

Il est vrai qu'aujourd'hui, les 130 kilomètres séparant la gare de Poitiers de celle de Limoges-Bénédictins sont avalés en deux heures par un train régional sur une antique ligne à voie unique. Mais ce barreau de LGV étant à voie unique lui aussi, la vitesse maximale d'un TGV sera limitée à 160 km/h, ce qui nous promet au mieux un parcours en 50 minutes. Vous me direz que c'est toujours cela de gagné. Mais de Paris-Montparnasse à Poitiers, il y a déjà 1h40 de trajet. En rajoutant les cinquantes minutes restantes, cela nous fait au mieux 2h30 de Paris à Limoges sans compter un arrêt intermédiaire.

Pourtant, le Capitole, en 1969 partait déjà de Paris-Austerlitz à 7h45 le matin pour arriver à 10h39 à Limoges-Bénédictins, soit 2h54 de temps de parcours. Avec les moyens de tractions actuels, il serait parfaitement envisageable d'atteindre Limoges en 2h30 de Paris par la ligne POLT. Encore faut-il s'en donner les moyens et le vouloir, c'est-à-dire entretenir cette ligne.

Hélas, une fois de plus, le copinage pour ne pas dire le cul-inage a frappé. Le conseil d'état dit non, rejette le projet sur le fond, cela ne fait rien, le chef d'état dit oui. Il dit oui pour un projet à la rentabilité que l'on sait par avance douteuse voire totalement désastreuse. Il dit oui à un projet classé loin dans les priorités par la commission Mobilité 21 de Philippe Duron qui ralentissait considérablement l'équipement du pays en lignes à grande vitesse.

Autre problème et non des moindres : l'analyse du conseil d'état contrarie les grands desseins présidentiels d'une meilleure desserte du centre de la France et de la Corrèze en particulier…  Pire, le calendrier est terrible pour François Hollande. Si un décret n'avait pas été pris avant le 12 janvier dernier, soit 18 mois après la fin de l'enquête publique qui s'était soldée on ne sait comment par un avis positif, la DUP aurait été impossible. Et le 12 janvier, c'est quelques jours avant la présentation des vœux du président de la République aux Corréziens.

Dilemme. Que faire ? Imposer le décret de DUP tout en sachant qu'il serait cassé plus tard ? Cela éviterait tout juste d'affronter les quolibets et les critiques. Ou bien prendre son courage à deux mains, acter tout de suite l'évidence, et concentrer tous les efforts pour la présentation d'une solution plus raisonnable, à savoir, probablement, la modernisation du fameux POLT (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse) oublié par tous les gouvernements successifs depuis que la priorité est donnée au tout TGV ? Car la renaissance du POLT correspond bien à la volonté de faire émerger un troisième type de voie ferroviaire, entre les TGV rapides et coûteux et les TER régionaux, lents et très subventionnés. La mission récemment installée par Alain Vidalies, et présidée par Philippe Duron, pour réfléchir à l'avenir des TET, pourrait donc relancer la ligne, en s'appuyant sur des chiffres positifs : la liaison Paris-Limoges est la seule franchement bénéficiaire parmi les lignes TET, avec des taux de remplissage supérieurs à 90% ! Moyennant quelques travaux peu coûteux, voire son équipement en matériel pendulaire, les temps de parcours pourraient être réduits pour atteindre ceux de la ligne Paris-Poitiers-Limoges tout en rendant service à bien davantage de territoires que la seule Poitiers-Limoges.

Ce dossier explosif révèle bien des fractures au sein de la classe politique, entre les tenants d'une politique volontariste d'infrastructures, quels qu'en soient les coûts ou presque, et les partisans d'une priorité à la modernisation de l'existant et aux projets matures. Le combat n'est pas terminé. Cela ne fait même que commencer.

Poitiers-Limoges, c'est la ligne Chirac-Hollande-Royal, avec de très forts relents de clientélisme électoral. Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, c'est bien moins vendeur pour les élus, mais beaucoup moins cher aussi pour la collectivité.

 

Pages: 1 ... 72 73 74 ...75 ... 77 ...79 ...80 81 82 ... 204

Novembre 2024
Lun Mar Mer Jeu Ven Sam Dim
        1 2 3
4 5 6 7 8 9 10
11 12 13 14 15 16 17
18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30  
 << <   > >>

Le carnet du grincheux

(Mauvaise) humeur du Grincheux

Outils utilisateur

    Rechercher

      Flux XML

    powered by b2evolution CMS